Je saute allègrement Incendies (un peu par paresse et parce qu'entre la pièce et le film, on a dû en faire le tour) et j'entre directement à l'intérieur de ce Forêts, dense et ambitieux qui, au sein du Sang des Promesses, est clairement l'aboutissement des deux pièces précédentes.

A l'instar d'Incendies, l'intrigue est le coeur de la pièce, aussi tortueux et torturé que sa prédécesseure, et d'ailleurs prend le même point de départ, celui du décès de la mère exhumant des secrets de famille complexes et obscurs. En l’occurrence, tout est déclenché par la présence d'un os dans le cerveau d'Aimée, emportée par une tumeur. Sa fille, Loup, une adolescente en pleine crise existentielle, essaie donc de retracer sa généalogie afin de comprendre. Pour cela, elle sera accompagnée par le paléontologue Douglas Dupontel. Dès lors, on est plongé dans un enchevêtrement de générations plus ou moins dégénérées qui filerait le cafard à n'importe quelle personne un tant soit peu équilibrée apprenant qu'elle en descendrait.

Forêts est juste impressionnant et géré avec maestria. Avec toutes ces branches qui s'entremêlent, Mouawad a créé une pièce cohérente et surtout marquante, une succession de tragédies qui arrive à laisser un peu de place à la légèreté via le duo improbable que forme Loup et Dupontel. A ce niveau-là, Forêts est beaucoup moins aride qu'Incendies. Mais j'ai l'impression que Forêts perd en propos : c'est tout bête, mais après deux pièces qui évoquaient une jeunesse ravagée par la guerre, la colère de Loup paraît beaucoup plus futile, la faisant juste passer pour une emo qui doit passer le cap de l'adolescence.

Je ne découvre pas Forêts, j'ai vu sa mise en scène et déjà, à l'époque, j'en étais sorti bluffée. Et quelques années plus tard, en lisant la pièce, je me retrouve dans le même état. Si je lui reproche de manquer de message, c'est surtout par rapport aux autres composantes de la saga. Sinon, en tant que tel, ça reste une claque.
Nolwenn-Allison
8
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le 12 oct. 2014

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Nolwenn-Allison

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