Serge Grivat est ce qu'on appelle communément un loser, un galérien. Mais ça ne va pas durer. Rien ne va plus durer. Tout va s'interrompre.


Alors qu'il est sur le point d'allumer une cigarette, cet auteur de BD sans le sou, sans projet, sans avenir et, depuis peu, célibataire, sort de sa veste un briquet qu'il n'a pas souvenir d'avoir jamais empoché. À défaut de produire une flamme, le mécanisme stoppe la course du temps. Le monde entier est figé. Le monde entier, sauf lui. Un autre coup de molette et le temps repart. À volonté. Peu importe comment, peu importe pourquoi, le briquet contrôle le temps.


L'auteur fait le choix de confier cette responsabilité à un personnage perclus de défauts, revanchard, égoïste, obsédé, insatisfait, et qui, doté de ce pouvoir incroyable, voit là la porte de sortie à la frustration dans laquelle il végète depuis trop longtemps. Il s'autorise alors à céder aux caprices les plus indécents... Argent, luxure, bombance, tout est permis, même l'inavouable. Comme on peut s'y attendre, il bascule rapidement dans le "politiquement incorrect", ce qui créé un sentiment double chez le lecteur qui, d'un côté, considèrera certainement que Serge Grivat abuse de ce pouvoir qu'il ne mérite pas et qu'il gaspille, mais qui, d'un autre côté, éprouvera sans doute quelque chose de jouissif à le voir braver les interdits et agir avec une telle liberté.


Finalement, en même temps que le personnage, le lecteur réalise qu'il y a un prix à payer pour un tel pouvoir. Cette idée n'est n'est pas très creusée mais elle a le mérite d'ouvrir une piste de réflexion pour ceux qui aiment à multiplier les niveaux de lecture. Toutefois, c'est moins ce point que l'aspect résolument décomplexé de ce roman que j'en retiendrai : avant de donner une direction inattendue à son intrigue et à y injecter une dimension fantastique, l'auteur s'affranchit de tous les filtres, s’engouffre dans des brèches honteuses, fait fi de la bienpensance et n'hésite pas à choquer. Il semble y prendre beaucoup de plaisir et ne se prive pas de le communiquer.


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TmbM
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le 28 sept. 2023

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