Ernest Lavisse, le chantre du Roman National, c'est pas n'importe qui. C'est un monsieur qui à construit l'imaginaire de millions de français sur les bancs des écoles depuis sa création jusqu'à la Libération (ce ne sont pas les dates exactes, je grossit les traits).


J'aurais adoré pouvoir me délecter de sa plume vibrante d'un patriotisme paternaliste naïf (pour ne pas dire niais) mais néanmoins touchant et surtout à replacer dans le contexte du début du siècle. Car ce livre est pour l'historien ce que le nanard est au cinéphile : un plaisir absolu pour qui maîtrise un tant soi peu les codes de l'une ou l'autre discipline.


Les gravures (magnifiques) idéalisant au maximum le panthéon des héros nationaux rejoignent le cortège des images d’Épinal en frôlant les cieux du Kitsch.


Entre deux vies de saints dans un manuel édité après la séparation de l'Eglise et de l'Etat, on croise des personnages hauts en couleurs (à défaut de pouvoir toujours être historiques) y aller chacun de leur petite punchline plus ou moins fantasmée par l'auteur (ex: Clovis apprenant le calvaire de Jésus : "Ouh, si j'avais été là, ça ne se serait pas passé comme ça !").


Au niveau de la pédagogie, on nage dans les fosses de la subtilité. Au cas où les élèves ne comprendraient pas la morale qui accompagne le savoir dispensé dans ce manuel, des paragraphes en italiques viennent constamment rappeler au lecteur ce qu'il censé penser (ex: "Les petits gaulois n'allaient pas à l'école, vous n'auriez pas aimé être comme ses enfants-là, n'est ce pas ?" Il valait mieux pour les élèves de l'époque savoir distinguer une question rhétorique !).


Bref, des crampes de rire et une profonde tendresse pour ce manuel qui sent bon les produits du terroir.


Mais alors pourquoi ce livre doit-il laisser un goût aussi amer de malhonnêteté intellectuelle à la fin d'une lecture qui avait, jusqu'ici était si savoureuse ?


Parce que non content de nous dispenser un pamphlet en guise de préface, un certain Casali, sans doute un élève du XIXème siècle s'étant perdu entre les pages du manuel, nous gratifie de chapitres bonus pour poursuivre le projet de Lavisse jusqu'à nos jours (nos si sombres jours bien sûr).


Le projet en lui-même : de quel droit un historien s'arroge-t-il le droit d'écrire la suite de l'ouvrage d'un autre ? Imaginez si Marc Lévy entreprenait d'écrire la suite du Seigneur des Anneaux.


Ensuite, et même si c'est précisé en petit sur la couverture, j'aurais préféré éviter que ma lecture ne soit gâchée par la science fiction de l'élève Casali. Non parce que vouloir écrire l'histoire d'un pays comme l'aurait écrit un auteur mort depuis maintenant presque 100 ans, c'est de la science-fiction. Ou de la schyzophrénie, mais je plancherais surtout pour une tentative de greffe insidieuse du discours politique de Casali sur l'oeuvre de son idole. Il en résulte une sorte de manuel de Frankenstein, un Cheval de Troie pour un piètre historien réduit, pour continuer de toucher son chèque, à parasiter l'oeuvre des autres.


Si vous aimez les beaux et vieux livres d'histoire de France, évitez de donner vos deniers à une entreprise aussi malhonnête et allez plutôt faire le bonheur d'un brocanteur.

Wolman
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le 30 nov. 2016

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