(avertissement : je n'ai lu que du côté de chez Swann, je ne sais pas ce que vaut le reste)
Proust, c'est le genre d'auteur que je ne lis pas spontanément. En fait, il a fallu que le hasard du programme de prépa le mette sur la liste des bouquins à lire, aux côtés de livres assez médiocres. A priori donc, c'était mal parti. Et pourtant, je me suis retrouvé bien malgré moi à le dévorer.

Proust, c'est avant tout un style de narration à part. Le premier tome n'est qu'une gigantesque disgression autour de ses souvenirs d'enfance. Dès le début, on est mis dans l'ambiance. Sur une dizaine de pages, il évoque le sentiment de désorientation qu'il ressentait au réveil, étant petit. Il enchaîne de façon plus ou moins aléatoire sur le thème de son enfance, et il y livre l'analyse a posteriori de ses jeunes années avec une candide sophistication qui nous fait complètement oublier qu'au final, c'est l'histoire d'un milieu aristocrate dans lequel rien n'arrive (l'évènement le plus spectaculaire doit être la pluie ...) Le second tome est plus classique, et raconte l'amour et la jalousie de Swann. Là encore, rien de bien spectaculaire, mais au moins ça colle déjà plus avec le schéma classique d'un roman.

Ce qui frappe chez Proust, c'est la précision de son écriture. Chaque métaphore est pesée, ciselée, et emballée avec méthode, et les constructions de phrase utilisent toutes les possibilités de la langue française pour articuler le raisonnement (à tel point qu'il vaut mieux être bien réveillé pour ne pas perdre le fil d'une phrase en cours de route). Son analyse des sentiments humains est bien plus poussée que tout ce que j'ai pu lire ailleurs. Toute parole est analysée, explicitée et replacée dans son contexte.

Au fur et à mesure, on apprend à se laisser porter par son regard aiguisé et inquisiteur et à apprécier le livre pour ce qu'il est, un fantastique étalage des capacités d'analyse et du recul de son auteur. Il ne faut pas y chercher d'idées novatrices ou d'images puissantes, simplement le regard d'un homme sur son entourage et sa vie. Par la magie de la littérature, on tranpose aisément les situations parfois ridicules du début du siècle, et on y découvre des vérités universelles qui nous permettent de mieux nous comprendre.
antoinelevitt
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le 4 sept. 2011

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