Visiteur intrépide du Belfast de la dernière décennie du XXème siècle, pénètre dans Eureka Street, l'archétype de la rue prolétaire du Belfast protestant, avec précaution, tu risques d'y laisser des plumes et des larmes, surtout si tu es catholique.


Peut-être croiseras-tu le chemin de Chuckie Lurgan, le "Gros Cinglé", le type pas propre sur lui qui sait arnaquer comme personne et qui est devenu milliardaire malgré lui ? Ou si tu préfères diriger tes pas vers Poetry Street, tu rencontreras Jake Jackson, le gros dur catholique, et son chat. Jake te parleras peut-être de son spleen et t'inviteras à boire une pinte au pub, histoire de tomber amoureux d'une énième serveuse à la petite morale.


Dans les deux cas, cher visiteur, ta plongée dans Belfast sera rude, amère, tumultueuse voire mortelle si tu te trouves au mauvais endroit au mauvais moment, plus précisément au moment où explosera une des innombrables bombes qui explosent dans cette ville terrorisée par le terrorisme.


Lire "Eureka Street" aujourd'hui, c'est-à-dire dans le contexte de menace permanente que connaît l'ensemble des capitales européennes, donne à la lecture une acuité toute particulière. La violence des groupuscules - ici Catholiques et Protestants - heurte puis devient rapidement banale. A travers une année passée auprès de Jake, Chuckie et leurs potes, dans les bars, les rues, les émeutes, on prend le pouls de ce que fut Belfast pendant des décennies, un creuset bouillonnant où les illusions et les quêtes entraient brutalement en collision.


L'écriture est assez particulière mais rend bien compte du climat délétère et des aspirations profondes des nombreux personnages. Au final, la paix triomphera-t-elle de la guerre ? Et l'amour de la haine ?


Avant de lire ce roman, je n'avais qu'une vision très imprécise de la lutte civile acharnée qui a divisé l'Irlande et l'Irlande du Nord ; désormais j'en sais un peu plus, et j'ai la désagréable impression que cette violence reste hélas d'actualité sur d'autres fronts. Depuis 2015, je me sens un peu Irlandaise du Nord, quelque part...

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le 11 juil. 2017

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Gwen21

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