Cover Promenade à travers l'univers foisonnant du JAZZ

Promenade à travers l'univers foisonnant du JAZZ

Les annotations sont des notes de lecture tirées pour la plupart de:
- Franck Medioni, Sounds of Surprise, Le Jazz en 100 disques, Le mot et le reste, 2017
- The Penguin Jazz guide, The History of Music in the 1001 Best Albums, Penguin Books, 2010

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203 albums

créee il y a environ 1 an · modifiée il y a environ 5 heures

Hot Five and Hot Seven 1925-1928

Hot Five and Hot Seven 1925-1928 (1990)

Sortie : 1990 (France).

Compilation de Louis Armstrong

abscondita a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Disque enregistré entre 1925 et 1928 par Armstrong et ses groupes Hot Five et Hot Seven.

Louis Armstrong est le pionnier du jazz et le premier grand soliste du jazz. Il pose les fondations de cette musique noire américaine qui aurait pu demeurer un folklore limité au sud des États-Unis, et qui s’est répandue au contraire dans le monde entier. Armstrong affirme son style très tôt, le tout dans un beau sourire : une attaque franche à la trompette, une articulation parfaite (chaque note est parfaitement détachée, comme ciselée), un son puissant , très clair, ouvert, avec beaucoup de « feeling », un vibrato ample.

Entre 1925 et 1928, “Satchmo” grave une série de titres mémorables à la tête de ses Hot Five et Hot Seven. Les vingt-six titres enregistrés par son premier Hot Five entre novembre 1925 et novembre 1926 consacrent la prééminence du soliste. L’orchestre de jazz de La Nouvelle-Orléans est fondé sur le jeu collectif, un jeu d’ensemble, jeu d’unisson entre les différents instruments qui est ponctué par de courtes séquences d’improvisation collective. Dans les premiers temps du jazz, les musiciens ne jouent en solo que dans les courts breaks qui parsèment les morceaux. L’esprit libre du pionnier de ce petit-fils d’esclave, c’est le dépassement des conventions. Il invente une musique pleine de joie et de larmes, de désir et de liberté. En s’imposant comme soliste, Armstrong fait éclater l’orchestre Nouvelle-Orléans. Par sa riche personnalité, il rompt l’équilibre organique d’une musique polyphonique en ouvrant la voie à une nouvelle musique, plus personnelle.

Body and Soul

Body and Soul (1996)

Sortie : 21 mai 1996 (France).

Compilation de Coleman Hawkins

abscondita a mis 8/10.

Annotation :

Dans les années vingt, Coleman Hawkins « invente » le saxophone ténor. Il n’est pas le premier musicien de jazz à utiliser l’instrument, mais il en transforme la physionomie en profondeur et en fait le rival de la trompette qui est alors l’instrument-roi du jazz.

Le 11 octobre 1939 il enregistre une version d’anthologie de « Body And Soul ». À l’image du « West End Blues » de Louis Armstrong, du « These Foolish Things » de Lester Young et du break de « A Night In Tunisia » de Charlie Parker, elle fait partie de l’histoire. En quoi cette version, ces deux chorus d’improvisation, ont-ils fait date ? Coleman Hawkins a délaissé les sautillements d’un phrasé staccato emprunté aux clarinettistes de l’époque (chaque note est détachée) au profit d’un jeu plus fluide (le vibrato gagne en ampleur, la sonorité en épaisseur), tout en lyrisme suave qui, avec le temps, se modernisera en se patinant, s’assouplissant..

Pêche à la mouche
7.1

Pêche à la mouche (1991)

Sortie : 1991 (France).

Compilation de Django Reinhardt

abscondita a mis 7/10.

Annotation :

Django Reinhardt, manouche, est né dans la roulotte familiale en Belgique. Autodidacte, analphabète, Django explore librement la musique. À treize ans, il joue dans les bals musette. La nuit du 2 novembre 1928, sa vie bascule : il est brûlé dans l’incendie de sa roulotte. Il perd partiellement l’usage de la main gauche. Il parvient à se forger une technique instrumentale adaptée à son handicap et, au terme de plus de deux ans d’efforts intenses, il peut jouer à nouveau de la guitare et devient un célèbre virtuose.
La création du Quintette du Hot Club de France par Django Reinhardt et Stéphane Grappelli en 1934 est un moment décisif. D’une part pour le guitariste qui va connaître un énorme succès. Le Quintette du Hot Club de France, composé uniquement d’instruments à cordes, va connaître un énorme succès. Décisif aussi puisqu’il correspond à l’émancipation d’un « jazz français » puisqu’il signe l’avènement d’une musique au swing inédit, sans tambour ni trompette ; il permet la création d’une musique, un nouveau langage pour le jazz européen qui, pour la première fois, s’affranchit du modèle noir américain. Django est avec Charlie Christian le pionnier de la guitare jazz, instrument qu’il a permis de s’émanciper en lui donnant une dimension orchestrale.

Cet album se présente comme un « best of ». Sont représentées deux phases de son art : à la guitare acoustique et, peu de temps avant sa disparition en 1953, à la guitare électrique. Django a troqué sa vieille guitare acoustique pour une Selmer électroacoutique. Il s’essaye avec succès au bebop. C’est un jeu d’une grande fraîcheur, complètement imprévisible, d’un élan vital qui jaillit de la six-cordes de Django. La nostalgie, le swing, la joie, la tendresse, une exaltation immense, sa musique s’entend aujourd’hui comme l’une des plus stimulantes célébrations du swing.

Verve (1947-1953)

The Amazing Bud Powell
7.9

The Amazing Bud Powell (1951)

Sortie : 1951 (France). Bop, Jazz

Compilation de Bud Powell

abscondita a mis 8/10.

Annotation :

Cet album est réalisé au cours de deux sessions d’enregistrement, l’une en août 1949, l’autre en mai 1951. La première session réunit un quintette, Bud Powell’s Modernists, avec le trompettiste Fats Navarro, le saxophoniste ténor Sonny Rollins, le contrebassiste Tommy Potter et le batteur Roy Haynes et en trio avec Potter et Haynes. Pour la deuxième session, Bud Powell a formé un trio avec Curly Russell (contrebasse) et Max Roach (batterie) ou joue en solo.

Verbe (1949-1951)

The Fabulous Sidney Bechet
8.1

The Fabulous Sidney Bechet (2001)

Sortie : 9 janvier 2001 (France). Jazz, Dixieland

Compilation de Sidney Bechet

abscondita a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Après l’ère swing et avant, dans les années quarante, le bebop qui est la première révolution jazzistique, on assiste à un mouvement de revival (résurrection) du New Orleans, le jazz Nouvelle-Orléans des origines. Ce revival a été considéré à tort comme une réaction au jazz moderne, le bebop puisque son apparition précède de quelques années la naissance du bop. Ce New Orleans revival va connaître un grand succès en France dans les années cinquante, Sidney Bechet en étant la figure la plus emblématique et médiatique.

Le Fabulous Sidney Bechetl réunit plusieurs morceaux d’anthologie (« Shine », « All Of Me », « Avalon », « Rose Of The Rio Grande », « Sweet Georgia Brown »).

Blue Note (1951-1953)

Jam Session
8.1

Jam Session (1952)

Sortie : 1952. Bop

Album de Charlie Parker

abscondita a mis 10/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Bird and Diz
8

Bird and Diz (1952)

Sortie : 1952 (France). Bop, Jazz

Album de Charlie Parker et Dizzy Gillespie

abscondita a mis 7/10.

Annotation :

L'éruption fracassante du bebop au début des années quarante, est le grand tournant de l’histoire du jazz : en deçà, on parlera de jazz “classique”, au-delà, de jazz “moderne”. La modernité du jazz est là, surgie d’un coup, comme toujours en avant dans les moments de rupture, de jaillissement. Lassés de la rigidité des big bands, de leur musique commerciale, de sa structure swing, ils sont plusieurs musiciens, dont Charlie Parker et Dizzy Gillespie, les deux chefs de file du bebop, à se réunir en petits groupes après les concerts, « after hours », sur la 52e Rue, à Harlem, à l’Onyx ou au Minton’s Playhouse.

Verve (1952)

Gerry Mulligan Quartet
6.9

Gerry Mulligan Quartet (1952)

Sortie : 1952 (France).

Album de Gerry, Quartet Mulligan

Annotation :

Tous les lundis, le public se presse au Haig. Il n’est pas rare d’y rencontrer, aux premières tables, Marilyn Monroe et d’autres stars de Hollywood venues écouter le quartette de Gerry Mulligan. C’est précisément dans ce petit club de jazz hollywoodien situé au 638 South Kenmore Avenue que le saxophoniste baryton forme son quartette au printemps 1952. Cette scène sera onze mois durant le laboratoire idéal de l’orchestre et la meilleure salle de répétition possible avant les différents enregistrements pour le label Pacific Jazz de Richard Bock qui est assimilé au jazz dit « West Coast » ou « Cool », ici dans le sens de frais. Dès son apparition sur la scène du jazz à l’automne 1952, le quartette sans piano (Gerry Mulligan, saxophone baryton ; Chet Baker, trompette ; Bob Whitlock, contrebasse ; Chico Hamilton, batterie) connaît un grand succès.

Cette association prolifique Gerry Mulligan / Chet Baker fut éphémère (moins d’un an), elle s’interrompra en 1953. Arrêté en possession d’héroïne, Gerry Mulligan se retrouvera derrière les barreaux pour six mois. Pendant ce temps, Chet Baker entamera une carrière solitaire, très vite couronnée de succès. »

Pacific Jazz (1952-1953)

Jazz at Oberlin (Live)
8.1

Jazz at Oberlin (Live) (1953)

Sortie : 1953 (France). Bop, Jazz, Cool Jazz

Live de The Dave Brubeck Quartet

abscondita a mis 8/10.

Annotation :

La formation du quartette de Dave Brubeck a lieu dans des circonstances particulières. En 1944, en pleine bataille des Ardennes, sous les ordres du Général Patton et sous la mitraille allemande, le pianiste américain monte une formation destinée à soutenir le moral des troupes avec le saxophoniste alto Paul Desmond. Un jeu éthéré d’un grand lyrisme, un phrasé lent, très moderne, comme hors du temps et des influences, une sonorité épurée, fluide, lunaire, un swing tout en élégance, Paul Desmond est le saxophoniste « cool » par excellence. Leur collaboration ne cessera qu’à la mort de Paul Desmond, trente-trois ans plus tard. 

(1953)

Piano Reflections
8

Piano Reflections (1989)

Sortie : 20 septembre 1989 (France). Swing, Jazz, Ragtime

Album de Duke Ellington

Annotation :

Ellington incarne le jazz, son esprit. « Le jazz est liberté. Liberté de jouer toutes choses, que cela ait été ou non fait auparavant. Et la liberté est un mot qui a fondé notre pays », expliqua celui qui a contribué à donner au jazz cette légitimité culturelle que les préjugés lui refusaient. Ellington, c’est un parcours musical exceptionnel, plus d’un demi-siècle avec quasiment pas d’interruptions de l’activité de l’orchestre. Ellington, c’est une œuvre multiple, abondante (5 000 titres enregistrés), complexe, polymorphe, pensée, construite, mise en scène. Des années vingt, sa période “jungle”, aux suites des années soixante (« The Far East Suite », de 1967, l’un de ses chefs-d’œuvre), c’est tout un processus de changements dans la continuité, une sorte de work in progress au cours duquel l’écriture se peaufine, les couleurs orchestrales se déploient, les alliages sonores se complexifient.

(Capitol, 1953)

Introducing Paul Bley

Introducing Paul Bley (1954)

Sortie : 1954 (France).

Album de Paul Bley, Charles Mingus et Art Blakey

Annotation :

Son premier disque en 1953, Introducing Paul Bley, en trio avec Charles Mingus à la basse et Art Blakey à la batterie, le situait dans la mouvance bebop (il a accompagné Charlie Parker mais aussi Lester Young, Coleman Hawkins et Ben Webster). Admirateur de son compatriote Oscar Peterson (il lui a succédé dans les clubs de Montréal lorsque ce dernier s’est installé à New York), c’est vers une autre musique, une autre approche du piano qu’il se dirige à la fin des années cinquante, minimale, ouverte, en un mot free. Il a goûté à la liberté de la transgression aux côtés d’Ornette Coleman (le quartette d’Ornette est issu du quintette de Bley créé en 1958 en Californie avec Ornette Coleman, Don Cherry, Charlie Haden et Billy Higgins ; il est en ce sens l’un des initiateurs sinon l’un des pères fondateurs du free jazz). On peut d’ailleurs définir son style comme l’extension du phrasé d’Ornette sur un piano.

(Debut, 1954)

Horace Silver and the Jazz Messengers
7.6

Horace Silver and the Jazz Messengers (1955)

Sortie : 1955 (France). Jazz, Hard Bop

Album de Horace Silver et Art Blakey & The Jazz Messengers

Annotation :

Issu de l’héritage du piano jazz des années trente et quarante (Duke Ellington, Tadd Dameron, Bud Powell et Thelonious Monk ; son jeu percussif l’atteste), Horace Silver (1928-2014), ancien directeur musical des Jazz Messengers qu’il a co-fondé, est avec Art Blakey et Cannonball Adderley l’une des figures emblématiques du hard bop. C’est au cours de deux séances historiques de novembre 1954 et février 1955 qu’Horace Silver, associé à Hank Mobley (saxophone ténor), Kenny Dorham (trompette), Doug Watkins (contrebasse) et Art Blakey (batterie), jette les bases de l’esthétique hard bop qui va bientôt embraser la scène jazz. Le hard bop, avec des apports de rhythm’n’blues et de gospel, est un retour aux sources noires du jazz. Le jeu singulier, syncopé, coloré d’Horace Silver séduit. Il débute aux côtés de Stan Getz, puis joue avec Miles Davis (l’album Walkin’ pour Prestige en 1954 ; « Il mettait le feu derrière moi » se souvient Miles Davis dans son autobiographie).

(Blue Note, 1954-1955)

Sarah Vaughan
8

Sarah Vaughan (1954)

Sortie : 18 décembre 1954 (France). Jazz, Vocal

Album de Sarah Vaughan

abscondita a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Sarah Vaughan est née dans une famille aussi religieuse que musicienne. Son père, charpentier, joue de la guitare. Sa mère, blanchisseuse, chante à l’Église. C’est à la Mount Baptist Church de Newark, dans le New Jersey, où elle est née en 1924, qu’elle s’initie à l’orgue et au chant. Encouragée par son aînée Ella Fitzgerald, elle gagne un concours d’amateurs à l’Apollo Theater de Harlem en 1943. Son interprétation de « Body And Soul » lui vaut une récompense de dix dollars. Sa carrière est lancée. Elle fait bientôt partie de l’orchestre du pianiste Earl Hines, puis de celui du crooner Billy Eckstine. Sa voix-instrument épouse naturellement la musique des beboppers Charlie Parker, Dizzy Gillespie et Max Roach dont elle devient l’égérie. Premières places dans les référendums des magazines, contrat avec le label Columbia en 1949, émissions de radio et de télévision, tournées internationales en quartette, ou en grand orchestre (Ernie Wilkins, Benny Carter, Count Basie, Quincy Jones en 1958), Sarah Vaughan vole de ses propres ailes. Elle est devenue une star, sa renommée excède largement la jazzosphère.

Avec Billie Holiday et Ella Fitzgerald, Sarah Vaughan forme la triade magique du jazz vocal. Comme Ella, on l’appelle par son prénom ; Sarah, “The Divine” ou bien plus simplement “Sassy” comme elle a été surnommée. Elle a une voix exceptionnelle à la tessiture extraordinaire qui lui permet des sauts de registres étonnants. Ce qui impressionne, c’est sa grande technique vocale, instrumentale (il y a énormément de mouvement dans sa voix élastique), son assise rythmique comme son invention harmonique, mais aussi sa pratique du scat, ses improvisations pleines de fantaisie, d’humour.

Le répertoire de cet album de 1954 qui lui fera remporter un Grammy Award est varié et de haute tenue. Son art vocal y est pleinement maîtrisé, sa voix majestueuse, irrésistible, envoûtante, elle investit ses chansons et les théâtralise. Mais aussi parce qu’elle dialogue ici d’égal à égal avec le saxophone ténor de Paul Quinichette, la flûte de Herbie Mann, et surtout la trompette de Clifford Brown dans des entrelacements et autres contrechants somptueux.

https://www.youtube.com/watch?v=tTsV56J16iU&list=PLUJ7V33M1wR2sU4VQYoGOdHNuV6YOOrOU

Emarcy (1954)

Jazz Goes to College (Live)
8.1

Jazz Goes to College (Live) (1954)

Sortie : mars 1954 (France). Bop, Jazz, Cool Jazz

Live de The Dave Brubeck Quartet

Annotation :

La formation du quartette de Dave Brubeck a lieu dans des circonstances particulières. En 1944, en pleine bataille des Ardennes, sous les ordres du Général Patton et sous la mitraille allemande, le pianiste américain monte une formation destinée à soutenir le moral des troupes avec le saxophoniste alto Paul Desmond. Un jeu éthéré d’un grand lyrisme, un phrasé lent, très moderne, comme hors du temps et des influences, une sonorité épurée, fluide, lunaire, un swing tout en élégance, Paul Desmond est le saxophoniste « cool » par excellence. Leur collaboration ne cessera qu’à la mort de Paul Desmond, trente-trois ans plus tard.

(Columbia, 1954)

A Night at Birdland, Volume 1 (Live)
7.9

A Night at Birdland, Volume 1 (Live) (1956)

Sortie : juillet 1956 (France). Jazz, Hard Bop

Live de Art Blakey Quintet

abscondita a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Au milieu des années 50, le quintette de Clifford Brown et Max Roach, éphémère, rivalisa de swing et d’invention avec un autre quintette qui allait lui survivre longtemps, très longtemps : les Jazz Messengers. Après les Seventeen Messengers de 1947, le batteur Art Blakey forme un premier groupe des Jazz Messengers pour un concert à New York, au Birdland, avec Clifford Brown, Lou Donaldson, Horace Silver et Curly Russell. Et en 1955, Horace Silver reprend le nom pour un quintette avec Kenny Dorham, Hank Mobley, Doug Watkins et Art Blakey à qui il demande d’être le leader. Voici donc comment sont nés les Jazz Messengers, quintette puis sextette, l’un de plus importants groupes de l’histoire du jazz. En 1956, Horace Silver quitte le groupe. Pendant plus de trente ans, Art Blakey et ses Jazz Messengers vont propager la bonne parole du jazz. Il y aura plusieurs moutures des Jazz Messengers, celle exceptionnelle d’énergie et de créativité des pionniers des années cinquante, celle des années soixante (période Wayne Shorter) qui tranche avec celle des académismes et autres conservatismes des écoliers surdoués des années quatre-vingt.

Au milieu des années 50 règne le bebop. Un nouveau courant du jazz moderne émerge : le hard bop. Le jazz est devenu trop sophistiqué aux yeux, en l’occurrence aux oreilles de plusieurs musiciens, et parfois trop européen. Ils ambitionnent de rendre le jazz au peuple noir dont il est largement issu. Il s’agit de simplifier le langage bop, celui de Charlie Parker, le rendre plus efficace, l’alléger harmoniquement, mais le durcir rythmiquement. Et d’insuffler l’esprit du gospel.

Cet album fait figure de manifeste du hard bop. Il a été enregistré live au club de jazz new-yorkais le Birdland, en février 1954. Art Blakey, le maître des peaux, est le patron : « Le batteur, dans un orchestre, c’est le vrai patron, explique-t-il. C’est lui qui découpe, qui détermine la dynamique et le climat approprié pour propulser le soliste là où il veut en venir. » Ici plus que jamais la batterie s’émancipe de son simple rôle de marqueur de temps et devient instrument soliste à part entière. Les tambours de Blakey créent la dynamique d’ensemble et donnent l’impulsion aux solistes.

https://www.youtube.com/watch?v=3z8orufd51U&list=OLAK5uy_nNeYe7TokWBpou7-rp35GEt07mC-WFGOE&index=1

Blue Note (1954)

Concert by the Sea (Live)
8.1

Concert by the Sea (Live) (1955)

Sortie : 1956 (France). Bop, Jazz, Cool Jazz

Live de Erroll Garner

abscondita a mis 8/10.

Annotation :

C’est à Will Thornbury, simple amateur de jazz, qui a immortalisé ce concert le 19 septembre 1955 en Californie, que l’on doit l’existence de ce disque qui est la référence du pianiste Erroll Garner. Malgré l’acoustique pauvre de l’église de Carmel transformée en base militaire où a été enregistré cet album au son peu satisfaisant (les trois instruments ne se trouvent pas au même niveau sonore), un piano au premier plan complètement désaccordé, cet album est exceptionnel. On y entend la gourmandise, la virtuosité malicieuse, le bonheur de musique de ce petit géant du piano (il jouait souvent sur un gros bottin afin de pallier sa petite taille) qu’est Erroll Garner. Il ne sait pas lire la musique, il joue d’instinct, « à la feuille ». Une totale indépendance des mains garante d’une richesse rythmique incomparable, un goût prononcé pour les citations, mais aussi une prédilection pour les mélodies jouées en octaves, il impressionne par sa virtuosité, la multiplicité de sa force pianistique sur le plan rythmique et harmonique et par le plaisir suprême de faire sonner l’instrument. Son slogan ne fut-il pas « the most happy piano » ? Le musicien, sous ses airs d’entertainer, son large sourire malicieux, son costume noir impeccable et ses trois couches de gomina, est un musicien habité.

Originaire de Pittsburgh où il est né en 1921, Erroll Louis Garner, musicien précoce, prend l’habitude de sauter de son lit très tôt le matin pour escalader le tabouret du piano et réveiller les voisins en jouant les morceaux découverts la veille grâce aux disques de ses parents. Autodidacte, il aborde le piano par les formes préhistoriques du piano jazz que sont le stride et le boogie-woogie. Son influence principale a pour nom Fats Waller. Installé à New York en 1944, au moment où la révolution bebop bat son plein, il prend la succession du pianiste Art Tatum dans un trio, formule orchestrale qui aura toujours sa préférence.

Voici donc Erroll Garner en trio, avec Eddie Calhoum à la contrebasse et Denzil Best à la batterie revisitant avec une calme énergie des standards du jazz. Aux côtés du pianiste, la rythmique de luxe lui fournit une assise, force, souplesse et rebond à la virtuosité digitale de Garner, et accentue le swing infaillible du trio.

https://www.youtube.com/watch?v=TR4LvZM3K68&list=PL7gp579CMkT9EF5FVcpBqIsoXsTFgL9EA&index=1

Columbia (1955)

+4
8.3

+4 (1956)

Sortie : 12 octobre 1956 (France). Bop, Jazz, Hard Bop

Album de Max Roach

Annotation :

Il faut écouter Max Roach aux côtés de Charlie Parker avec qui il a participé à la révolution bebop au milieu des années quarante, de Clifford Brown avec qui, en 1954, il a créé la forme achevée du quintette, groupe-phare de hard-bop, mais aussi avec Miles Davis, Sonny Rollins, Thelonious Monk, et à la tête de M’Boum, le Percussion Ensemble qui réunit cinq batteurs autour de lui, mais aussi en duo, avec Cecil Taylor, Archie Shepp, Anthony Braxton, Dizzy Gillespie et Clark Terry. Max Roach nous a fait oublier la batterie au profit de la musique. Le maître de la grosse caisse est un libérateur de formes. Phrases, silences, timbres, couleurs, ombres et lumières, il joue de tout ça. Grâce à lui, la batterie est devenue instrument soliste à part entière.

(EmArcy, 1956)

The Ahmad Jamal Trio

The Ahmad Jamal Trio (1956)

Sortie : 1956 (France).

Album de The Ahmad Jamal Trio

Annotation :

Ahmad Jamal, Frederick Russel Jones selon l’état civil (à l’image de plusieurs musiciens de jazz tels qu’Art Blakey devenu Abdullah Ibn Buhaina, William Emanuel Huddleston, Yusef Lateef ou bien Adolph Johannes Brand devenu Abdullah Ibrahim, il s’est converti à l’islam), a mérité ses surnoms : “L’architecte”, “Le prophète”, “Ahmad le magnifique”, “Le prestidigitateur du piano”, “Le maître”, “Le monstre aux deux mains droites”. Le natif de Pittsburgh fonde son premier trio au début des années cinquante, les Three Strings (un piano, une contrebasse et une guitare). John Hammond, producteur de Count Basie, George Benson, Ray Bryant et Billie Holiday puis Bob Dylan, Aretha Franklin, Leonard Cohen et Bruce Springsteen, enregistre le trio pour les labels Okeh et Epic.

(pic, 1956)

Lady Sings the Blues
8.3

Lady Sings the Blues (1956)

Sortie : 1956 (France). Jazz, Swing, Blues

Album de Billie Holiday

abscondita a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Billie Holiday ne chante pas comme les autres chanteuses. Si elle séduit surtout par sa sensualité et sa spontanéité, c’est son expressivité qui marque, forte, intense. Le chant est lié aux passions fondamentales. La vie et la musique sont intimement mêlées chez elle. Sa musique, sa voix, c’est aussi une longue et douloureuse poétique de l’expérience humaine : la misère, le viol, la prostitution, la prison, l’alcool, la drogue, la violence, le racisme. Billie Holiday, ombres et lumières : la force de musique et la descente aux enfers, la beauté de la femme aux gardénias et l’autodestruction, la déchéance due à l’alcool et la drogue, la fierté d’être une femme noire et la ségrégation raciale, la pauvreté et la richesse spoliée. S’entrechoquent des images fortes, paradoxales : grâce et déchéance, puissances de vie, rires et larmes entremêlées. La musique sera pour elle expression, sublimation, exercice de liberté, mais aussi transgression. Personne n’aura chanté avec autant d’engagement, de force musicienne les bluettes les plus mièvres comme les chansons d’amour les plus passionnées qu’elle fait siennes et transfigure. Lady Day, comme l’a surnommée son ami Lester Young, chante des bluettes, des blues qui disent les bleues à l’âme, la difficulté d’être, mais aussi les mouvements, les élans du cœur, la force de l’amour. « Il paraît que personne ne chante comme moi le mot faim ou le mot amour. C’est sans doute parce que je sais ce que recouvrent ces mots ». Cet album se présente comme la quintessence de son art. Aux standards sur lesquels elle appose sa griffe succèdent trois chansons trempées dans l’encre autobiographique, « Lady Sings The Blues », « God Bless The Child », et « Strange Fruit ». Ici, plus que jamais, dans sa simplicité touchée par la grâce, son âpreté, la voix de Billie, tour à tour caresse et griffure, miel et gravier, est une voix instrument. « J’ai plutôt l’impression que je joue d’un instrument à vent, dit-elle. J’essaie d’improviser comme Lester Young. » Cette voix bouleversante, c’est le chant total, chaque mot prétexte au son, chaque son prétexte à la musique, comme si l’espace et le temps lui appartenaient, transfigurant la souffrance avec une dignité et une élégance dont seul le bleu de son âme laissait transparaître, entre deux mélodies chuchotées, deux caresses miaulées, la dimension de sa dramaturgie.

https://www.youtube.com/watch?v=KCYCad_Y53U&list=PLL-NbN8uTOijOnUzOLDp8hiwSH9xTR8ex

Verve (1955-1956)

Plays Count Basie

Plays Count Basie (1993)

Sortie : 1993 (France).

Album de Oscar Peterson

Annotation :

Swing is my business, telle fut la profession de foi du “Kid from Read Bank”. Les fondations des grands orchestres swing ont été posées dans les années 20/30 par Jimmie Lunceford, Fletcher Henderson et Benny Moten. William “Count”  Basie est le pianiste de l’orchestre de ce dernier à partir de 1929 ; en 1935, à la mort de Moten, il réunit quelques anciens du big band et d’autres et forme son propre orchestre qui possède la meilleure section rythmique du moment : Count Basie, piano ; Freddie Green, guitare ; Walter Page, contrebasse ; Jo Jones, batterie. Sur cette base, Duke Ellington a créé l’esthétique du grand orchestre de jazz à l’écriture précise. Count Basie s’inscrit dans cette filiation, son big band représente, avec celui d’Ellington, la quintessence du jazz classique dont il a porté la bonne parole pendant cinquante ans dans le monde entier. Le Count Basie Orchestra a abordé tous les registres et aura été un tremplin pour de nombreux musiciens majeurs, Lester Young, Herschel Evans, Buck Clayton et Harry “Sweets” Edison. Puissance des riffs incandescents, bras de fer complices des solistes, respiration vitale d’une section rythmique à la fois légère et dense, l’orchestre de Count Basie cultive deux vertus cardinales : l’esprit du blues et l’élan du swing.

(Verve, 1956)

Indeed!
7.5

Indeed! (1956)

Sortie : 1956 (France). Jazz, Hard Bop

Album de Lee Morgan

Annotation :

De 1956 à 1958, Lee Morgan a été l’un des membres du grand orchestre de Dizzy Gillespie (son influence principale avec celle de Clifford Brown), puis lorsque l’orchestre a été démantelé, il a rejoint le batteur Art Blakey au sein des Jazz Messengers. Il a fait aussi partie des groupes des saxophonistes Hank Mobley et Benny Golson et a participé au disque Blue Train de John Coltrane.

Memorial Album
8.3

Memorial Album (1956)

Sortie : 1956 (France). Bop, Jazz, Hard Bop

Compilation de Clifford Brown

abscondita a mis 7/10.

Annotation :

Cet album, le premier de Clifford Brown sous son nom, réunit deux sessions d’enregistrements réalisés en juin et août 1953 avec deux orchestres différents : un quintette (Lou Donaldson, saxophone alto ; Elmo Hope, piano ; Percy Heath, basse ; Philly Joe Jones, batterie), et un sextette (Gigy Gryce, saxophone alto et flûte ; Charlie Rouse, saxophone ténor ; Percy Heath, basse, Art Blakey, batterie).

The Swingin’ Miss “D”
8.2

The Swingin’ Miss “D” (1957)

Sortie : 1957 (France). Jazz, Swing

Album de Dinah Washington et Quincy and His Orchestra Jones

abscondita a mis 8/10.

Annotation :

Ruth Lee Jones, connue sous le nom de Dinah Washington, est originaire de l’Alabama, la terre d’élection du Ku Klux Klan, là où le racisme ordinaire attend tout Noir à chaque carrefour. C’est une voix puissante issue de l’Église baptiste, du gospel. Elle doit sa formation musicale de base à la chorale de la St Luke Baptist Church de Chicago où sa mère tenait le piano. Elle a un parcours musical fulgurant et une vie pour le moins tumultueuse (elle s’est mariée pas moins de onze fois, dont deux fois avec le même homme). Conscience politique aiguë, elle interdit en 1960 que ses disques soient vendus dans les États ségrégationnistes, et elle soutient financièrement Martin Luther King. Personnalité fantasque (champagne à profusion, abus de drogues), diva à la vie privée riche en péripéties, elle est morte en 1963 à l’âge de trente-neuf ans. Elle fut associée, entre autres, à Fats Waller, à Lionel Hampton qui l’engagea dans son orchestre en 1943, mais aussi à Clifford Brown, Quincy Jones et Max Roach. Dans les années 50, Mercury lui confia le rôle de resident cover girl : elle est chargée de « couvrir » les succès pop enregistrés par des Blancs. Le titre « What A Difference A Day Made », enregistré le 19 février 1959, est l’un des hits de l’année qui lui fait remporter un Grammy Award.

Elle investit le texte, le transfigure, et fait de chanson insigniiante un objet sonore bouleversant. Elle expliquait qu’elle devait précisément entrer dans ses chansons : « Quand on pénètre une chanson, l’âme qui est en vous doit sortir. Il faut que vous soyez capable de vous mettre en retrait et de laisser cette âme se révéler pleinement. Elle doit couler hors de vous. »

Quand elle signe cet album, elle est au sommet de sa gloire. Il y a de la grâce dans ce chant puissant. Au fil des ans, elle a conservé ses qualités de souplesse, de tenue et, surtout, de charme. Rappelant, car elle en était l’incarnation duelle, que la racine latine du mot carmen signifie tout autant charme que chant. Le répertoire de ce disque est constitué desstandards inoxydables. Les arrangements, subtils, sont signés Quincy Jones, à peine vingt-trois ans, qui se trouve à la tête d’un orchestre rutilant, machine à swing extraordinaire aux solistes non moins exceptionnels (Clark Terry, Lucky Thompson).

https://www.youtube.com/watch?v=7XhQuF1Wvp0&list=PLBJenJIJrq0wyPAYizDj8MJtDSj6DCKui&index=1

Verve (1956)

Kenny Clarke’s Sextet Plays André Hodeir

Kenny Clarke’s Sextet Plays André Hodeir (1957)

Sortie : 1957 (France). Jazz, Hard Bop

Album de Kenny's Sextet Clarke

abscondita a mis 8/10.

Annotation :

Kenny Clarke est l’inventeur de la batterie bebop. Il est, au début des années quarante, l’artisan de cette petite révolution de l’instrument : d’un rôle de métronome ou de « gardien du tempo », le batteur est devenu un instrumentiste à part entière qui dialogue en toute liberté avec le soliste, le saxophoniste, le trompettiste ou le pianiste. « La batterie est semblable à l’ancre qui maintient vers le bas un magnifique voilier qui danse sur les vagues » (Kenny Clarke). L’année 1941 est déterminante pour Kenny Clarke, que l’on surnomme “Klook” : après avoir joué avec Sidney Bechet, Louis Armstrong et Billie Holiday, il enregistre avec le grand orchestre de Count Basie et surtout joue au Minton’s Playhouse, là où, chaque soir, plutôt chaque nuit, after hours, après les concerts « officiels », ont lieu les jam-sessions historiques qui réunissent Charlie Parker, Dizzy Gillespie, Thelonious Monk, Joe Guy, Nick Fenton, Don Byas et Charlie Christian. Il officie beaucoup avec Dizzy Gillespie, notamment à Paris, Salle Pleyel, en février 1948, avec son grand orchestre ; c’est la première présence du bebop en France qui fait sensation. Kenny Clarke se produit avec Milt Jackson, Cannonball Adderley, Hank Jones, Horace Silver, Jay Jay Johnson et Lee Konitz. C’est l’un des batteurs préférés de Miles Davis (la version légendaire de « The Man I Love » du 24 décembre 1954, c’est avec lui aux balais).

En 1956, Kenny Clarke vient de s’installer à Paris qui reconnaît les musiciens noirs américains comme des artistes à part entière. Il joue dans le grand orchestre de Jacques Hélian, et accompagne de nombreux Français. Avec le livre Hommes et problèmes du jazz publié en 1954, André Hodeir, violoniste, compositeur, rédacteur en chef de Jazz Hot de 1947 à 1951, fonde la critique de jazz ; il applique au jazz les modes d’analyse de la musicologie occidentale. C’est surtout l’arrangeur Hodeir qui est à l’honneur. L’œuvre se présente sous la forme d’un mini concerto pour sextette, qu’Hodeir a élaboré ; équilibre fragile entre voix soliste et masse orchestrale dont fait intégralement partie la section rythmique. Déjà, Hodeir questionne le rapport entre écrit et improvisé et met en avant son concept d’improvisation écrite.

https://www.youtube.com/watch?v=9pTB46WLnOM&list=OLAK5uy_m7dDLZBQ_kakOjBxEBjxuVPFBjvKB712A&index=2

Philips (1956)

Saxophone Colossus
8.2

Saxophone Colossus (1956)

Sortie : 1956 (France). Bop, Jazz

Album de Sonny Rollins

abscondita a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Le parcours musical de Theodore Walter dit “Sonny” Rollins est exceptionnel (Bud Powell, Art Blakey, Coleman Hawkins, Thelonious Monk, Max Roach, Miles Davis, John Coltrane, les Rolling Stones, Pat Metheny). Jeune musicien, il est certainement moderne dans les années cinquante dans sa façon d’adapter l’héritage de Coleman Hawkins, ainsi que le langage parkérien au saxophone ténor. Son extraordinaire liberté de ton, la fluidité de son discours, sa puissance, son lyrisme incandescent, ses improvisations abyssales et son incroyable assurance rythmique le montrent comme un des musiciens phare de l’histoire du jazz. « Le jazz est une force sociale du bien » explique ce musicien en quête.

Tour à tour méditative, exaltée, et toujours d’une splendide énergie, la musique de Rollins est vertigineuse de liberté, de fraîcheur, de brillant. Un jeu très rythmique, une phrase totalement élastique, des cellules rythmiques quasi obsessionnelles, c’est un monde sonore en extension, un monde complet de timbres, de rythmes, d’harmonies qui tourne autour de son propre centre. Rollins en est la force centrifuge. Il y a comme un bonheur puissant, intangible qui coule dans le flot rollinsien.

Cet album Saxophone Colossus qui lui a valu son surnom de “Colosse du saxophone”, avec ce surprenant « Blue Seven » dont la partie improvisée intrigue plus d’un musicologue, a été enregistré non loin de New York, dans le studio de Rudy Van Gelder à Hackensack, dans le New Jersey. Tommy Flanagan est au piano, Doug Watkins à la contrebasse et Max Roach à la batterie, soit une rythmique superlative. L’album s’ouvre avec le thème emblématique de Rollins qui est devenu un standard du jazz, « Saint Thomas », un morceau inspiré par un calypso (il tient son nom de Saint Thomas situé dans les Îles Vierges). Ce thème est inspiré d’une chanson traditionnelle pour enfants que lui chantait sa mère lorsqu’il était jeune. Le chorus est un modèle de construction ; c’est l’un des solos culte de l’un de ses fils spirituels, Joshua Redman.

https://www.youtube.com/watch?v=fdakJqKPRDE&list=OLAK5uy_n9x404RhDDucjsK-L7Z01mcips84rB9Qg&index=1

Prestige (1956)

Chet Baker Sings
8.2

Chet Baker Sings (1954)

Sortie : 1954 (France). Vocal, Cool Jazz

Album de Chet Baker

Annotation :

Jeune homme à la trompette, musicien de la délicatesse et de la fragilité que l’on a surnommé le “James Dean du jazz”, Chet Baker fait partie de la légende du jazz aux côtés de Louis Armstrong, Billie Holiday, Charlie Parker et Miles Davis, mais aussi d’une mythologie qui s’encombre de ses oripeaux et autres clichés : l’alcool, la drogue, les femmes…

La famille de Chesney Henry Baker s’installe en Californie en 1939. Chet échange le trombone offert par son père contre une trompette. Il se passionne pour le trompettiste blanc Harry James, puis par Lester Young. Pendant son service militaire en Allemagne, il découvre les disques de Dizzy Gillespie et de Charlie Parker avec qui il jouera en 1952. Dans les semaines qui suivirent, celui-ci aurait fait passer à Miles et à Dizzy Gillespie le message suivant : « Faites gaffe, les mecs, y a en Californie un jeune blanc-bec qui s’apprête à vous en faire voir de toutes les couleurs. » Au printemps 1952, il intègre le quartette sans piano de Gerry Mulligan, avant de voler de ses propres ailes. En 1961, pour détention et usage de drogue, il est condamné à seize mois de prison en Italie, à Lucca. De retour sur la scène musicale, il multiplie les rencontres et les enregistrements (avec les frères Brecker, Michel Graillier, Enrico Pieranunzi, Archie Shepp, Paul Bley : le très bel album Diane de 1985). Chet Baker est mort en 1988, un vendredi 13 à Amsterdam à la suite d’une chute de la fenêtre de sa chambre d’hôtel.

(Pacific, 1956)

Django
7.7

Django (1956)

Sortie : 1956 (France). Jazz, Cool Jazz, Post Bop

Album de The Modern Jazz Quartet

abscondita a mis 7/10.

Annotation :

Les quatre musiciens sont droits comme des I, imperturbables dans leur smoking. Voilà des musiciens de jazz habillés comme des milords. « Une simple question de dignité » (John Lewis). Au milieu des années cinquante, le jazz se cherche une légitimité culturelle voire une respectabilité. Pourquoi les musiciens noirs américains ne porteraient-ils pas des costumes bien coupés ou des smokings et ne joueraient-ils pas dans des grandes salles de concert plutôt que dans des bouges ou des clubs de jazz enfumés pour des auditeurs étourdis et un salaire de misère ?

Le projet du pianiste John Lewis, tête pensante et chercheuse du Modern Jazz Quartet, c’est la perfection de la forme. Et, pour ce faire, ils s’associeront à des quators à cordes (Third Stream Music, 1959) ou bien à des ensembles symphoniques (Concertino For Jazz Quartet And Orchestra, 1960) et participeront au Third Stream, le Troisième courant, tentative de synthèse du jazz et de la musique classique européenne (ses activistes principaux seront John Lewis et le corniste, compositeur, chef d’orchestre et musicologue Gunther Schuller). Le MJQ (Milt Jackson Quartet devenu Modern Jazz Quartet), que l’on présente souvent comme le meilleur petit orchestre de blues des temps modernes, c’est une longévité exceptionnelle, grosso modo la moitié de l’histoire du jazz. Un pacte secret a dû être conclu entre les quatre musiciens pour que le groupe préexiste aux individus. De sa création en 1952 à sa dissolution définitive en 1985, du hard bop le plus énergique au free le plus éclaté, rien n’altérera l’esthétique du MJQ qui n’a jamais été moderne, mais, d’emblée classique. Cet album Django est précisément un classique, il comprend des thèmes intemporels signés John Lewis ainsi que des standards qui, passés au tamis MJQ, se transforment en petits joyaux mélodiques.

À une époque où le jazz connaissait les éruptions volcaniques et autres tumultes du free jazz, ses belles mélodies séduisantes, la musique du Modern Jazz Quartet apparut bien lisse et policée ; du jazz gominé en costume trois-pièces. Pour autant, ce groupe, structure fonctionnelle et organique à l’architecture infaillible, créa une musique totalement originale où le swing s’impose avec force comme référent privilégié et indiscutable.

https://www.youtube.com/watch?v=Ly5SC6USVjc&list=OLAK5uy_k_nAtCT0HfAR03AL5hymaVCGZr39G0K9c&index=2

Prestige (1956)

Pres and Teddy
8.2

Pres and Teddy (1957)

Sortie : 1957 (France). Jazz, Swing

Compilation de Lester & Wilson, Teddy, Quartet, The Young

abscondita a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

« J’aurais donné tout Bach pour huit accords de Lester ! » (Chester Himes). Soliste d’envergure aux côtés de Buck Clayton Harry Edison et Billie Holiday (qui le surnomma “Prez”) au sein du premier grand orchestre de Count Basie, Lester Young, le “Président”, est le maillon manquant entre l’ère swing et le bebop (le jeune Charlie Parker récitait par cœur les solos du maître Lester Young au cours de sa jeunesse à Kansas City).

Dès son premier solo enregistré en 1936, il affirme un style original. C’est un son de saxophone ténor reconnaissable entre tous, au timbre feutré, moelleux, un son floconneux, sans vibrato. « Je ne m’intéresse qu’à ce qui est doux. Je ne supporte plus les trompettes et les trombones. Donnez-moi trois petits rythmes, un piano, une basse, une batterie, et c’est le bonheur. »

Le piano c’est celui de Teddy Wilson, pianiste swing par excellence. Il est le continuateur de Jelly Roll Morton qu’il rappelle dans le blues, des pianistes stride mais aussi d’Earl Hines auquel il doit le caractère percussif et la fluidité du phrasé. Accompagnateur inspiré de Billie Holiday, cheville ouvrière des petites formations de Benny Goodman, Teddy Wilson a eu une influence décisive sur Bud Powell, Ray Bryant et Hank Jones.

Le 13 janvier 1956, la veille de la session de ce disque Pres And Teddy, Lester Young à la tête du même orchestre, augmenté de trois amis musiciens de l’orchestre de Basie (le trompettiste Roy Eldridge, le tromboniste Vic Dickenson, le guitariste Freddie Green) grava cet autre disque de référence du jazz classique qu’est The Jazz Giants ’56. Cet album Pres And Teddy est souvent présenté comme l’une des plus grandes réussites du label Verve de Norman Granz qui a été son impresario, l’a souvent engagé pour les tournées du JATP (Jazz At The Philharmonic). La section rythmique (la basse de Gene Ramey, basse-pivot solide, la batterie, essentielle, ductile, de Jo Jones) offre une parfaite assise, une respiration régulière, souple et continue. Sur ce tapis déployé sous lui, Lester Young pose délicatement ses idées, ses volutes brumeuses, son chant ample.

Le répertoire est constitué de six standards inusables, autant de chansons d’amour qui épousent les circonvolutions du phrasé de Lester Young qui a transformé son ténor en corne de brume, en voix humaine douce et profonde.

https://www.youtube.com/watch?v=zhO8jOUrFYM&list=OLAK5uy_mDMoxHZNYR3n--jXr8TpKI79S24G2LpJ0&index=2

Verve (1956)

Workin' With the Miles Davis Quintet
8.1

Workin' With the Miles Davis Quintet (1959)

Sortie : 1959 (France). Jazz, Hard Bop, Modal

Album de The Miles Davis Quintet

abscondita a mis 8/10.

Annotation :

Prestige (1956)

Mal/2
7.5

Mal/2 (1957)

Sortie : 1957 (France). Jazz, Hard Bop

Album de Mal Waldron, Jackie McLean, John Coltrane, Idrees Sulieman, Sahib Shihab et Bill Hardman

Annotation :

Avec Phil Woods et Cannonball Adderley, John Lenwood dit “Jackie” McLean (1931-2006) est l’un des fils spirituels de Charlie Parker les plus inspirés. « Je n’ai jamais vraiment sonné comme Bird, c’était pourtant ma mission. Je me moque de savoir si on dit que je l’ai copié, j’aime tellement sa façon de jouer. Mingus a vraiment été le premier à m’encourager avoir mon propre son. Ça, je le dois à Mingus. » Plusieurs fois, Charlie Parker lui demanda de le « remplacer » pour certains concerts. D’où la réputation d’« imitateur ». Force est de constater que (très) peu de musiciens de cette génération n’ont échappé à l’influence de Bird, du parkérisme. Au début des années cinquante, McLean fait partie de la bande de Sugar Hill, une petite communauté de jeunes musiciens où se croisent Sonny Rollins, Kenny Drew, Art Taylor, Walter Bishop et Miles Davis. En 1951, il a tout juste dix-neuf ans, Jackie McLean participe à sa première séance d’enregistrement avec l’ami de Charlie Parker, Miles Davis (l’album Dig). Puis il joue avec Thelonious Monk, Paul Bley, Charles Mingus (1955-1956 ; pour l’album Pithecanthropus Erectus, le contrebassiste compose « Profile Of Jackie » en l’honneur du soliste). McLean fait partie des Jazz Messengers (1956-1957), et signe un premier album sous son nom, Swing, Swang, Swingin en 1959. La même année, lui-même drogué, il participe à la création de The Connection de Jack Gelber par Judith Malina du Living Theatre, une pièce met en scène un groupe de musiciens attendant le dealer. Après le post-bop et le hard bop, le saxophoniste épouse le nouveau son de l’époque, celui de la liberté en marche qu’incarne le free jazz. C’est une révolution musicale pacifique et politique. Il soutient les Black Panthers et s’engage dans différents programmes éducatifs. À partir de 1968, il enseignera le jazz et l’histoire de la musique afro-américaine à l’Université de Hartford, dans le Connecticut.

(Prestige, 1957)

abscondita

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