Top 10 Morceaux selon Shap6

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Jason Molina rassemble douze musiciens dans un studio de Chicago pour ce qui ressemble, avec le recul, à une cérémonie d’adieu anticipée. Enregistré en une seule prise sans répétition préalable, le morceau déploie ses sept minutes comme une procession funèbre qui refuserait de s’achever. La plus belle fable jamais écrite. Un morceau dont je ne me lasserai jamais.

Mumma, here comes midnight with the dead moon in its jaws
Long dark blues
(Will-o-the-wisp)

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Pendant sept minutes, Thurston Moore et Lee Ranaldo laissent leurs guitares converser dans ce langage (pas uniquement bruitiste !) qu’ils ont développé depuis vingt ans, fait de feedbacks contrôlés et de dissonances qui finissent par trouver leur propre logique harmonique. Steve Shelley maintient une pulsation minimale qui ancre l’expérimentation dans quelque chose de physique, de charnel presque. Ce n’est pas tant une chanson qu’une exploration de ce qui arrive quand on laisse les instruments respirer et interagir sans imposer de structure narrative traditionnelle.

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L’ouverture de Kid A marque le moment où Radiohead abandonne définitivement les guitares rock pour embrasser une esthétique post-humaine qui définira les années 2000. L'histoire fonctionne comme une anti-épiphanie (« yesterday I woke up sucking a lemon » ; « there are two colours in my head » comme un clin d'oeil à Rothko ?), Thom Yorke manipulant sa voix à travers des filtres numériques jusqu’à la rendre méconnaissable. Les nappes de Prophet-5 créent cet espace sonore qui évoque simultanément la chaleur du foyer et le froid de l’espace intersidéral, cette ambivalence qui fait toute la richesse de l’album.

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Écrit après la mort d’Aaron Todovich dit « Dondante », ami d’enfance du groupe, le morceau transforme le processus de deuil en huit minutes de catharsis sonore où Jim James laisse sa voix flotter dans des nappes de reverb qui évoquent les grands espaces du Kentucky, cette sensation d’immensité qui peut être aussi bien libératrice qu’écrasante. Le drop que l'on redoute à mesure que la tension monte est absolument dévastateur lorsqu'il nous tombe dessus. La guitare slide trace des mélodies ascendantes qui semblent chercher quelque chose dans le ciel, une réponse qui ne vient jamais, cette absence de résolution qui caractérise le deuil véritable.

(You had me worried, so worried
That this would last)

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Black Francis a construit tout le morceau autour d’un prénom qu’il a inventé simplement parce que la sonorité lui plaisait, cette approche intuitive du langage qui caractérise l’écriture des Pixies depuis leurs débuts (le nom même du groupe a été trouvé en cherchant des mots intéressants au hasard dans le dictionnaire). Kim Deal ajoute ses harmonies éthérées alphabétiques qui transforment complètement la texture du morceau. A écouter absolument pour se lancer dans la discographie immense du groupe !

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J'ai découvert ce morceau en regardant JoJo et il m'a complètement hypnotisé, quelle salve d'émotions ... Metheny abandonne sa Gibson habituelle pour une guitare synthétisée Roland qui produit cette sonorité immédiatement reconnaissable, créant une mélodie qui transcende complètement son contexte jazz fusion pour toucher quelque chose d’universel dans l’expérience humaine de la séparation et du voyage. Le morceau fonctionne comme une madeleine de Proust sonore pour quiconque a connu ces moments dans les gares la nuit, quand on ne sait pas si les au revoir sont temporaires ou définitifs.

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Treize minutes pour dire l’indicible, la destruction mentale de Syd Barrett transformée en symphonie rock qui fonctionne comme un tombeau musical pour leur ancien leader. Le motif de quatre notes revient de manière obsessionnelle, créant cette circularité qui évoque les patterns de pensée de la maladie mentale. L’histoire (avérée ?) de Barrett apparaissant au studio pendant l’enregistrement, chauve et méconnaissable, ajoute une dimension tragique supplémentaire à ce qui était déjà conçu comme une élégie pour un ami perdu dans sa propre tête.

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Au cœur de l’ambition wagnérienne de Mellon Collie and the Infinite Sadness, Billy Corgan place cette ballade d’une fragilité inattendue où sa voix semble constamment sur le point de se briser. Il y a une vulnérabilité dans cette chanson que Corgan cache habituellement derrière des murs de guitares et de rage adolescente. Les arrangements de cordes créent ce cocon protecteur qui contraste avec la violence habituelle du groupe.

I won't deny the pain
I won't deny the change
And should I fall from grace, here with you
Will you leave me too? Will you leave me too?

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Neil Hannon déploie tout son art de la miniature narrative pour transformer une simple promenade au parc en méditation sur le temps qui passe et les vies qu’on n’a pas vécues. Les arrangements orchestraux de Joby Talbot évoquent les grandes heures de la pop baroque britannique des années 60, mais avec cette distance ironique propre à Hannon qui empêche le pastiche de devenir simple exercice de style. C’est du cinéma en chanson, où chaque détail compte pour construire le portrait de cette femme qu’on ne voit jamais mais qu’on comprend intimement, avec un humour tongue-in-cheek anglais qu'on ne peut qu'apprécier.

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Le post-punk dublinois trouve une nouvelle urgence avec Fontaines D.C., dont la particularité réside dans cette façon qu’a Grian Chatten de cracher les mots avec une diction qui transforme l’anglais en quelque chose de plus dur, plus urgent, chaque syllabe portant le poids de l’histoire irlandaise contemporaine. Moins connu que des titres commes I Love You ou Starburster (toutes deux magnifiques à leur façon), mais un morceau que je trouve néanmoins formidable en tous points.