Buk, le vieux salaud à cinquante ans.

Cinquante années de bitures, baises, bières, portos, vomis, errances, emprisonnements, insultes, bagarres, poèmes, cuites, whiskys à l'eau, nouvelles, romans, crises de foie, rencontres, déceptions, injures, voyages, pauvreté, amours, amitiés, des meilleurs et des moins drôles.

Fataliste ou optimiste, il ne s'en donne plus que trois à vivre. L'histoire lui donnera tort et l'heure du jugement dernier est encore loin pour le brave homme. En attendant ce grand jour, il écrit. Comme il s'aime plus qu'il ne veut bien l'avouer et se juge positivement intéressant, il écrit beaucoup sur lui-même. Grand adepte de l'autofiction devant l'éternel, Bukowski aime à mêler son truculent vécu à son imaginaire. Pittoresque l'imaginaire. Le vécu aussi. Difficile de discerner le faux du vrai. Tant mieux. C'est précisément ce qui fait le charme inimitable de ses nouvelles.

Parfois la fiction prend le dessus (le petit ramoneur). Il faut bien justifier le titre. "Contes...". Que les sceptiques se rassurent, si conte il y a, il n'en demeure pas moins l'oeuvre du sale Bukowski. Conte moderne et salace, il fait honneur à la réputation du bonhomme et la sorcière en présence n'aura jamais droit de cité dans la littérature enfantine.

Bukowski c'est aussi et surtout l'humour. Un humour noir, souvent froid, porté sur l'autodérision mais irrésistible. Là où il eut été aisé de s'apitoyer, Charles Bukowski fait de la comédie humaine, dont il est le spectateur, une succession d'hilarantes scénettes.

Plus qu'un recueil de nouvelles, "Contes de la folie ordinaire" est le témoignage d'une époque. L'Amérique des années soixante vue par les miséreux, les marginaux. Bien loin du rêve américain.
Bukowski est le messager des oubliés, ceux que les biens pensants ne veulent pas voir. Avec l'absence de tact qui le caractérise, il balance à la face du monde l'histoire vraie du quotidien des pauvres âmes qui se tuent aux travail et noient leurs souffrances dans l'alcool bon marché.

Et il engendre un enfant mi-homme, mi-tigre sur la fin.
-IgoR-
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le 18 févr. 2014

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-IgoR-

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