C'est bien écrit

Annotation :

Un grand classique. Construire une histoire comme on construirait un level design. Raconter l'histoire d'une maison, pièce par pièce, pour dresser le portrait d'une malédiction familiale.
Choisir de raconter avec de moins en moins de narration ; situer plutôt qu'exposer, illustrer plutôt que décrire. Le tout avec beaucoup d'émotion. Des moments gravés à jamais dans la mémoire du joueur.

Annotation :

Après un bref texte d'exposition, le jeu nous lâche et ne nous raconte plus rien autrement que par ce qu'il nous donne à voir, et à écouter.
Tout se raconte au travers d'un talkie-walkie dans un dialogue dont on choisit nous-même les lignes. On s'égare, on s'inquiète et on tombe amoureux. Tout ça avec un simple paysage sous nos pas, et deux voix dans des talkie-walkies.

Annotation :

Qu'on soit cueilli ou non par le ou les twists présents dans le scénario, et même s'il est permis de trouver assez convenus les états d'âme de tout ce petit monde, il y a une chose qu'on ne peut pas nier : la construction de la trame par blocs de narration rendus accessibles petit à petit à mesure que la compréhension du tout se fait dans notre tête de joueur, c'est brillant.
C'était déjà brillant dans Her Story, le jeu précédent du créateur, reposant sur exactement le même principe.
Telling Lies est dispo en français et sur bien des plateformes. Ce n'est pas le cas de Her Story donc je n'y ai jamais joué. Mais considérez-le présent dans cette liste.

Annotation :

Par bien des aspects de son scénario, ce jeu narratif est efficace sans être mémorable. Notons tout de même qu'il aborde avec un point de vue astucieux la condition de la femme dans l'académisme scientifique, les privilèges de reproduction entre pairs dans ce même milieu, des choses intello comme ça. Et c'est pas mal.
Mais South of the Circle reste en tête comme une référence à laquelle on repense, pour ce petit truc ingénieux en fin de partie qui fait nous interroger sur la narration, sur toute histoire qui nous est narrée par le biais d'un narrateur central et unique, et ce que ça peut engendrer d'intéressant.
En littérature on pense à Agatha Christie et à son roman Le Meurtre de Roger Ackroyd.
En jeu video on pense à South of the Circle.

Annotation :

Il faudra attendre la toute fin du jeu pour comprendre ce qui lui vaut sa place dans cette liste. Un moment parfait de cohérence narration/gameplay qui semble presque nous dire que tout ce qui a précédé n'avait pour raison d'être que parvenir à ce moment. Ingénieux, intelligent, bien amené, et émouvant. Tout ça sans rien souligner. Juste grâce au gameplay.
A part ça le reste est cool, c'est un conte genre Scandinave, mais rien d'autre que le moment cité précédemment ne brille particulièrement par son écriture.

Annotation :

Le voilà. Le roi des rois. Il est dans toutes mes listes.
Outer Wilds c'est super bien écrit. Déjà parce que l'histoire est incroyable, sidérante, immense, pleine de sense of wonder comme les meilleurs histoires de science-fiction à base de grand machin mystérieux qui fait irruption dans l'univers (Rama, 2001, Spin...).
Mais surtout parce que pour ça comme pour le reste, Outer Wilds fait confiance en l'intelligence du joueur et ne lui livre rien facilement. La liberté d'explorer la formidable odyssée que raconte le jeu est totale. A charge du joueur d'aller ramasser les miettes d'histoire disséminées aux quatre coins de ce système solaire, d'aller voir et comprendre de ses propres yeux, d'aller lire les témoignages de la civilisation disparue, de recouper tout ça mentalement pour dresser le panorama de la plus fascinante et ambitieuse aventure du jeu video.
Quand ce qui n'est à la base qu'un jeu de pistes - aussi génial soit-il - finit par délivrer, au terme d'une recherche libre et décousue, toutes les émotions qu'on peut attendre d'une histoire bien racontée, alors oui, on peut affirmer que c'est bien écrit.

Annotation :

Construction assez classique façon éclatée, on ne comprend pas ce qui se passe sauf à la toute fin. La thématique aussi est assez classique. C'est pas le premier qui aborde tout ça, disons.
Mais je sais pas, il y a quelque chose dans la façon dont c'est distillé au compte-gouttes, le surnaturel comme le symbolique. Il y a quelque chose dans la subtilité de certains moments, l'absence de manichéisme, l'émotion et l'intelligence de la toute fin.

Annotation :

Déjà c'est bien écrit dans l'acception la plus simple du terme : certains dialogues sont brillants, criants d'authenticité. Ça tape juste.
Mais la construction du récit aussi est maîtrisée. Chaque séquence essaye d'avoir son petit gimmick de mise en scène, et plus d'une fois cette mise en scène est cohérente avec le sentiment illustré.
C'est super bien foutu quoi. C'est profond et ça remue à l'intérieur.

Annotation :

Adapté d'un roman du même nom de Stanislas Lem (l'immense auteur de Solaris, ce chef d'oeuvre de la SF), le scénario du jeu se paye même le luxe d'être mieux maîtrisé que le roman. En terme de rythme, de scènes, et dans la façon dont progresse la résolution du mystère. En outre, la narration se fait à l'instar de ce qui avait fait l'ingéniosité de Firewatch (cf. plus haut dans la liste) par le biais de communication radio. Entendre l'héroïne exprimer l'inquiétude d'une voix sidérée et fébrile, ça fonctionne toujours aussi bien et c'est une bonne astuce pour délivrer des éléments de compréhension.

Annotation :

Un peu comme "A Space for the Unbound" listé plus haut, ici le surnaturel a fonction symbolique. Il faudra se triturer en conjectures de toute sorte et éventuellement à la fin on aura vaguement l'impression d'avoir compris. Mais quoiqu'il en soit il y a ce sentiment de la force symbolique et des grandes histoires tristes et intenses.

Annotation :

Enfin un peu de premier degré : Citizen Sleeper est bien écrit.
Dans le sens écrit avec de jolis mots et de belles phrases.
C'est un jeu qui se raconte essentiellement par le texte qu'il nous donne à lire. C'est très littéraire quoi. Et pour le coup du texte il y en a plein.
Comme Disco Elysium, mais en bien écrit.