Rentrée Littéraire 2017

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Un recueil de nouvelles par une de mes auteures favorites. Je me demandais comment son style, sa façon d’instiller le trouble et le mystère, allait s’adapter à la concision des nouvelles – en fait il y a chez elle un tel art de la narration que ça marche aussi parfaitement ici. Ce sont parfois de simples évocations poétiques, parfois des récits plus classiques qui, comme celui qui donne son titre au recueil, sont portés par sens du timing, de la dilatation du temps puis de sa violente accélération – et c’est parfois prodigieux. C’est un recueil donc c’est forcément inégal mais on retrouve cette étrangeté, ce malaise et cette langue poétique qui font déjà merveille dans ses romans.

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A la base de ce roman racontant la fuite d’une esclave dans la Géorgie d’avant la guerre de Sécession, il y a un fait historique dont j’ignorais tout : l’existence dudit ‘underground railroad’ qui est tout un réseau clandestin et souterrain emprunté par les esclaves qui tentent, souvent sans succès, de s'échapper.

Le roman a des allures de survival, puissant et sombrissime, et illustre cette idée selon laquelle la meilleure façon de connaître l’Amérique, c’est de la traverser en train et de regarder par la fenêtre. C’est un peu comme le chemin souterrain emprunté par l’héroïne, sauf que ce paysage d’Amérique-là est entièrement plongé dans le noir et traversé dans la terreur. Le roman parvient aussi, par touche, à évoquer l’appropriation des corps noirs, mis en scène dans des expositions ou utilisés par des scientifiques – même quand la liberté est acquise les cicatrices sont indélébiles.

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Une poétesse raconte le procès réouvert dans les années 2000 au sujet du meurtre de sa tante, qui a eu lieu une trentaine d’années auparavant et est resté sans suite à l'époque. C’est de la narrative non-fiction / du journalisme narratif / littérature du réel à cheval donc entre l’essai et une forme de romanesque.

L’enquête, même si ce n’est pas l’objet premier de sa démarche, est captivante, mais ce qui fascine surtout c’est la façon dont l’auteure parle du fantôme obsessionnel d’une mort qui pourtant a eu lieu avant sa naissance. En creux, elle décrit avec force et délicatesse le rapport aux fantômes, à la mort, à la famille, fait un portrait saisissant de la violence, de la haine des femmes, de l’Amérique. Tout en ayant du recul et de l’autocritique sur sa propre manière « d’exploiter » son sujet. J’ai trouvé ça génial.

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Un roman qui suit la libération d'un homme, pédophile, qui tente de se réinsérer dans la société. L'auteure néerlandaise a été psychologue judiciaire et on sent le vécu dans ce récit documenté, notamment en ce qui concerne la thérapie. L'épure du style permet sans artifices d'entrer dans la tête du protagoniste qui se construit des digues mentales en vue d'une réinsertion. Le regard est à la fois bienveillant (le point de vue n'est pas de faire le portrait d'un monstre, mais un - sombre certes - portrait humain) et complexe. J'ai quelque réserves sur la rupture stylistique du dénouement mais je conseille.

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Pas vraiment compris pourquoi le buzz était meilleur sur celui-ci : ça m'a semblé être un mégamix Nothomb (ici sur des relations toxiques mère-fille, entre autres) qui se lit certes mais qui est superficiel comme trois de ses livres sur quatre désormais.

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Contrairement à ce que le roman laisse initialement penser, ce n'est pas spécifiquement un récit de l'après attentat d'Anders Breivik en 2011. En retraçant l'histoire d'une famille qui elle aussi a perdu un enfant mais dans des circonstances différentes, l'auteur norvégien raconte le deuil mais explore surtout, avec finesse et singularité, comment on survit à un traumatisme, comment on ne se laisse pas définir par ce traumatisme (ou comment on tente de), comment on ne se laisse pas figer par celui-ci. Il n'y a pas de réconfort cheesy, plutôt une honnêteté poignante et quelque chose de très vivant.

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Déçu. Une histoire de fascinante disparition à la construction en mode random assez paresseuse à mes yeux. Il y a quelques belles choses ici ou là mais c'est souvent lisse, et surtout dépourvu du mystère après lequel le récit court tout le temps.

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Récit d'apprentissage et d'émancipation habile qui, dans ses superbes digressions (ce chœur de voisines religieuses qui observent et commentent), évoque parfois Toni Morrison (oui je sais, comparer une jeune auteure afro-américaine à Toni Morrison a probablement quelque chose de paresseux - mais ça ne me semble pas entièrement faux). Prometteur !

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"Un jour, j’ai remarqué que nos visages, à mon mari et moi, se ressemblaient comme deux gouttes d’eau. Personne ne m’en a fait la réflexion."

Énorme coup de cœur pour ce roman qui au Japon a reçu l'équivalent du Goncourt, au pitch génial digne d'un film de Marina de Van (une épouse a le sentiment qu'elle et son mari sont devenus des jumeaux aux visages identiques). L'épure magique de l'écriture laisse autant de place à l'étude sociétale (sur le couple fusionnel / sur le couple où l'un prend l'ascendant sur l'autre au point d'en faire son propre fantôme / sur le couple où l'autre est un parfait inconnu) qu'au vibrant mystère fantastique.

La fin, avec un décrochage d'une poésie surréaliste magnifique, est la plus surprenante que j'ai lue depuis... je ne me souviens pas.

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Une jeune fille qui cherche sa place dans un patelin du Minnesota où ne semble compter que l'équipe de hockey du coin est intriguée par une famille qui vient s'installer en face de chez elle.

Roman fort mystérieux dont la principale qualité est de ne pas être réductible à une case / un genre / un thème. C'est un récit d'apprentissage mais pas seulement, de la nature writing mais ça n'est pas le centre du récit, c'est un faux thriller... Le mélange est parfois déroutant mais donne le sentiment de découvrir une voix très singulière, avec un vrai sens de l'atmosphère.

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C'est l'histoire du fantôme de la maison hantée de Disneyland.

(j'exagère à peine)

L'auteure enquête sur son arrière-arrière grand-mère, qui en plus d'avoir une histoire extraordinaire (au cœur du 19e siècle, une Juive-Allemande est trimballée de son patelin en Allemagne jusqu'à Santa Fe par le mec qui l'a choisie comme épouse et mère de ses 36 futurs enfants, et sombrera dans la dépression dans sa demeure luxueuse tandis qu'autour d'elle un nouveau monde sort de terre), a une caractéristique supplémentaire et piquante : c'est aujourd'hui, dit-on, un fantôme qui hante encore sa maison.

Ce qu'il y a de passionnant dans cette enquête, c'est qu'elle est menée par une journaliste qui essore toutes les pistes "sérieuses" qu'elle peut (vraiment: toutes) pour faire le portrait de ce mystère, mais qui, puisqu'elle enquête sur un fantôme, interroge également des médiums et chasseurs de spectres. Ça raconte une histoire extraordinaire, incroyablement romanesque - et terrible -, une histoire de l'Amérique en plus d'une histoire familiale ; et il y a quelque chose de fascinant dans cette manière de dépeindre une quête intime dont l'objet appartient désormais à la mémoire collective.

"Dans la tradition juive on dit que nous mourons deux fois, la première en rendant notre dernier souffle, la seconde quand quelqu'un prononce notre nom pour la dernière fois" - c'est une idée aussi belle qui sous-tend cette histoire que j'ai dévorée.

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C’est l’histoire d’un commissaire-priseur qui vend ses dents en prétendant qu’elles ont appartenu à d’illustres personnages, de Virginia Woolf à Platon.

Gros bug pour ma part : le pitch est tout à fait farfelu, mais l’écriture en fait tellement des caisses dans le décalage que le récit, à mes yeux, ne respire et ne prend jamais. Ca m’est totalement tombé des mains.

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Récit de SF au cours duquel un couple dans le besoin passe la moitié de son temps dans une maison et l'autre moitié dans une prison.

Suis passé à côté certainement : j'ai trouvé la narration très laborieuse et le style assez plat (problème de traduction ?)...

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Récit autobiographique d'un jeune homme vivant dans l'Amérique blanche en crise des Appalaches qui des années plus tard s'apprêtera à voter Trump. Bouquin intéressant notamment pour son mélange de regard bienveillant et d'honnêteté brutale - ma réserve étant que le récit, à mes yeux, manque de relief sur la longueur.

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Années 60 en France, un garçon différent décide de partir en guerre - et sur son chemin rencontre une fille. Pas aimé du tout : le genre de roman français de la rentrée où un semblant de sujet est noyé dans un style affecté et crispant. Trouvé ça totalement creux - je dois être passé à côté.

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J'ai craint un instant l'album photo pittoresque et un peu crispant mais cette collection de souvenirs parvient peu à peu à composer le puzzle touchant et sensible d'un apprentissage sentimental clandestin dans l'ombre colorée de Sheila.

Le portrait familial d'une famille moyenne tendance trop moyenne (un peu de racisme, pas mal d'homophobie, papa qui n'hésite pas à cogner maman dans une ambiance Guy Lux-Danièle Gilbert) est porté par un sens du détail assez amer. C'est un tout petit récit d'une centaine de pages et qui est à mes yeux assez réussi.

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Assez beau roman sur deux antagonistes (lui perd la vue, elle perd la voix) traités avec une écriture délicate, sombre et poétique. Je trouve le récit un peu déséquilibré (sa partie à elle est plus forte), ça manque parfois de fluidité mais il y a parfois un sens de l'atmosphère qui fait merveille.

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Bon à vrai dire cet univers de fan de foot (level supporter qui pleure quand son équipe perd) et de mec obsédé par l'usage de ses couilles avec les meufs (et qui en parle tout le temps, parce que visiblement c'est un garçon fragile) n'est pas des masses fait pour moi. Mais je dois avouer avoir trouvé ça affreux, toujours en "surface" (désolé), beauf, misogyne, avec des touches de racisme (le passage du "Chinois"), d'une vulgarité complaisante et sans point de vue sur ce qui aurait pu être un loser magnifique.

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Bon j'avais créé cet article avec une SUPERBE pochette qui n'a jamais été validée donc il ne reste que ce SC tout moche, c'est horrible.

Merveilleux recueil de nouvelles d'une méchanceté jubilatoire, tour à tour sombre, grotesque, complexe, poétique et fun, porté par un art du récit d'une irrésistible efficacité. Son chef d’œuvre est le premier récit : celui d'une gamine dérangée qui, pour se confronter à Dieu, décide de sacrifier une de ses camarades.

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Jamais réussi à rentrer dans ce livre aux ingrédients séduisants mais où l'écriture passe son temps à aplatir tout ce que le récit peut avoir d'extra-ordinaire.

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Bouquin très curieux qui a l'air à la fois de se livrer tout seul et de cacher quelque chose : un portrait de famille dysfonctionnel avec ses 36 nœuds, observé en un grand écart assez captivant entre distance et intimité. Beaucoup aimé.

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Recueils de souvenirs de l'auteure qui apporte un éclairage précieux sur son œuvre gargantuesque tout en ménageant une part de mystère - sur ce qui a inspiré, sur ce qui reste indéchiffrable. Le tout à travers une réflexion sur la création, la mémoire, la fiction. Très bon.

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Pas réussi à m'intéresser au personnage ou au récit, et pourtant il y a quelques chose dans le ton et l'écriture qui m'ont donné envie de lire autre chose de cette auteure dont je n'avais rien lu jusqu'ici. J'espère que cet "avis" vous fait une belle jambe :)

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Et je termine ce petit panorama rentrée littéraire avec un feu d'artifices de WTF : un roman fleuve qui serait la rencontre indonésienne des "Mille et une nuits" et de "Oncle Boonmee", à la croisée du conte hanté et du récit historique. Rarement lu quoi que ce soit de pareil...