Les turbo BD 2023
104 BD
créée il y a 2 mois · modifiée il y a 2 moisL'Enfant et le Maudit, tome 1 (2016)
Totsukuni no Shoujo - Siúil a Rún
Sortie : 9 mars 2017 (France).
Manga de Nagabe
Annotation :
Le dessin est doux. Ça me fait pas mal penser à Calvin et Hobbes, notamment le visage de la gamine. Même les scènes violentes (le maudit qui se prend des flèches) restent imprégnées d'une certaine tranquillité. Le noir et blanc, quasi inévitable dans un manga, et ici traité comme tel, un peu à gros sabots mais finalement plutôt bien. Certaines planches valent vraiment le coup. Bref, c'est super agréable à l'œil.
Très vite on a l'impression que le manga, en axant sur le côté contemplatif mais aussi en rejouant encore et encore certaines saynètes comme dans une BDs à strips (notamment avec le professeur incapable d'être 100% honnête avec la gamine, ou le retour sans cesse repoussé de la tante) cherche à se placer hors du temps, du moins dans ce tome introductif. On se doute bien que la machine du scénario va rattraper tout ça.
Bonne idée aussi les soldats qui ont tous la même gueule, quoique déjà faite.
L'Enfant et le Maudit, tome 2 (2016)
Totsukuni no Shoujo - Siúil a Rún
Sortie : 24 mai 2017 (France).
Manga de Nagabe
Annotation :
La suite, toujours aussi bonne. Super trouvaille le mec tout noir avec une tête de cerf, pareil pour les chiens maudits. Encore une fois, le manga insiste sur le visuel, parfois peut-être de manière un peu vite fait, mais toujours avec classe et, mine de rien, inventivité (la tête flottante du mec-cerf maudit avec son drap blanc, la "maman" des maudits qui chantent au fond d'une grotte sous-marine).
Petite crainte néanmoins avec la mise en place du scénario et le délire des âmes, pas super convaincant et un peu mystique éco+. En espérant que ça se cantonne à cet axe de l'histoire, sans trop déborder.
Le scénario se lance à la fin, comme prévu, est plutôt sous de bons auspices.
L'Enfant et le Maudit, tome 3 (2017)
Totsukuni no Shoujo - Siúil a Rún
Sortie : 26 octobre 2017 (France).
Manga de Nagabe
Annotation :
Un tome beaucoup plus dans l'action que les précédents, du coup moins de pleines pages contemplatives (mais toujours un peu quand même). J'ai l'impression que Nagabe gère un peu moins bien le rythme imposé par une narration d'aventure (presque trois pages pour que le prof se vautre lors de la scène de la poursuite, au début). Mais bon, faut pas faire les compliqués. L'essence du manga, un conte dont on ne saisit pas les enjeux et encore moins les causes des événements qu'il contient, reste über sous contrôle.
Gros + pour l'esthétique de "tata" dans la seconde partie de la BD.
L'Enfant et le Maudit, tome 4 (2017)
Totsukuni no Shoujo - Siúil a Rún
Sortie : 15 mars 2018 (France).
Manga de Nagabe
Annotation :
Après la parenthèse action-aventure de tome 3, on revient au quotidien mélancolo-banalo-fantastique des personnages. C'est clairement là, je trouve, où le manga est le plus à l'aise. Les péripéties ne sortent pas d'un périmètre quotidien (la tante qui fait la gueule au prof) et le merveilleux, bien qu'évident, ne produit finalement pas d'énormes contorsions à l'histoire (sauf à la fin ouillouillouille). Le côté mièvre de la BD, bien présent, participe lui aussi à cette esthétique et contribue à maintenir l'histoire dans un temps suspendu.
L'Enfant et le Maudit, tome 5 (2018)
Totsukuni no Shoujo - Siúil a Rún
Sortie : 11 octobre 2018 (France).
Manga de Nagabe
Annotation :
Cette fois-ci, le scénario démarre vraiment et pas qu'un peu, avec mort suspecte et mystique, bastons, antagonistes, gros monstres, tensions entre les héros et voyage qui va sans doute se révéler initiatique. Le coté contemplatif ne disparaît pas mais semble progressivement passer au second plan, même s'il y a toujours d'assez belles pages (la dispute des deux côtés de la porte).
L'Origine - Julius Corentin Acquefacques, tome 1 (1990)
Sortie : juin 1990 (France).
BD franco-belge de Marc-Antoine Mathieu
Annotation :
La first aventure de Julius Corentin Acquefacques, c'est surtout un gros délire méta, où la forme a directement des conséquences sur le fond. Méta-BD, tout d'abord, avec le coup de la mise en abime (des pages de BD dans la BD) ou encore de l'anti-case, marche à fond dans ce sens. Là-dessus, on pourrait rapprocher L'Origine de la série des Imbattables, surfant sur des idées similaires. Méta-humour également, où des personnages aux gueules de déterrés ou de fonctionnaires de bureaux travaillent au ministère de l'humour. Cet humour repose sur une espèce de sur-scientificité, où tout est rationnalisé, même le quotidien, même l'absurde.
Toutes ces opérations donnent de suprêmes trouvailles : le voisin aux jeux de mots ("un jour, vous rirez, voisin !"), les embouteillages, les lois et la science de l'humour, les jumeaux à la tête de cube, et la fin, qui est une vraie et pure fin.
La Qu... - Julius Corentin Acquefacques, tome 2 (1991)
Sortie : octobre 1991 (France).
BD franco-belge de Marc-Antoine Mathieu
Annotation :
La suite, qui se montre plus "classiquement" absurde dans son approche de l'humour (celui-ci restant, néanmoins, le cœur du sujet), même si on retrouve quelques éléments méta-BD (surtout à la fin, avec la fameuse qu..., mais aussi disséminés ici où là à travers le tome, notamment avec la perspective lors de l'épisode de la route vers la gare.) Puisque la série des Imbattable avait été évoquée au-dessus et que l'intertextualité, c'est bien et ça fait malin ++, on rapprochera La qu... des BD du Hughes Micol, notamment de sa trilogie Romanji - Séquelles -Tumultes où on assiste au même turbo-déversage malin d'absurde.
Un homme est mort (2006)
Sortie : octobre 2006 (France).
BD franco-belge de Christophe Goret (Kris) et Étienne Davodeau
Annotation :
A mon sens, le gros move de cette BD, c'est de se constituer en document tertiaire = il s'agit en effet d'un BD sur la réalisation d'un documentaire en 1950 traitant d'un événement, à savoir la répression d'une manifestation à Brest, pendant la grande grève des ouvriers chargés de reconstruire la ville, qui avait abouti à la mort d'un gréviste, abattu par des CRS. Or, poumpatatra, ce documentaire, qui tournait en plein air sur les chantiers, n'a pas survécu à l'épreuve du temps. La BD se prête à restituer et la réalisation du documentaire et le contexte qu'il couvrait. Ça fonctionne bien, dans la mesure où ça éclaire tout un tas d'éléments de la période et de personnalités plus ou moins oubliés : René Vautier, le réalisateur à l'origine du documentaire, la grève en question, le poème de Eluard, le mode de vie ouvrier de l'époque, les problèmes techniques (comment tourner et diffuser un documentaire en 1950 quand on est en plus en mauvais termes avec les autorités), la tension PCF – RPF...
Volt évier Z82 (2021)
Volt évier Z82
Sortie : 19 novembre 2021.
BD franco-belge de EMG
Annotation :
Indispensable à la survie de l'humanité.
A part ça, deuxième approche de la futuro-œuvre d'EMG. Si le thème est finalement pas des plus original (accepte ta décrépitude, toi qui n'es que poussière), son traitement reste des plus inattendu pour un format BD : pleine page, bulles en 3D, graphismes informatiques, personnages abstraits sous tous les angles… La trame elle-même se concentre sur son objet plutôt que sur une narration complexe, et on saute ainsi d'une scène à l'autre sans transition. Le final, pas con, mélange une espèce de désespoir cynique et de béatitude à travers des cases presque sans texte.
A mon sens bien plus convaincant que La vague gelée, y compris dans sa volonté d'allier art de la BD et art du PC.
Spirale : Intégrale (2021)
Uzumaki
Sortie : 17 mars 2021 (France).
Manga de Junji Itō
Annotation :
Bon gros manga d'horreur qui tâche, à l'origine publié en trois volumes en France, Spirale dispose d'un titre qui, comme souvent avec Junji Ito, est à prendre au pied de la lettre : environ 400 pages de dégueulasseries sur le thème de la spirale.
Si on retrouve certains traits caractéristiques de l'horreur (Kurouzu, la ville maudite à la Twin Peaks, Kirié, la jeune ingénue face au Mal, Suichi le dépressif qui en sait plus que les autres…), le bestiaire et les anomalies cosmiques valent quand même un bon détour : types contorsionnés à mort, femme-spirale, zombi à ressort, "limaç'hommes", bébés vampires avec des champi-ventres, hommes-tornades... Y a de quoi s'amuser. Le gros point fort du manga réside sans doute dans ce travail sur le grotesque, à la fois terrifiant, dérangeant et rigolo +. On notera également la montée crescendo d'une aventure qui démarre déjà in medias res et qui parvient à ficeler plus ou moins imperceptiblement les différentes nouvelles entre elles, avant de la faire toute éclater à la fin.
Beta... Civilisations volume I - Alpha Beta Gamma, tome 2 (2014)
Sortie : 29 janvier 2014 (France).
BD (divers) de Jens Harder
Annotation :
Toute l'histoire du monde (et surtout de l'humanité) de la disparition des dinosaures jusqu'à l'an 1 (je suppose que les périodes antérieures sont relatées dans Alpha...direction).
Le projet totalement mégalomaniaque tient ses promesses, grâce à un texte rare mais précis, qui laisse toutefois une complète liberté à la déferlante de dessins, rassemblés pour illustrés un thème mais émancipés des obligeances d'une trame scénaristique trop biggest pour les hiérarchiser.
Un des gros tours de force de Jens Harder tient aussi de ses intercalations de reproductions dessinées de pubs, de films, de BD… bien de notre temps pour illustrer l'infiniment ancien. Ça pose de grosses questions sur notre conception d'époques dont on ne dispose que de restes épars et de clichés plus ou moins digérés.
Akira (Édition originale noir et blanc), tome 1 (2016)
Sortie : 18 mai 2016 (France).
Manga de Katsuhiro Ôtomo
Annotation :
J'avais jamais lu Akira, et en effet ça à l'air bien chanmax. Très bourrin aussi. Très vite, les scènes d'action s'enchaînent, Les antagonistes complotent. Les héros, qu'on connait à peine, se retrouvent aux prises avec plus forts qu'eux. Faut pas sauter la moindre page pour rester dans le coup, mais ça tient en haleine de A à Z.
Le Hors la loi - Blueberry, tome 16 (1974)
Sortie : octobre 1974 (France).
BD franco-belge de Jean-Michel Charlier et Jean Giraud (Moebius)
Annotation :
Sans pour autant abandonner les étendues sauvages et la dure loi de l'ouest, c'est surtout le vaste et ramifié complot qui enserre Blueb' qui semble intéresser ici Charlier et Moebius. Leur héros se fait finalement trainer tout le long de cet album dans un couloir ouvert pour lui seul, sans avoir à prendre des décisions géniales ou à braver les outlaws plus que ça. La liberté tant promise n'est qu'un traquenard du scénariste, fais gaffe Mike ! Un plaisir de retrouver les grands aplats de couleurs pétantes (notamment rouges) chères à Moebius, notamment quand ça semble sortir un peu du contexte.
La suite de tout ça dans Angel face, que j'ai jamais lu, et là, on va arroser les fils de coyotes, blood and guns !
Angel Face - Blueberry, tome 17 (1975)
Sortie : juillet 1975 (France).
BD franco-belge de Jean-Michel Charlier et Jean Giraud (Moebius)
Annotation :
Charlier aime bien les histoires suffocantes, où ses héros sont balancés dans un territoire hostile de quelques mètres carrés, la police, l'armée, les civils, les outlaws et les chasseurs de prime à leurs trousses. Malgré l'identification de quelques boss (le président of United States Grant, les répugnants Blake et Angel Face), dont l'élimination ou du moins la confrontation pourrait permettre d'aérer un peu, on sent très vite que ça va pas suffire pour tirer Blueberry de Durango en état de siège (surtout qu'il a vraiment pas de bol, confer les derniers mots de Guffie Palmer) et qu'il va falloir démarrer un nouveau cycle.
Blueberry se révèle sinon être un beau spécimen d'anti-héros héroïque, qui sauve d'abord sa peau, puis la démocratie of USA quand il a le temps, au détour de deux tentatives de meurtre.
The Wake (2014)
Sortie : 23 janvier 2015 (France).
Comics de Scott Snyder et Sean Murphy
Annotation :
Relecture alakoul du mythe de la sirène, sous cachet science-fictif. La division en deux parties permet surtout de mettre en avant le second pan du comics. Toutefois, certains aspects narratifs des premiers chapitres sont tout de même un peu poussés, ce qui permet à la première partie de constituer une nouvelle fantastico-angoissante plutôt sympa, même si elles se ramasse parfois un peu sur certains écueils inévitables (le secret de la base secrète, la team hétéroclite avec l'héroïne fougueuse, l'intello timide, le chasseur taré qui traite tout le monde de hippie…)
J'ai clairement l'impression qu'ici, la science-fiction passe derrière, voire est mise à disposition d'une recherche enfiévrée de l'aventure, prenant des formes conventionnelles mais efficaces. Base super secrète donc, mais aussi combats navals, pirates des Caraïbes du futur, caverne perdue prenant des allures de temple perdu, GMVNI (Gros Machin Volant Non Identifié) … C'est un peu une marque de fabrique de Sean Murphy visiblement, qui récidivera dans Tokyo Ghost, où la BD d'anticipation devient bien vite une épopée full baston avec des samouraï et des cyborgs 3000 (je connais moins Scott Snyder).
Un peu de mal avec les dessins au début, qui font très « photos dessinées ». Mais ça reste agréable à l'œil et on s'y fait vite en vrai.
Nuits de rouille - Yojimbot, tome 2 (2022)
Sortie : 4 février 2022.
BD franco-belge de Sylvain Repos
Annotation :
Dans un parc désaffecté ambiance Japon-kawai-ninja, le jeune Hiro, qui semble détenir les clefs pour comprendre pourquoi visiblement l'apocalypse a eu lieu, est traqué par des drones et des kappas mécaniques. Heureusement, il est pris en charge par les robots-samouraï du coin, programmés pour suivre le code de l'honneur et combattre le Mâl avec intrépidité - les yojimbots !
Le résumé prépare bien à ce que réserve la BD. Le tome 1 marchait déjà à fond les ballons espions chinois dans l'action-aventure pop ambiance techno-numérique dystopique, et ce tome 2 se glisse sans surprise dans le sillon tracé par son prédécesseur. On notera, pour les deux tomes, un usage très flashyx des couleurs, parfois artificiel mais original (sous forme de granulés en arrière-plan, un peu comme dans certains mangas des années 2000, mais en noir et blanc) ou encore une montée lente de la tension, qui se lâche complètement à la fin dans un déluge de bagarres-explosions-rebondissements scénaristiques.
Jizo (2020)
Sortie : 21 octobre 2020 (France).
Global Manga de Antoine Dole (Mr. Tan) et MATO
Annotation :
Le manga de Mr. Tan, celui qui a fait les Mortelle Adèle. Je connais pas MATO par contre.
Ça fait assez Shonen enfant dans les dessins (petits corps, grosses têtes), dans certaines thématiques ("On est des amis !") et dans les représentations du mal (faut pas aller dans l'obscurité, et la nuit c'est la mort). Même l'antagoniste a une dégaine fusionnelle de sorcière Disney et de guerrier orc MAIS la BD vient prendre à revers le lecteur en exploitant [SPOIL] la thématique de la mort de manière quasi frontale (le personnage principal est en fait dead depuis le début, et on suit son âme en quête de paix). Ça verse comme il faut dans le pathos (analepse de la mort du héros et de la mère n'arrivant pas à faire le deuil de son fils défunt) et dans le mysticisme (Jizo), rendant le récit assez original et plutôt émouvant. Snif.
Au bord du Monde - The Department of Truth, tome 1 (2021)
The Department of Truth Volume 1: The End Of The World
Sortie : 28 janvier 2022 (France).
Comics de James Tynion IV et Martin Simmonds
Annotation :
La couverture est assez parlante, d'un point de vue dessin, à propos du délire dans lequel on est convié. En fait, j'ai l'impression que The Department of Truth reprend la plupart des codes du nouveau thriller politique en BD, avec visages floues, effets de couleurs très maniérés, jeux constants sur les couleurs et sur l'obscurité… très efficaces pour créer un sentiment de dysfonctionnement (Homeland Detective faisait ça notamment), mais pousse les curseurs tellement loin qu'on entre sans pression sur les territoires de l'horreur, avec plein de monstres (la femme en rouge, plein de mecs zarbis avec les yeux rouges aussi, et le DEMON) et où le quotidien es tellement pressuré d'étrangetés et de mystères que la banalité n'y a plus sa place. Ça se ressent forcément du côté du scénario, qui saute bien vite les deux pieds dans le fantastique le plus perché possible.
D'ailleurs, niveau intrigue, je comprends le projet de faire un thriller politico-fantastique sur les théories du complot. Ça marche parfois très bien, notamment avec le chapitre sur la tuerie de Sandy Hook. Cela dit, le fait que l'opinion puisse à ce point modifier la réalité n'est, j'ai l'impression, traité que sous l'angle informationnel. Cela ne peut-il pas avoir un impact énorme en philosophie, en sciences, pour les religions… ? J'ai l'impression que le comics achoppe un peu à ce sujet, bien qu'on puisse suivre l'histoire racontée ici sans finalement trop s’en préoccuper.
Dernier point, on reste dans un contexte très américain, pas toujours clair pour un pitit Français.
La Cité sur la colline - The Department of Truth, tome 2 (2021)
The Department of Truth Volume 2: The City Upon a Hill
Sortie : 2 septembre 2022 (France).
Comics de James Tynion IV et Martin Simmonds
Annotation :
Les pièces du puzzle s'assemblent ! Avec notamment l'arrivée d'un new personnage kitsch comme il faut, balafre à l'œil et casquette USA inversée, qui tire presque toute la couverture à lui pendant tout le tome.
Niveau dessin et mise en page, c'est quasiment encore plus la folix que dans le 1, avec un paquet de pleines pages archi élaborées, ou encore l'incursion de formes inattendues (les cercles concentriques sur Gros Pied), et même d'un journal. On part sinon toujours plus dans le fantastique, notamment à travers les thèmes abordés (Gros Pied encore) et les sombres révélations à la fin. On rechigne pas non plus sur les rebondissements de situation, avec des doubles, triples et quadruples trahisons et retournements de veste.
C'est sympa aussi pour dresser une liste non exhaustive des différentes théories du complot américaines. Y a même des notes à ce sujet en fin de chapitre.
La Malédiction du pétrole (2020)
Sortie : 4 mars 2020 (France).
BD franco-belge de Jean-Pierre Pécau et Frédéric Blanchard (Fred Blanchard)
Annotation :
BD bien sombre, dans le dessin, son noir et blanc velouté qui évoque, forcément, une nappe de pétrole brut, et dans son ton, très cynique, volontairement moqueur envers les acteurs de l'industrie pétrolière et à peu près tous les événements et personnages de ces 150 dernières années. Il faut dire que les auteurs prennent pour parti pris d'éclairer presque toute l'histoire contemporaine par une course effrénée à l'or noir, dont découle l'économie, la politique sociale, les guerres… On s'arrête à l'aube du XXI siècle, avec des prédictions pas jojos pour la suite.
Une grosse trouvaille graphique malin + réside dans l'éternel retour de dessins de personnages, d'allégories, d'objets… identiques de page en page mais placés dans des contextes et des arrière-plans différents. Outre le côté spiralaire de l'affaire - l'exploitation du pétrole amène toujours les mêmes conséquences, peu importe le lieu et le date - l'opération réduit à son idée l'objet sur laquelle elle s'applique. Ludvig Nobel, Kim Philby ou les "Sœurs" du pétrole peuvent se retrouver dans n'importe quelle situation, ils auront toujours la même gueule, la même attitude (l'hydre féminin pour le Sœurs). L'important, pour le dessinateur, n'est pas ce qu''ils font, mais où ils sont et à quelle combine ils sont mêlés.
Jusqu'ici tout allait bien... (2020)
Sortie : 2 septembre 2020 (France).
BD franco-belge de Ersin Karabulut
Annotation :
Contes fantastico-science-fictionnels en Turquie. Il est pas gai Karabulut. En règle générale, la morale de l'histoire est limpide : les gens sont incurablement cons. L'âge de pierre et Le monde d'Ali sont là-dessus plus que clairs. Restent de très bonnes idées = une société où on doit porter des pierres sans raison, l'enfer et le paradis qui ne diffèrent que par le ton et la couleur, un pays qui privatise la gravité… Si le message est souvent simple (les pierres à porter = le poids des conventions sociales, le portable = pas bien...) le tout est servi avec une cruauté vraiment marrante. Dot avec le mari défectueux qui refuse les portables ou Une histoire pour enfant où des personnages de dessins animés, en passe de devenir des adultes, se comportent comme de gros beaufs.
Très fan surtout du dessin, bien souvent hyper-caricatural et, là encore, sans pitié avec ses personnages.
Akira (Édition originale noir et blanc), tome 2 (2017)
Sortie : 10 mai 2017 (France).
Manga de Katsuhiro Ôtomo
Annotation :
Chaud comment c'est efficace en termes d'histoire : on place bien vite les persos et ensuite c'est full bastons - intrigues - aventures, avec centrage dans un espace assez délimité, la base militaire secrète.
Le découpage est pas toujours hyper clair, je trouve, à l'inverse du dessin qui détaille comme il faut sans alourdir.
Akira (Édition originale noir et blanc), tome 3 (2018)
Sortie : 28 mars 2018 (France).
Manga de Katsuhiro Ôtomo
Annotation :
Faut un - ou des - maxi méchant à la manœuvre pour contrer les héros, et puisque Tetsuo est en off, c'est Nezu et le Colonel Survie qui s'alternent. On retrouve grosso modo la même construction que dans le tome (ou plutôt les tomes, puisqu'il s'agit d'un intégral) précédent, petite phase de dialogues - aventures avant de faire place à une longue scène de bastons courses poursuites aux multiples acteurs et rebondissements.
Akira (Édition originale noir et blanc), tome 4 (2018)
Sortie : 22 août 2018 (France).
Manga de Katsuhiro Ôtomo
Annotation :
Outre le divino-mystère qui plane sur Akira, petit nenfant devenu autre chose qu'un petit nenfant, outre aussi la dimension apocalyptique madmaxesquo-fallout qu'a prise la série, c'est clairement l'évolution de Tetsuo qui vaut le coup ici, et qui vole d'ailleurs la vedette au perso principal, momentanément absent, dont j'ai oublié le nom pouet pouet pouet. Que va-t-il devenir ? Un héros ? Un dieu ? Un simple homme ? Ou va-t-il rester un enfoiré ?
Sinon, encore cette grosse scène de bagarre à plusieurs têtes, comme dans les intégraux précédents (ici le siège du temple).
SPA (2022)
Sortie : 3 juin 2022 (France).
BD (divers) de Erik Svetoft
Annotation :
Spa, c'est de la BD d'horreur qui se prend pas la tête à monter une intrigue alambiquée ou à véhiculer un message sur notre bas monde. On prend un environnement potentiellement flippant et malsain (un centre d'eau thermal), on rajoute tout un tas de personnages perdus et tarés à plusieurs niveaux respirant une atmosphère lourde, on pense à travailler un graphisme troublant, fait d'obscurité, de volutes, de gueules impassibles et d'une police d'écriture en rouge vif, et il y a plus qu'à déballer les dégueulasseries, qui prennent bien souvent une pleine page pour s'exprimer à leur aise. Malgré le début un peu lent, ça pète lourd à partir du tiers du livre, et brusquement, si bien que les pièces qui ont été montées au début se font bien vite bazarder.
Tout est douteux sinon ici, et on ne sait même pas si le déluge de monstres choque ou non ce petit univers qui continue à tourner malgré tout. La scène de l'asticot-PDG, ou encore du VIP et de l'imposteur cuisinier en sont de jolis exemples.
L'Âge d'or, tome 1 (2018)
Sortie : 7 septembre 2018.
BD franco-belge de Roxanne Moreil et Cyril Pedrosa
Annotation :
Si le contexte général - un royaume anonyme qui va mal, une intrigue politique avec une monarque éclairée et des seigneurs conspirateurs, des cités-états, des gueux et de la misère - si le dessin également, mélange entre une tapisserie et un dessin caricatural typique BD, renverrait à une peinture d'un Moyen-Âge imaginaire et pittoresque, le tout se fait rattraper, surtout dans la seconde partie du livre, par un scénar d'aventure et de jeu de rôle, ce qui reste mine de rien encore un peu dans le ton « Moyen-Âge idéal » (la quête du trésor oublié) mais éloigne tout de même l'œuvre d'une description innocente d'un âge qui n'a jamais eu lieu mais qui se confond quand même avec le passé.
Akira (Édition originale noir et blanc), tome 5 (2019)
Sortie : 2 mai 2019 (France).
Manga de Katsuhiro Ôtomo
Annotation :
Gros tome préparatif pour la méga giga baston qu'on attend tous. C'est dommage, Tetsuo est toujours un connard (j'ai l'impression que les scientifiques sur le navire servent surtout à insister sur ce point). Encore une fois, et même si la levée de la troupe de Takéda prend de la place aussi, c'est lui qui s'impose sous les projecteurs, avec ses transformations mécano-bébéiques et les quinze mille tonnes de missiles qu'il se prend sur la gueule.
Content de revoir Joker aussi.
Akira (Édition originale noir et blanc), tome 6 (2019)
Sortie : 19 juin 2019 (France).
Manga de Katsuhiro Ôtomo
Annotation :
Le gros final. L'occasion d'enchaîner les bastons, de vider les personnages secondaires et de sortir les visuels du cosmos. Difficile de pas faire la comparaison avec Dragon Ball, notamment les tomes contre Cell = le méchant gagne en puissance encore et encore, menaçant le monde entier et multipliant les mutations pas possibles et les pouvoirs suprahumains. On se permet cela dit une petite méditation esthético-philosophique aux trois quarts du livre, avec la suite de planche plus ou moins hallucinées sur l'état quelque peu problématique de Tetsuo transformé en giga bébé volant atomique.
Un peu déçu par la fin (on fonde un empire avec trois estropiés pour contrer les puissances mondiales coalisées et on go faire de la tomo, pour le coup Dragon Ball était plus subtil) et je crois qu'en vrai je préfère Gunnm.
Préférence système (2019)
Sortie : 3 octobre 2019.
BD franco-belge de Ugo Bienvenu
Annotation :
Facile à placer dans le sillage de ce qu'on pourrait appeler la littérature d'anticipation anti-technologique et progrès. D'Aldous Huxley à Damasio (La zone du dehors) en passant par Philippe Curval (Cette chère humanité), on retrouve cette défiance et cette dénonciation de la facilité, de l'artificialité et cette mise en scène d'une société de contrôle « doux », une dictature du bon sens sans matraques mais avec une éthique pragmatique.
Le risque de cette littérature réside dans son manque de subtilité, et Préférence système ne s'extrait ici clairement pas de la règle (« on va détruire la seule copie restante de 2001 L'odyssée de l'espace pour permettre à Random25478102_KouillesKarrées de faire ses vidéos YouTube, soumets-toi, humanité ! » Les longs discours conscients de la mère ou du patron du père demeurent les apothéoses de ce registre). La seconde partie, elle aussi bien ancrée dans la tradition du néo bon sauvage (Aldous Huxley encore) a tendance à forcer (le langage des oiseaux aïeaïeaïe et le ton « la vie, elle est rude, fiston »).
Restent cependant toutes les inventions graphiques et diégétiques de Ugo Bienvenu, et là on s'amuse bien, entre les tenues d'inquisiteurs des années 70 des patrons du père, les lunettes bioniques de la mère, les capsules de voyage RATP, le design des robots… et bien sûr cette idée de faire porter l'enfant par la machine.
D'ailleurs, Paiement accepté du même auteur se défendait bien (et était quand même plus fin).
Alpha... Directions - Alpha Beta Gamma, tome 1 (2009)
Sortie : janvier 2009 (France).
BD (divers) de Jens Harder
Annotation :
L'origine du monde et du grand projet de Jens Harder. Si on a déjà la déferlante d'iconographies en tout genre qu'on retrouvera dans Beta, on a une prédominance nette des dessins « scientifiques », cherchant à saisir du vivant ou de l'inerte à partir de données et des représentations qu'on en a. C'est du pain bénit pour quiconque a un jour été fan de dinosaures, de géants disparus et a cherché à percer dans son Larousse simplifié des animaux le mystère de la vie. Les autres dessins viennent diversifier la banque d'images, avec parfois des métaphores ou du symbolique.
Deux petites réserves. J'aurais bien aimé que l'auteur se lâche un peu plus sur la grande extinction du Permien (la plus importante de l'histoire de la Terre dit-on, surtout qu'elle serait dû à l'explosion d'un super volcan) quoiqu'on se rattrape bien avec l'extinction des dinosaures. J'ai aussi un peu de mal avec tout le vocabulaire militaire et de la « Grande Compétition » pour parler de l'évolution des espèces.
Ça reste du suprêmement lourd, d'autant plus que la période démesurément longue (on pourrait dire la thématique) analysée ici se prête pour moi encore plus à l'émerveillement que celle traitée dans Beta.