Passe à autre chose. Pas toi, lecteur, le roman n'est pas inintéressant, mais toi, l'héroïne de ce roman.
C'est un peu ce qu'on a envie de dire à Lenu, en effet, tout au long de son enfance et de sa relation avec le personnage de Lila.
C'est une relation assez ambiguë, pleine de rivalités, de ressentiment, d'admiration, à la je t'aime, moi non plus, suis-moi je te fuis, fuis-moi je te suis. Si elle n'est pas inintéressante, loin de là, le problème est qu'elle est répétée toutes les dix pages dans le roman. A chaque nouvelle situation (Lenu progresse à l'école, Lenu a un amoureux, Lenu part en vacances...) on a toujours le contrechamps avec "mais je suis moins bien que Lila" et cette dernière garde un ascendent psychologique à chaque page. Sauf qu'au bout d'un moment, on a compris, et il y a une surenchère continue, qui, si elle peut servir le propos du livre (une admiration / dépendance même dans les plus grandes réussites de l'héroïne) finit par agacer le lecteur. On n'en peut plus de voir cette Lila autant électriser tout le monde autour d'elle sans que jamais personne ne semble lui résister. Que le roman soit autobiographique ou non, je m'en fiche, mais on peine à comprendre comment cette situation a pu rester la même pendant, environ, dix ans, sans que jamais cette hégémonie ne soit vraiment remise en question. Car le lecteur ne sera plus jamais surpris à partir du moment où il a compris le schéma narratif de l'oeuvre.
Du coup, je trouve la première partie du livre intéressante et bien racontée, la seconde vraiment très répétitive, car sur le même modèle, et j'étais pressé de terminer le livre.
Finalement, je me demande si le roman ne passe pas à côté d'un autre sujet qui m'aurait plus intéressé, et qui finit par pointer le bout de son nez à la fin du livre (je suis malhonnête, il traverse tout le roman mais de manière discrète, disons qu'il n'est nommé qu' à la fin) : comment se sortir de ce milieu de pauvreté, de petite délinquance, d'un monde finalement assez "détestable" avec une famille peu aimante ou qui ne le montre pas, avec une violence physique et pscyhique, un machisme ambiant... Le livre montre que l'héroïne, à la toute fin du livre, a au moins grandi sur cet aspect là : avoir un regard plus juste sur ce qui l'entoure. Non, tous ces garçons violents ne sont pas une fatalité, ces disputes incessantes non plus... Il y a une possibilité de s'en sortir. L'héroïne ouvre finalement les yeux sur ça, mais pas réellement sur sa relation avec Lila.
Le roman ne m'aura pas donné envie de lire la suite (c'est, je pense, un signe), tant j'ai l'impression que les tomes suivants seront sans surprise, avec Lenu à d'autres instants de sa vie, mais toujours en comparaison avec son amie qu'elle admire (qu'elle aime ?).
Bref, le livre n'est pas mauvais, mais peut-être qu'à vouloir être trop autobiographique, l'auteur peine à vraiment accrocher le lecteur par moments, qui finit exaspéré par les personnages principaux, et lassé par un schéma narratif très répétitif.
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