C'est terriblement mal écrit. Peut-être mal traduit (aucun petit garçon ne dit plus "Chic !", Mme Zimmerman), mais surtout terriblement mal écrit. Quand un auteur essaie de faire du style pour faire du style, cela se sent et cela agace ("Le vent s'entretint encore longuement avec les gouttières, p. 19 ; "la lune apparut tel l'oeil blanc à demi-clos d'un cadavre", p. 21). Sous couvert de réalisme, Stephen King ne nous épargne pas les détails gratuits et superflus qui témoignent d'une insigne maladresse : "elle commanda un sandwich chaud au pastrami pour lui, et une pizza aux poivrons et aux oignons pour elle", p.199 - bien sûr, il ne sera plus jamais question de pizza ni de sandwich dans le bouquin. Si l'on ajoute à ça que les psychologies de certains personnages, Joe Camber non seulement, sont sommaires et caricaturales, on comprendra que la lecture des 200 premières pages soit particulièrement éprouvantes. Et puis vers le milieu du livre, l'auteur a un moment de grâce : tout s'accélère, les personnages acquièrent plus de consistance (ou, plus exactement, le récit se focalise sur des personnages plus élaborés, comme le père de Tad), le récit devient haletant malgré ses ingrédients minimalistes (une mère et son fils coincés dans une bagnole en plein soleil avec un chien enragé à l'extérieur). On surprend même Stephen King à manier de belles images (à propos de Cujo : ses yeux semblaient pleurer des larmes de colle, ou quelque chose dans ce goût-là), mais de toute façon qu'importe : on est trop pris par l'histoire pour s'y arrêter.
Au final, bilan mitigé, donc. C'est insupportablement long à commencer, c'est beaucoup mieux vers la fin ; ce n'est jamais bien écrit, mais c'est bien construit (au moins dans la seconde moitié du roman). Globalement, j'en garderai plutôt un bon souvenir, même si ma note reflète aussi mon manque d'enthousiasme à l'égard de tout le début.