Benoît vit dans le Nord de la France, il est issu du milieu ouvrier. Son père est syndicaliste à l'usine. A l'école ses congénères l'ont baptisé l'autiste. Il s'arrête souvent à la chapelle devant la statue de la Vierge Marie. Il est fasciné.


A 12 ans il s'enlise dans sa scolarité, il se cultive à sa façon, sa lecture préférée est la Bible.


A 16, il quitte l'école pour travailler à l'usine.


Un jour, Benoît laisse une lettre et de l'argent à sa mère pour ses frères et soeurs. Il emporte avec lui pour seul bagage, l'écharpe de son père (emporté par un cancer), une Bible, un opinel et un duvet.

Il part sur la route, pèlerin à l'image de Saint-Benoît.


Il traversera la France du Nord au Sud en passant par les cathédrales Notre-Dame entre autre. Il se nourrira comme un cueilleur préhistorique de fruits et légumes crus. Il vivra avec la nature, prêt à souffrir pour aimer, accordant le pardon à ses agresseurs, donnant ce qu'il récolte à plus pauvre que lui, il partagera l'aumône qu'il reçoit dans les troncs des églises Comme Saint Benoît, il marchera des jours entiers, entrant toujours en contemplation avec la nature.


Ce récit sur la spiritualité, un peu mystique est écrit de manière poétique. Folie, candeur, un portrait touchant empreint d'humanité.


J'ai trouvé ce cheminement à travers la France et à travers sa foi; juste, reposant.


L'écriture est magnifique, j'ai vraiment passé un excellent moment de lecture.


Ma note : 9/10


Les jolies phrases


Benoît traverse des villages sans éclat, des bourgades où l'ennui suit son cours. Il n'a plus un sou en poche. Il a atteint son idéal : le voilà pauvre, affamé, sans autre issue que la charité.


Ce qu'éprouve Benoît à l'endroit de son père n'a pas de nom. Il est le tuteur de noisetier, la rigole creusée pour irriguer les jours, le cordeau de filasse qui délimite la terre. Quand il récite le Notre Père, c'est le visage du sien qui s'anime sous ses paupières.


Son bonheur est complet lorsque sa mère, libérée du joug, s'évade, les coudes sur la table de la cuisine, en parcourant des romans de plage aux intrigues ficelées d'un ruban rose. Bovary du borinage, fée du logis sans baguette magique, maman s'ennuie et se résigne.


La prière est pour lui une ivresse sans cesse renouvelée. Si Benoît était un junkie, nous dirions qu'il se défonce sans répit, s'injecte des extases en intraveineuse. Mais l'amertume qui succède à la piqûre, la perte qui obstrue l'aiguille lui sont inconnues. Sa drogue est idéale, il n'en manque jamais.


L'homme au sifflet se relève, empoussiéré des pieds à la tête. "Merci. Vous êtes berger ?
- Je suis chrétien, c'est un peu la même ", répond benoîtement Benoît en caressant l'encolure d'une brebis.


La joie d'être sur le chemin. La joie de n'être qu'un passant. Joie de ne rien posséder et de n'être possédé par rien. LA JOIE D'ÊTRE NU. Entièrement nu. Nu dans son entier. Nu face au vent, nu face au destin, nu face à la joie.


Benoît n'a plus de raison de vivre, ni aucune envie de mourir. Les dunes, à ses pieds, sont de simples châteaux d'enfant. Il marche vers un soleil renouvelé, un jour unique, où tout prend sens, chaque respiration, chaque foulée.


Benoît est le roi du monde, un monarque crasseux. Dire qu'il empeste n'est pas suffisant. Son parfum est complexe, dense, feuilleté de strates olfactives. D'abord une senteur de gravier, d'humus, d'écorces poussiéreuses. La fragrance se prolonge d'un coeur floral : colchique décomposé, armoise, sauge amère, une nuance de sainfoin ou d'orge humide. Ensuite, le suint, le musc se mêlent à des effluves sucrés : spéculoos écrasé, canne à sucre trop mûre. La sueur apporte sa touche d'acidité sa touche d'acidité, aussitôt confondue dans les miasmes de tourbe et de lichen. Enfin, une persistance iodée, une note saline, fumet de laminaires abandonnées sur la grève. Benoît se hume comme un single malt, fleuron d'Islay, un breuvage endeuillé, que les Écossais boivent les yeux clos, en songeant aux marins engloutis.


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NATHAVH
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le 24 mai 2018

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