Table des phrases les plus remarquables des livres lus
« Pour respecter l'idiosyncrasie de chacun », André Gide offrait au lecteur d'établir la Table des phrases les plus remarquables de 'Paludes' (1895).
Henry Miller présentait à la fin des 'Livres de ma vie' (1952) sa Liste des livres lus :
« Je suis extrêmement heureux et ...
Liste de 133 livres
créee il y a environ 3 ans · modifiée il y a 8 jours
Le Caractère fétiche dans la musique (1938)
Über den Fetischcharakter der Musik und die Regression des Hörens
Sortie : 27 août 2001 (France). Essai, Musique
livre de Theodor W. Adorno
LeBouquiniste a mis 8/10.
Annotation :
ADORNO Theodor W. (1903-1969)
« On a le choix : ou bien participer avec application au système, ne serait-ce qu'en étant présent devant le haut-parleur de sa radio le dimanche après-midi, ou bien reconnaître de façon intraitable et avec persévérance que ce qui est produit pour les besoins supposés ou réels des masses est carrément de la camelote. » (p. 43)
« Le comportement perceptif qui prépare l'oubli et la brusque récognition de la musique de masse est la déconcentration. Si les auditeurs peuvent écouter avec concentration les produits normalisés, désespérément semblables les uns aux autres, à l'exception de quelques détails signifiants, sans que ceux-ci finissent par leur devenir insupportables, c'est qu'ils ne sont plus capables, pour leur part, d'une écoute concentrée. Ils sont incapables de faire l'effort d'une attention aiguë. Ils s'abandonnent, comme résignés, à ce qui leur arrive et ne peuvent avoir de sympathie pour cette musique que s'ils ne l'écoutent pas d'une façon trop précise. » (p. 56)
« De fait, il existe (…) un mécanisme névrotique de la bêtise dans l'écoute : le rejet présomptueusement ignorant de tout ce qui est inhabituel en est la marque certaine. Les auditeurs en régression se comportent comme des enfants. Ils demandent toujours à nouveau et avec une malice obstinée le même plat qu'on leur a déjà servi. » (pp. 61-2)
Qu'est-ce que le commandement ?
Sortie : 8 mai 2013 (France). Essai, Philosophie
livre de Giorgio Agamben
Annotation :
AGAMBEN Giogio (né en 1942)
« Je crois (...) qu'on pourrait donner une bonne description des sociétés prétendument démocratiques dans lesquelles nous vivons par ce simple constat que, au sein de ces sociétés, l'ontologie du commandement a pris la place de l'ontologie de l'assertion non sous la forme claire d'un impératif, mais sous celle, plus insidieuse, du conseil, de l'invite, de l'avertissement donnés au nom de la sécurité, de sorte que l'obéissance à un ordre prend la forme d'une coopération et, souvent, celle d'un commandement donné à soi-même. Je ne pense pas seulement à la sphère de la publicité ni à celle des prescriptions sécuritaires données sous forme d'invitations, mais aussi à la sphère des dispositifs technologiques. Ces dispositifs sont définis par le fait que le sujet qui les utilise croit les commander (et, en effet, il presse des touches définies comme « commandes »), mais en réalité il ne fait qu'obéir à un commandement inscrit dans la structure même du dispositif. Le citoyen libre des sociétés démocratico-technologiques est un être qui obéit sans cesse dans le geste même par lequel il donne un commandement. » (pp. 48-50)
La Bataille de cerises (2011)
Dialogues avec Hannah Arendt
Die Kirschenschlacht
Sortie : 13 mars 2013 (France). Essai, Philosophie
livre de Günther Anders
Annotation :
ANDERS Günther (1902-1992)
« (...) la possibilité de notre liquidation [n'est pas] qu'un produit accessoire, fortuit, de quelques appareils spéciaux, par exemple des armes atomiques. Au contraire, la possibilité de notre liquidation forme le principe que nous communiquons à l'ensemble de nos appareils, sans considération de la fonction spéciale dont nous investissons chacun d'entre eux ; principe qui nous importe exclusivement lorsque nous les construisons. Car ce que nous visons, c'est constamment de produire quelque chose qui pourrait se passer de notre présence et de notre secours, et qui fonctionnerait sans nous en ne se plaignant pas – ce qui ne signifie rien d'autre que posséder des outils au moyen desquels nous nous rendons superflus, nous nous éliminons, nous nous "liquidons". Que cet état recherché ne soit toujours atteint qu'approximativement, cela est indifférent. Ce qui importe, c'est la tendance. Et son mot d'ordre, c'est précisément : "sans nous". » (pp. 159-60)
Anicet ou le Panorama, roman (1921)
Sortie : 1921 (France). Roman
livre de Louis Aragon
Annotation :
ARAGON Louis (1897-1982)
« Anicet n'avait retenu de ses études secondaires que la règle des trois unités, la relativité du temps et de l'espace ; là se bornaient ses connaissances de l'art et de la vie. Il s'y tenait dur comme fer et y conformait sa conduite. Il en résultat quelques bizarreries qui n'alarmèrent guère sa famille jusqu'au jour où il se porta sur la voie publique à des extrémités peu décentes : on comprit alors qu'il était poète, révélation qui tout d'abord l'étonna mais qu'il accepta bonnement, par modestie, dans la persuasion de ne pouvoir lui-même en trancher aussi bien qu'autrui. Ses parents, sans doute, se rangèrent à l'avis universel puisqu'ils firent ce que tous les parents de poètes font : il l'appelèrent fils ingrat et lui enjoignirent de voyager. » (Incipit)
La Défense de l'infini (1997)
Sortie : 11 avril 1997. Recueil de nouvelles
livre de Louis Aragon
Annotation :
« Il y a des hommes qui n’ont pas encore admis la malédiction divine. Ils ne travailleront pas à la sueur de leurs fronts…
Or voici précisément venir le temps de la grande résignation humaine. Le travail-dieu trouve à son tour des prêtres. La paresse est punie de mort… Tout ce qui respire pense au lendemain, parait-il. Il y a de la honte à ne pas penser comme tout ce qui respire. On me dit : « Et maintenant qu’allez-vous faire ? » Détournez, détournez cette conversation inutile. Vous ne pouvez pas comprendre. Contentez-vous de l’explication Paresse. J’ai depuis longtemps renoncé à l’estime. L’estime de qui, s’il vous plaît. Je ne serai pas solidaire de ceux qui estiment…
Ne me demandez pas de me justifier. Ne troublez pas mon sommeil, vous qui vivez à votre manière… Je sais aujourd’hui ce qu’est l’expérience. Reconnaître la maîtrise de ce qu’on haïssait, s’avouer vaincu, composer avec soi-même, souscrire à son tour à l’esclavage séculaire, et croire ainsi acheter la paix et le bonheur… Je sais aujourd’hui ce qu’est votre expérience. Livreur, vous pouvez reprendre le ballot. On me tolère. C’est tout ce qu’on peut pour moi. Il faut voir la figure que je prends chez les autres…
Et toutes les phrases supposent une restriction mentale, si nous avions agi comme toi, serais-tu là ?... C’est agaçant, ce scandale en chair et en os, là, dans son fauteuil, la main pendante, qui fume. Vas-tu te décider, prendre parti ? Moi, je les regarde. Ce qui les enrage, c’est qu’ils n’ont aucune raison à se donner de l’obscure partialité qu’ils éprouvent en eux pour ma folie. Je parle des meilleurs. Rien. Si encore j’étais un artiste, un poète. Il y a de grandes prérogatives pour ces gens-là. On peut toujours espérer qu’ils feront quelque chose…
Si ce monsieur allait écrire ou peindre un chef-d’œuvre… Mais moi, songez donc. Je ne promets rien. On ne peut pas se promettre à mes dépens. Je n’ai aucun talent. Je n’y prétends même pas. Alors, pourquoi ? On m’interroge comme si j’allais m’excuser… Il y a des trafiquants de pensée qui feignent d’approuver, si, par faiblesse, un jour, je me laisse aller à parler devant eux. Simple jeu de leur part ? Ou bien pourquoi continuent-ils à vivre comme s’ils me désapprouvaient ? On m’a dit un jour que j’étais un amateur. Il s’agit de faire rentrer les cas difficiles dans les difficultés déjà connues… » (p. 207)
De la révolution (1963)
On Revolution
Sortie : 23 mai 2013 (France). Essai, Politique & économie, Philosophie
livre de Hannah Arendt
Annotation :
ARENDT Hannah (1906-1975)
« Depuis Tite-Live, et au fil des siècles, la nécessité [celle de recourir à la violence, à la guerre] a revêtu maintes significations qui nous suffiraient aujourd’hui à juger une guerre injuste, et non juste. Conquête, expansion, défense d’intérêts particuliers, préservation du pouvoir face à l’émergence de nouvelles puissances menaçantes, ou soutien à un équilibre des pouvoirs donné : toutes ces réalités bien connues d’une politique de puissance n’étaient pas seulement les causes effectives de l’éclatement de la plupart des guerres dans l’histoire ; elles furent aussi reconnues comme des « nécessités », c’est-à-dire des motifs légitimes pour s’en remettre à la décision des armes. » (p. 14)
« Détourner les yeux de la misère et du malheur de l’humanité n’était plus possible dans le Paris du XVIIIe siècle (…) et pas davantage aujourd’hui dans certains pays d’Europe, la plupart de ceux d’Amérique latine et presque tous ceux de l’Asie et de l’Afrique. » (p. 109)
« « Si Robinson Crusoé sur son île avait eu la Bibliothèque d’Alexandrie et la certitude de ne jamais revoir un visage humain, eût-il jamais ouvert un livre ? » (John Adams). » (p. 333)
« Pour élaborer un tel être polycéphale [l’État-nation = l’ensemble de la population avec une volonté unique], Rousseau recourait à une analogie (…). Il prenait exemple de cette expérience banale : deux intérêts opposés s’unissent en présence d’un troisième, opposé aux deux premiers. Politiquement, il présupposait l’existence d’un ennemi national commun et tablait sur la puissance unificatrice qui en résultait. C’est seulement en présence de l’ennemi que la nation une et indivisible, l’idéal du nationalisme français et de tous les autres peut advenir. À partir de là, l’unité nationale ne peut s’affirmer que dans les affaires étrangères, dans le cas hypothétique où il existe un ennemi, fût-il potentiel. Cette conclusion a été le fonds de commerce rarement officialisé de la politique nationale au XIXe siècle et au XXe siècle (…). » (p. 115)
« Car l’abondance et la consommation sans fin sont l’idéal dont rêvent les pauvres : elles sont le mirage dans le désert de la misère. En ce sens, opulence et détresse ne sont que les deux faces d’une même médaille : les chaînes de la nécessité n’ont nul besoin d’être d’airain, elles peuvent être de soie. » (p. 211)
[...]
Anacharsis Cloots : l'Orateur du genre humain
Sortie : 1979 (France). Biographie
livre de Georges Avenel
Annotation :
AVENEL Georges (1828-1876)
CLOOTS Jean-Baptiste "Anacharsis" (1755-1794)
« Pour justifier aux yeux des patriotes l'établissement d'un gouvernement provisoire, il fallait une conspiration. Pour justifier cette conspiration, il fallait des arrestations. Le nombre de ces arrestations dit l'importance d'une conspiration. Or, plus la conspiration paraîtra grosse, plus le gouvernement que nous obtiendrons sera fort. On faisait donc arrêter au hasard, à outrance ; car la loi des suspects permettait, quelle fortune ! d'arrêter sans contrôle. » (page 407)
« La liberté ne consisterait-elle plus qu'à ne pas être en prison ? » (page 429)
La Fuite hors du temps (1946)
Journal 1913-1921
Die Flucht aus der Zeit
Sortie : 13 mai 1993 (France). Journal & carnet
livre de Hugo Ball
Annotation :
BALL Hugo (1886-1927)
« Le dadaïste aime l’insolite, et même l’absurde. Il sait que la vie s’affirme dans la contradiction et que son époque, plus que n’importe quelle autre, s’ingénie à détruire tout ce qui est généreux. » (page 136)
Mémoires (1895)
Sortie : 2005 (France). Autobiographie & mémoires
livre de Paul Barras
Annotation :
BARRAS (1755-1829)
« On sait comme les gens de ce métier savent environner le pouvoir et s'en distribuer les faveurs lucratives et honorifiques, qu'on a bien soin de ne jamais séparer les uns des autres, le tout pour le plus grand bonheur des peuples... » (p. 273)
Pour Delacroix
Sortie : 1986 (France). Essai, Peinture & sculpture
livre de Charles Baudelaire
Annotation :
BAUDELAIRE Charles (1821-1867)
« J'ai essayé plus d'une fois, comme tous mes amis, de m'enfermer dans un système pour y prêcher à mon aise. Mais un système est une espèce de damnation qui nous pousse à une abjuration perpétuelle ; il en faut toujours inventer un autre, et cette fatigue est un cruel châtiment. Et toujours mon système était beau, vaste, spacieux, commode, propre et lisse surtout ; du moins il me paraissait tel. » (p. 103)
Essais sur Brecht (1966)
Sortie : 1966. Essai, Correspondance
livre de Walter Benjamin
Annotation :
BENJAMIN Walter (1892-1940)
« L'appareil de production et de publication bourgeois peut assimiler d'étonnantes quantités de thèmes révolutionnaires, voire les propager, sans mettre en question sérieusement par là sa propre existence ni celle de la classe qui le possède. » (pp. 132-133)
Sens unique
précédé de Une enfance berlinoise
Sortie : 19 mai 1998 (France). Essai, Récit
livre de Walter Benjamin
Annotation :
« Ne pas trouver son chemin dans une ville, ça ne signifie pas grand-chose. Mais s’égarer dans une ville comme on s’égare dans une forêt demande toute une éducation. » (incipit)
Morts violentes (1891)
Tales of Soldiers and Civilians
Sortie : janvier 1987 (France). Recueil de nouvelles
livre de Ambrose Bierce
Annotation :
BIERCE Ambrose (1842-1914 ?)
« (...) si jamais il m'arrive malheur pour avoir oublié vos conseils, j'espère que je serai réconforté à mon dernier moment, en entendant votre voix aimée murmurer à mon oreille ces précieuses paroles : « Je vous l'avais bien dit. » » (p.95)
Le Mariage du Ciel et de l'Enfer
(traduction André Gide)
The Marriage of Heaven and Hell
Sortie : 1790 (France). Poésie
livre de William Blake
LeBouquiniste a mis 8/10.
Annotation :
BLAKE William (1757-1827)
« La Prudence est une vieille fille, riche et moche, que courtise l'impuissance. » (p.25)
« Sois toujours prêt à dire ce que tu penses, et l'homme faux t'évitera. » (p.29)
« (...) peut-on dire d'un homme qu'il est honnête s'il résiste à son génie ou à sa conscience dans le seul but de préserver son bien-être ou son plaisir du moment ? » (p.33)
Le Désespéré (1887)
Sortie : 1887 (France). Roman
livre de Léon Bloy
Annotation :
BLOY Léon (1846-1917)
« Au fait, que diable voulez-vous que puisse rêver, aujourd’hui, un adolescent que les disciplines modernes exaspèrent et que l’abjection commerciale fait vomir ? (...) Il ne reste plus que l’Art. Un art proscrit, il est vrai, méprisé, subalterne, famélique, fugitif, guenilleux et catacombal. » (pp.93-4)
« … la vraie liberté (…) consiste non point à pouvoir faire le mal ou le bien, mais au contraire, à être dans l'heureuse nécessité de ne faire que le bien, tout en choisissant, parmi ce qui est bien, ce qui nous paraît le meilleur. » (p.137)
« Je serais, dans tous les cas, inhabile à me prostituer. Je dégoûterais le client sans lui donner le moindre plaisir. (…) Ne savons-nous pas qu’il est toujours inutile de faire des concessions ? J’ai quelques fois essayé de m’éteindre un peu, dans l’espoir de récolter quelques misérables sous. Je me déshonnorais sans parvenir à me faire accepter davantage. » (p.273)
« [le journaliste] apparaît (…) comme le châtiment, la flétrissure infinie, la tare vivante d’une société assez avachie pour ne plus avoir conscience des attitudes qu’on la force à prendre et des vomissures qu’on lui fait manger. » (p.334)
« Après cela, que voulez-vous qu'il fasse, le petit troupeau des vrais artistes, qui ne savent rien du tout que frémir dans la lumière et qui ne furent jamais capables de cuisiner les gros ragoûts de la populace ? » (p.373)
Journal inédit, tome II (2000)
(1896-1902)
Sortie : mai 2000. Journal & carnet
livre de Léon Bloy
LeBouquiniste a mis 8/10.
Annotation :
« Les vacances sont finies et les cours recommencent. La vie médiocre, la vie mécanique reprend. Une moitié de ce royaume donnera des leçons, l’autre moitié en recevra. Ainsi chaque jour jusqu’à ce qu’on crève. Et tout cela est inutile, à jamais inutile, éternellement inutile. Pas une seule fois, fût-ce par erreur, ne se glissera une idée, une lueur de raison, capable d’éclairer, une seconde, cet enseignement automatique. On apprendra des langues étrangères et on saura par cœur des manuels ou des catalogues, mais les imbéciles resteront des imbéciles pour toute la durée des siècles et les talents, s’il y en a, resteront enfouis sous cette science de mort sans pouvoir jamais éclater. » (p.591)
Une société à refaire
Vers une écologie de la liberté
Sortie : 1988 (France). Essai
livre de Murray Bookchin
Annotation :
« Le type de société qui domine actuellement tend plutôt à inhiber notre potentiel humain qu'à permettre sa réalisation. » (p. 36 de l'édition Atelier de Création Libertaire)
Le Maître et Marguerite (1940)
(traduction Françoise Flamant)
Sortie : 2004 (France). Roman, Fantastique
livre de Mikhaïl Boulgakov
Annotation :
BOULGAKOV Mikhaïl (1891-1940)
« Le mode de vie qui était celui de Berlioz ne l'avait pas préparé à affronter des phénomènes sortant de l'ordinaire. » (p.45)
« (...) ne demandez jamais, ne demandez rien ! Jamais rien, et surtout pas à de plus puissants que vous. À eux de proposer, à eux de tout octroyer. » (p. 464)
Histoires de monsieur Keuner (1967)
Geschichten vom Herrn Keuner
Sortie : 1980 (France).
livre de Bertolt Brecht
LeBouquiniste a mis 8/10.
Annotation :
BRECHT Bertolt (1898-1956)
« Interrogé sur ses rapports avec la nature, monsieur K. dit « J’aimerais de temps à autre, en sortant de la maison, voir quelques arbres. Surtout quand par leur aspect changeant selon le moment du jour et de l’année, ils atteignent un degré de réalité si particulier. C’est que nous, dans les villes, nous ne nous y reconnaissons plus avec le temps, à ne voir jamais que des objets d’usage, maisons et routes, lesquelles inhabitées seraient vides, inutilisées seraient absurdes. L’ordre social qui nous est propre, il est vrai, nous fait mettre aussi les hommes au nombre des objets d’usage et là les arbres ont, du moins pour moi qui ne suis pas menuisier, quelque chose d’autonome qui rassure, d’indépendant de moi, et je vais jusqu’à espérer qu’ils ont en eux, même pour les menuisiers, un quelque chose qui ne peut être utilisé. »
« Pourquoi n’allez-vous pas, si vous voulez voir des arbres, faire simplement un tour de temps en temps en pleine nature ? » lui demanda-t-on. Monsieur Keuner répondit étonné : « J’ai dit que j’aimerais les voir en sortant de la maison. »
(Monsieur K. disait aussi : « C’est une nécessité pour nous de faire de la nature un usage parcimonieux. A s’attarder dans la nature sans travailler, on tombe aisément dans un état morbide, quelque chose comme la fièvre s’abat sur vous. ») » (Monsieur Keuner et la nature, pp. 21-22)
Les Affaires de Monsieur Jules César
Sortie : 1957 (France). Roman
livre de Bertolt Brecht
LeBouquiniste a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Annotation :
« (…) un esclave syrien a été roué de coups pour avoir prétendu (etc.) des légionnaires romains, en train de violer les femmes indigènes, s’étaient relevés chaque fois lorsque passait un capitaine pour lui présenter les honneurs. » (p. 146)
« J’ai beau être esclave, je ne me considère pas, et de loin, comme tombé aussi « bas » que ce noble failli et ses Plébéiens fainéants et dévoyés. » (p. 147)
« Que ce passerait-il si les esclaves en venaient vraiment à jeter par-dessus bord toutes les notions de raison et de morale qui les retiennent ? » (p. 149)
L'Amour fou (1937)
Sortie : 1937 (France). Récit
livre de André Breton
LeBouquiniste a mis 8/10.
Annotation :
BRETON André (1896-1966)
« Boys du sévère, interprètes anonymes, enchaînés et brillants de la revue à grand spectacle qui toute une vie, sans espoir de changement, possédera le théâtre mental, ont toujours évolué mystérieusement pour moi des êtres théoriques, que j'interprète comme des porteurs de clés : ils portent les 'clés des situations', j'entends par là qu'ils détiennent le secret des attitudes les plus significatives que j'aurai à prendre en présence de tels rares événements qui m'auront poursuivi de leur marque. » (Incipit)
Les Vases communicants (1932)
Sortie : janvier 1978 (France). Essai, Poésie
livre de André Breton
Annotation :
« Certes je me prête entre-temps à l’accomplissement d’un petit nombre d’actes plus ou moins réfléchis, comme ceux de me laver, de me vêtir, de me comporter à peu près comme d’ordinaire avec des amis. Mais ceci n’est plus guère qu’exercice d’une fonction coutumière comme celle de respirer en dormant, ou encore libre jeu d’un ressort qui n’a pu que partiellement se débander. Beaucoup plus significatif est d’observer comme l’exigence du désir à la recherche de l’objet de sa réalisation dispose étrangement des données extérieures, en tendant égoïstement à ne retenir d’elles que ce qui peut servir sa cause. » (Œuvres Complètes, T. II, p. 177)
Arcane 17 (1945)
Sortie : 1 novembre 1989 (France). Roman
livre de André Breton
Annotation :
« La rébellion porte sa justification en elle-même, tout à fait indépendamment des chances qu’elle a de modifier ou non l’état de fait qui la détermine. Elle est l’étincelle dans le vent, mais l’étincelle qui cherche la poudrière. » (Œuvres Complètes, T. III, p. 88)
« Et, tout d’abord, chez l’homme un terrible besoin d’enfance persistante demande à être comblé. » (Œuvres Complètes, T. III, p. 104)
Souvenirs d'un pas grand-chose (1982)
Ham On Rye
Sortie : 1984 (France). Roman
livre de Charles Bukowski
Annotation :
BUKOWSKI Charles (1920-1994)
« À vingt-cinq ans, les trois quarts des gens étaient foutus. Il ne restait plus qu'une nation entière de trous du cul qui passaient leur temps à conduire des voitures, à bouffer, à avoir des gosses et à tout faire de la pire des façons, comme de voter pour le candidat à la présidence qui leur ressemblait le plus. » (p. 210)
Erewhon (1872)
Erewhon; Or, Over the Range
Sortie : 22 avril 2005 (France).
livre de Samuel Butler
LeBouquiniste a mis 8/10.
Annotation :
« (...) les gens finissaient par perdre patience en voyant leur attention accaparée à tous les coins de rue par des objets qui, lorsqu'ils s'en étaient approchés, apparaissaient dénués de tout intérêt pour eux. » (p. 170)
« « Considérez les innombrables risques que vous courez ! naître de parents mauvais, et être instruit dans le vice ! ou naître de parents sots et être nourri de billevisées et d'idées fausses ! ou de parents qui vous considéreront comme une espèce de bien meuble, de propriété, dépendant bien plus d'eux qu'eux de vous-même ! Et puis, vous pouvez tomber sur des parents tout à fait antipathiques, qui ne pourront jamais vous comprendre, et qui feront tout leur possible pour vous contrecarrer (comme la poule qui a fait éclore un caneton) et qui ensuite vous traiteront de fils ingrat parce que vous ne les aimez pas. Ou bien encore vous pouvez tomber sur des parents qui ne verront en vous qu'un être à hébéter pendant qu'il est encore jeune, de crainte qu'il ne leur donne des ennuis plus tard en se permettant d'avoir des désirs et des sentiments personnels. » » (pages 231-2)
« Dieu me garde de parler à la légère, mais je trouvai que c'était un vrai gaspillage de bonne énergie humaine que de laisser des gens perdre des années et des années à se perfectionner dans un exercice aussi infécond, alors que leur propre civilisation leur présentait des problèmes par centaines, qui demandaient instamment à être résolus, et dont la solution aurait rapporté un joli bénéfice à celui qui l'aurait trouvée. Mais sans doute les gens savent mieux ce qui leur convient quand il s'agit de leurs propres affaires. Pourtant, si les jeunes gens avaient choisi d'eux-mêmes ces études, je m'en étonnerais moins ; mais ils ne les choisissent pas, on les leur impose, et la plupart d'entre eux ont de l'aversion pour elles. Ce que je puis dire, c'est que tout ce qu'on m'a fait valoir en faveur de ce système m'a paru trop peu probant pour que je puisse avoir une haute idée des avantages qu'il présente. » (page 254)
« Et peut-être, après tout, qu'il vaut mieux pour une nation que ses centres d'éducation fassent plus pour combattre le développement de la pensée que pour l'encourager. Si ces centres n'infusaient pas dans les esprits d'un grand nombre de leurs nourrissons une certaine pédanterie vaniteuse, les ouvrages originaux deviendraient tellement communs, qu'il constitueraient un véritable péril. Il est en effet indispensable que la plus grande partie de ce qui se dit [...]
Don Juan (1824)
Sortie : 1824. Poésie
livre de Lord Byron
Annotation :
BYRON (1788-1824)
« Je suis tempéré, sans aucun tempérament ;
Je suis modeste, mais j’ai un certain aplomb ;
Je suis changeant, pourtant je suis « Idem semper1 » ;
Patient, mais je ne suis pas des plus endurants ;
Joyeux, mais quelquefois, j’ai tendance à gémir ;
Doux, mais je suis parfois un « Hercule furens »
… »
1 « Toujours le même ».
(Chant XVII, page 722)
Héroïnes
Sortie : mai 2006 (France).
livre de Claude Cahun
Annotation :
CAHUN Claude (1894-1954)
« Patrie, prison de l'âme ! Enfermée, moi du moins j'ai su voir les barreaux, et même entre les barreaux... » (La Sadique Judith, Écrits p. 132)
« (...) (m'étant vouée, faute de mieux, aux rêveries solitaires, je réfléchis beaucoup) (…). » (Cendrillon, l'enfant humble et hautaine, Écrits p. 143)
Aveux non avenus (1930)
Sortie : 1930 (France).
livre de Claude Cahun
LeBouquiniste l'a mis en envie.
Annotation :
« Mais quel manège ridicule pour ceux qui n'ont pas vu – et je n'ai rien montré – les obstacles, les abîmes, et les degrés franchis.
En attendant d'y voir clair, je veux me traquer, me débattre.
(...) Ne voyager qu'à la proue de moi-même. » (Écrits pp. 177-8)
« Ne jamais perdre pied, regard de soi, conscience. La folie n'est pas moins vaniteuse que la raison. L'âme est une sotte qu'il fait bon remettre à sa place de temps en temps. » (I. – R. C. S., Écrits p. 201)
Écrits
Sortie : 2002 (France). Récit, Correspondance, Culture & société
livre de Claude Cahun
LeBouquiniste a mis 9/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Annotation :
« Ce qui vous caractérise. Quels sont vos traits les plus marqués ?
A – (...) Un esprit lent, pesant ; des réactions tardives. (…)
B – (...) Le dédain de tout ce qui est voyant, tapageur, de mauvais goût. (…)
Quels sont vos traits les moins marqués.
A – (...) sens pratique, - non dans la conception mais toujours dans la réalisation.
B – La vanité. (...) les ambitions brutales et les ruses offensives, voire même défensives. Oui, jusqu'à un certain point, l'instinct de conservation.
(…)
Ce qui vous plaît en vous ?
A – (...) Mon refus de rien juger sans tout prendre en considération. Mon irrésolution morale. Ma scrupuleuse et scandaleuse franchise. Mon besoin de perfection.
(…)
C – (...) mon détachement des choses matérielles. (…)
Que redoutez-vous ?
A – (...) Me sentir au-dessous de mon propre niveau, si bas soit-il déjà. (…)
C – Le recommencement du passé. » (Portraits psychologiques p. 132)
« Suspect.
... aurais-je le sens du ridicule ? Suis-je français sans le savoir ? moi – né de patrie inconnue. » (Velléités pp. 326)
Sylvie et Bruno (1889)
Sylvie and Bruno
Sortie : 1992 (France). Roman
livre de Lewis Carroll
Annotation :
CARROLL Lewis (1832-1898)
« Nous gaspillons la moitié des plaisirs que la vie pourrait nous donner, par manque d'attention. Prenez n'importe quel exemple : peu importe l'insignifiance du plaisir, le principe est le même. Imaginons A et B en train de lire le même médiocre roman emprunté à une bibliothèque. A ne se préoccupe nullement de comprendre les rapports entre les personnages, dont dépend peut-être tout l'intérêt de l'histoire ; il saute toutes les descriptions de paysage, tous les passages qui paraissent un peu mornes ; il ne prête qu'à moitié attention aux passages même qu'il lit ; il continue sa lecture, simplement parce qu'il ne se décide pas à trouver une autre occupation, alors que depuis des heures il aurait dû poser le livre ; et il arrive à la fin dans un état complet de découragement ! B, lui, est tout entier à ce qu'il fait, suivant le principe que '' tout ce qui vaut la peine d'être fait vaut la peine d'être bien fait'' ; il comprend en profondeur les liens des personnages ; il évoque avec ''les yeux de l'esprit'' de vrais tableaux en lisant les descriptions de paysages ; et surtout, il ferme résolument le livre au bout de quelques chapitres, quand son intérêt est encore en éveil, et il s'occupe d'autre chose ; ainsi, quand il s'offre une nouvelle heure de lecture, il est comme un homme affamé qui se met à table ; et à la fin du livre, il retourne à son travail quotidien, ''tel un géant régénéré'' !
Mais supposez que le livre soit vraiment nul... qu'il n'y ait là rien qui vaille la peine d'être lu ?
Bien, supposons (…). A ne découvre jamais que le livre est nul, mais se leurre jusqu'à la fin, essayant de se persuader qu'il s'amuse. B ferme tranquillement le livre, quand il a lu une douzaine de pages, par pour la bibliothèque, et l'échange contre un meilleur ! » (Chapitre XXII – Le Passage de la ligne, p. 209)