Sexe, magie et philosophie !
Ma passion pour la saga vidéoludique "The Witcher" m'a poussé à continuer ma lecture du second recueil de nouvelles écrit par Andrzej Sapkowski et je n'ai pas été déçu !
Dans ma critique du premier recueil, je reprochais cependant une magie de foire un brin trop envahissante surtout après avoir été nourri aux approches de la Fantasy d’un Tolkien et d’un George Martin avec la présence discrète, dans un monde médiéval fictif, d'une magie qui n’en devient que plus intense à son apparition. Ou pour reprendre les mots de George Martin lui-même : "la magie doit être dosée comme l’épice dans un plat; bien dosé, le plat aura meilleur goût, trop ça le rend immangeable".
Pourtant, dans la plupart des nouvelles d'Andrzej Sapkowski (souvent des parodies de contes populaires ou le détournement de poncifs de la Fantasy), l'utilisation de la magie est bien souvent au service d'un humour qui fait plaisir à voir ! Particulièrement dans un genre qui a tendance à se prendre trop au sérieux (ou pas assez).
Et là, j'ai rarement ri autant en lisant de la Fantasy ! (A ce titre "Les Limites du possible" et "Le Feu éternel" sont des nouvelles à se pisser dessus, vraiment !)
Cette présence importante de la magie et de l'humour n’enlève rien au propos ou à la force des thématiques abordés, Andrzej Sapkowski dépeignant un univers résolument sombre et adulte, rejetant tout manichéisme et introduisant pas mal de réflexions sur des sujets universels qui trouvent un certain écho à notre époque : différence, racisme, intégration, survie, écologie,... Et à la Fantasy de Sapkowski on pourrait presque appliquer la définition de James Cameron pour la Science-Fiction: "ce n'est pas tant un moyen de projeter notre futur que de réfléchir notre présent" (la nouvelle "L'épée de la providence" qui est aussi le titre du recueil, m'a d'ailleurs fortement fait penser à Avatar avec des Dryades à la place des Na’vis).
Et notre ami, Geralt de Riv, tueur de monstres de son état, censé protégé les humains, a toujours le cul entre deux chaises, tiraillé entre sa conscience et sa nature de mutant et les intérêts des uns et des autres, humains et non-humains. Les dilemmes auxquels il est confronté en font un personnage complexe qui s'éloigne de tous les archétypes qui pullulent dans le genre.
On pourrait même reprocher à Sapkowski de philosopher parfois un peu trop et le titre de la nouvelle qui est aussi la thématique abordée est souvent répété au cours de la lecture de manière quelque peu abusive.
Pourtant peu d'auteur de Fantasy on réussit ce mélange de magie, d'humour, de philosophie et même d'érotisme !
A l’instar d’un Tolkien avec la dernière partie de son « Hobbit », j’ai trouvé que les deux dernières nouvelles du recueil contenaient un peu moins d’humour et que le ton y était résolument plus sombre, prélude à la saga des cinq romans suivants qui ne sont plus des séries de courtes aventures mais constituent bel et bien la grande épopée de Geralt de Riv.
Dommage qu'un auteur de Fantasy comme Sapkowski ait été presque inconnu chez nous avant l'arrivée des jeux vidéos "The Witcher". Et même si à la lecture de ce second recueil le monde d’Andrzej Sapkowski n’atteint pas encore la richesse et les détails des mondes créés par un Tolkien ou un Martin, le charisme des personnages et les sujets abordés viennent largement compenser ce manque. J’ai donc hâte d’entamer les romans maintenant !