Ce onzième roman de la saga Charlie Parker nous emmène dans un petit bled paumé du Maine. Deux histoires se déroulent en parallèle, et pendant longtemps, on se demande ce qu'elles peuvent bien avoir en commun. Dans la première, le détective hanté par la mort de sa femme et sa fille enquête sur la disparition d'une adolescente de 14 ans à Pastor's Bay. Depuis sa sortie de prison, l'assassin d'une autre jeune fille vit dans cette bourgade sous une nouvelle identité, et pour tenter de démasquer l'inconnu qui le menace de dénonciation, il fait indirectement appel à Parker. Dans la seconde histoire, on suit la cavale désespérée de 3 mafieux condamnés à courte échéance par le nouveau parrain en place.


Si John Connolly m'a enchanté avec ses certains de ses précédents polars, celui-ci est clairement un cran en-dessous. On sent l'auteur irlandais en pilotage automatique, et pendant plus de 350 pages, l'intrigue fait du surplace. Charlie Parker progresse peu dans son enquête, et l'arrivée de Louis et Angel est désormais trop prévisible et systématique. Un peu comme Joe Pike dans les romans de Robert Crais, ils semblent invincibles, et ils ont un peu trop tendance à être toujours là au bon moment pour sauver leur ami in extremis. Pire, on ne ressent plus rien pour eux, comme si John Connolly les avait désincarnés à force de trop les faire revenir. Idem pour les frères Fulci, qui font une apparition aussi brève qu'inutile.


Le style est également parfois un peu lourd, et à plus d'une reprise, j'ai dû relire tel ou tel passage car la tournure manquait de simplicité. Ce n'est pas que Connolly soit un mauvais écrivain, bien au contraire : c'est juste qu'il a un peu trop tendance à se regarder écrire, et cela oblige le lecteur à être toujours parfaitement concentré pour saisir le sens de chaque phrase. Par exemple, tout ce qui concerne les corbeaux sadiques ou les fantômes des jeunes filles aurait pu être coupé à la relecture sans que cela n'affecte en rien l'intrigue. Ce recours gratuit au fantastique est un défaut récurrent chez lui, mais il était autrefois compensé par des histoires en béton armé.


Les multiples twists des 50 dernières pages redonnent toutefois un peu de peps à l'ensemble, mais question crédibilité, on repassera. Il y a trop de coïncidences bienheureuses, et surtout trop de personnages qui vivaient sous une fausse identité ou qui cachaient de lourds secrets. Harlan Coben, sors de ce corps ! Cela dit, il faut dire que le sujet abordé dans ce livre est particulièrement sensible, et si on sent que les affaires Kampusch et Fritzl ont fortement inspiré l'écrivain irlandais, il est difficile pour n'importe quel auteur (aussi talentueux soit-il) de construire une histoire crédible sans tomber dans le glauque.


Au final, La Nuit des Corbeaux est un roman correct mais qui met trop de temps à démarrer. John Connolly nous parle longuement de la difficulté à se réinsérer dans la société après avoir commis l'irréparable, et il en oublie presque de faire avancer son intrigue. On ne passe jamais un mauvais moment avec Charlie Parker et ses acolytes, mais Connolly nous ayant régulièrement habitués à l'excellence, cela nous rend forcément très/trop exigeant vis-à-vis de son œuvre.

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le 15 mai 2015

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