Un livre à lire d'une traite
C'est vrai qu'il est poétique, ce bouquin, à débuter sur un mystère que les traditions africaines ne savent pas expliquer. On partage l'incompréhension face à un monde qu'on n'a pas vu changer puis on réalise qu'il est trop tard, qu'il s'est fait sans nous, qu'on n'a plus rien à faire. La mécanique infernale est rendue à la perfection, ce n'est pas sur son portrait de la fatalité que ce livre pêche.
Le bât blesse plutôt sur ces répétitions rendues légitimes uniquement parce qu'elles s'agrémentent à chaque fois d'une donnée supplémentaire. Les divers témoins traversent les mêmes révélations, parfois les mêmes doutes qui lient cohérence à la redondance, les écueils à la fluidité, le tu et le rabâché dans une oeuvre qui pousse l'oxymore jusqu'à mêler l'introspectif et le lointain. La malédiction est machinale, l'incapacité des protagonistes est telle qu'on s'en détache lentement, seuls quelques durs passages, ceux qui évoquent le crépuscule d'une culture ravagée par l'Histoire, crispent réellement. Le reste, trop littéraire, parvient difficilement à communiquer l'effet de la violence sur ses victimes.