Le paléontologue déchu Mitch Rafelson découvre au fond d’une caverne des Alpes suisses, trois corps préservés par le froid, une famille préhistorique néandertalienne, dont l’enfant semble curieusement moderne. Pendant ce temps, Kaye Lang, jeune généticienne surdouée, suit les traces d’un mystérieux virus, SHEVA, qui provoque un nombre croissant de fausses couches. Selon elle, la partie silencieuse de nos gènes contient d’anciens virus susceptibles de s’éveiller, et il semble que SHEVA soit l’un d’eux. Quand la possibilité d’une pandémie à l’échelle mondiale est évoquée, Kaye est embauchée par Christopher Dicken, du Centre de Contrôle des Maladies. Le mystère s’épaissit encore quand on découvre que le virus est transmis aux femmes par les hommes, et que le fœtus avorté ovule avant la fausse couche, et provoque quelques semaines plus tard une seconde grossesse chez la mère, sans relation sexuelle. Le nombre de fausses couches continue d’augmenter, l’angoisse grandit au sein des populations, et les gouvernements exigent des réponses rapides de la part du corps scientifique. Mais Kaye et Mitch partagent la même intuition : cette maladie n’en est peut-être pas une, car elle pourrait être la manifestation d’un mécanisme d’évolution.


L’Echelle de Darwin est un roman de hard science et un thriller d’exobiologie. Autant dire qu’il ne s’agit pas d’une lecture facile. Le lecteur doit en effet s’attendre à une bonne dose de termes techniques relatifs à la génétique, et une bonne connaissance dans ce domaine aideront à saisir toutes les subtilités du récit. Le livre est d’ailleurs accompagné par un lexique technique et par un bref précis de biologie qui explique les bases des connaissances actuelles en génétique. Mais cette tentative de vulgarisation est un fiasco total, le lexique définissant les termes techniques par d’autres termes techniques non définis, et le précis de biologie perd les non-initiés à la deuxième phrase. Le lecteur qui ne dispose pas des connaissances nécessaires devra donc se résoudre à être un peu perdu dans certains passages, même si on parvient toujours à garder le fil du récit.


La lecture est également rendue difficile par un sérieux problème de rythme. L’introduction est beaucoup trop lente et surtout beaucoup trop longue, des chapitres entiers sont totalement inutiles. Le corps du récit est aussi très lent, le gros de l’action étant situé dans des salles de réunion. La dernière partie du roman est plus dense, mais elle est aussi très frustrante, l’histoire s’arrêtant pile là où on a l’impression qu’elle devrait réellement démarrer. L’auteur publiera d’ailleurs une suite quatre ans plus tard, intitulée Les Enfants de Darwin.


Comme trop souvent dans les romans de hard science, les conséquences humaines des aspects scientifiques passent au second plan. On croise ainsi des foules en colère, des émeutiers, des illuminés de tous bords, des responsables politiques, des docteurs et des infirmières, dont on ne parvient jamais à partager les sentiments, les angoisses, les colères ou les doutes. Les rapports humains entre les différents personnages du récit sont très prévisibles, des premières pages jusqu’à l’épilogue, et si l’auteur maîtrise à l’évidence les aspects scientifiques de son histoire, l’explication générale qui sous-tend l’ensemble est vraiment très faible, à peine mentionnée, et de façon très superficielle (sans dévoiler une trop grande partie de cette explication : la mutation génétique à cause du stress de la vie moderne…).


Malgré tous ces défauts, L’Echelle de Darwin reste une lecture intéressante : Bear interroge les différentes conceptions de la théorie de l’évolution, introduit le rôle de la génétique à l’échelle de l’évolution de l’espèce, et produit finalement un virus-thriller plutôt prenant, à défaut d’être une totale réussite. On est fasciné et terrorisé par cette pandémie qui pourrait menacer l’espèce humaine, par ses répercussions politiques (qui, elles, sont plutôt et malheureusement crédibles), et on referme ce livre avec l’intention d’en lire la suite prochainement.


Nominé pour le Prix Hugo du meilleur roman en 2000, L’Echelle de Darwin n’est pas un chef d’oeuvre, loin s’en faut, mais ne laissera indifférent aucun amateur de hard science biologique. Pour les fans de thrillers ou de SF qui ne sont pas versés dans la génétique, il faudra s’accrocher un peu.


https://olidupsite.wordpress.com/2018/06/09/lechelle-de-darwin-greg-bear/

OliDup
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le 9 juin 2018

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