Beyrouth-Miami
7.1
Beyrouth-Miami

livre de Elmore Leonard (1995)

Elmore Leonard, diseur de bonne aventure

"Dans vingt ans, les gens ne se souviendront peut-être plus exactement de quoi parlaient mes films, mais ils se souviendront de mes personnages", présageaient Quentin Tarantino sur ce qui resterait de lui une fois à la retraite. Okay, c'est peut-être un peu répétitif comme manœuvre que de commencer un papier sur Elmore Leonard par une allusion au cinéaste de Jackie Brown (adapté de Punch Créole, signé...Elmore Leonard). En même temps, l'idée est bien de démontrer le lien évident entre l'écrivain décédé en 2013 et le réalisateur/scénariste encore en activité. Prenez n'importe lequel de ses livres, même constat : ce n'est pas l'intrigue que vous retiendrez mais ceux qui la peuplent. La prouesse est de prendre un genre aux normes établies et le pirater de l'intérieur.


Première phase, on rencontre le héros Raylan, marshall plus cool tu meurs, le genre d'homme qui cultive son paradoxe d'homme réfléchi mais téméraire. Puis on arrive à un trio de brigands, Chip, Louis et Bobby, aussi différents qu'imprévisibles. Ils ont une combine, ils la mettent en application. Évidemment, leur route va croiser celle du redresseur de torts au chapeau de cowboy. Vous voyez ? Rien de particulier à signaler. Sauf que. Comme chez son fan Tarantino, c'est dans la manière que Elmore Leonard captive.


Allégé de certains tics d'écriture qui l'agacent, le style Leonard se caractérise par une concision et un génie du dialogue que fort peu de ses collègues partagent (le Hard-Boiled dans sa pureté). D'aucuns diraient que le scribe ne s'embarrasse d'aucune psychologie, ce qui n'est pas exact. Ses personnages vivent, parlent, réfléchissent en temps réel, ce qui ne les empêche pas de faire certains choix surprenants. Quoiqu'il en soit, plus on avance plus on arrive à s'en faire une idée qui peut évoluer au fil du récit, l'avantage de ne jamais rien planifier à l'avance. Beyrouth-Miami est à ce titre un digest du genre. Narration chorale mais en ligne droite, pas mal de suspense, certains rebondissements à couper le souffle et surtout de vrais protagonistes. Le joker du roman vient d'ailleurs de l'un d'eux (Dawn) qui laisse infuser un soupçon d'ambigüité et de paranormal au milieu de ce duel sous le soleil de Floride.


Beyrouth-Miami n'est peut-être pas au niveau de La Loi de la Cité, mais il est tout à fait recommandable pour quiconque veut être bercé par la fraicheur, les bons mots et les quelques secousses que le polar peut offrir. Les 300 pages achevées, que retiendra-t-on ? Les personnages, comme par hasard. Ça tombe bien, l'ensemble tourne autour d'eux. Magie du hasard ? Non, magie de Elmore Leonard.

ConFuCkamuS
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le 9 août 2021

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