Qui sème le vent...

C'est fou comme un cyclone peut faire tourner des têtes. En plus de les cumuler, la Floride doit se coltiner les charognards qui se goinfrent sur ce qui reste du dos de la bête. Un sujet pour le moins sulfureux dont s'empare Carl Hiaasen pour livrer une énième peinture délurée de sa région de cœur (il y est né et y réside toujours). On croisera donc la route d'escrocs, d'un publicitaire peu scrupuleux, d'un ermite légendaire, de pas mal d'animaux exotiques éparpillés et d'une mariée un peu paumée au milieu de ces égarés. Pas de panique, Hiaasen file droit et on parcourt ces 500 pages avec un sourire aux lèvres. L'écrivain trouve le juste milieu entre les situations abracadabrantes et la toile de fond hélas très crédible. Là où Queue de Poisson accuse quelques longueurs (malgré le plaisir), De l'orage dans l'air lance suffisamment de trajectoires et contient assez de rebondissements pour faire rebondir l'intrigue à intervalles réguliers. L'auteur prend le temps de travailler ses personnages qui auront tous un caractère bien défini. Évidemment, les moins recommandables lui servent pour taper sur le cynisme et la rapacité du genre humain, l'excroissance monstrueuse d'un libéralisme débridé où à quelque chose malheur est bon. Se refusant à plier devant de tels énergumènes, Hiaasen révèle leur petitesse ou leur croyance pathétique (le contrôleur Avila) et leur réserve un sort des plus sarcastiques. Après en avoir lu deux ouvrages, je réalise que le romancier semble plus intéressé par ses personnages féminins. Bonnie en premier lieu, une jeune mariée en pleine crise qui veut garder la tête froide. Mais également Edie Marsh, certes moins vertueuse mais pas dépourvue d'humanité...ou de verve (plusieurs de ses réparties sont à se tordre). Parmi les personnages secondaires, il faut signaler la présence de l'excentrique Skink (personnage récurrent chez Hiaasen), qui est aussi insolite que fascinant. Attendez de lire son parcours personnel...Puis l'expert d'assurance Fred Dove dont la probité sera sujette à fluctuation dirons-nous, et là on peut en rire. Une très bonne comédie qui déménage.