La première question que je me pose en débutant ce roman : "Est-ce que ce livre est vraiment autobiographique ?" Parce que si c'est le cas, j'aurai aimé en faire autant avec ma propre famille : grande famille non pas juive mais catholique profonde, ma grand-mère placée en EHPAD depuis un peu plus d'un an, la volonté de certains de la sortir absolument de cet endroit pour quelques heures pour se déculpabiliser d'une certaine façon d'avoir été "obligé" de faire ce choix, combien ça va couter, l'héritage qui va en prendre un coup, la maison vendue, et ceux qui se sont déjà servis... Tout le monde s'aime en apparence, mais la critique est facile pris en individuel. Je ne prends pas parti pour les uns ou les autres, la famille reste sacrée ... sacrément compliquée !!!


Sophie Delassein n'a pas la langue de bois, tout y passe : humour noir, sarcasme, blague anti-juif (je pense qu'elle n'a pas du se faire beaucoup d'amis...), antivieux et même anti-épilation, tout est balayé au même niveau et finalement ça fait du bien d'avoir briser les barrières des codes sociétales pour s'abandonner aux vrais réflexions que nous nous faisons bien à l'abri de notre esprit. Sophie Delassein dit simplement tout haut ce que tous nous pensons tout bas : Maman on t'entend !!!


Mais sous cet humour grinçant, la réalité rattrape la fiction. L'auteure tape fort pour décrire des scène quotidiennes comme celle où elle compare les hommes et les femmes qui travaillent dans les EHPAD avec ceux qui sont juste que des bobos fatigués buvant leur Nespresso pour se remettre de leur soirée jetset.


Un zoom sur la place de "nos vieux" dans notre vie. que doit-on faire d'eux ? Quels sacrifices sommes-nous prêts à faire pour eux, leur confort, leur bien-être mais qui cache finalement notre propre confort, notre bien-être.


Personne ne veut vieillir, personne ne veut devenir ces êtres laissés de côté, mais la vieillesse est inévitable et prendre ces décisions, elles aussi, le sont. En fait, on ne veut pas faire bien, on veut faire moins pire. Dans ce livre, Sophie Delassein nous décrit ses choix les moins pires, ses choix face aux rapaces familiaux prêts à se jeter sur les non-cadavres toujours chauds de sa propre famille. Les sentiments, l'honneur, l'éducation, les valeurs, l'affection ont disparu. Ces personnes ont fait un bon dans le temps, retour en arrière, prêts à vivre au temps de la préhistoire, et je ne peux m'empêcher de faire le parallèle avec "Pourquoi j'ai mangé mon père" de Roy Lewis. C'est sensiblement la même chose, métaphoriquement, ils veulent les dévorer pour absorber leur fortune.


Ce roman m'a fait réfléchir sur cette fameuse pyramide de Maslow. Après avoir passé sa vie à la gravir, la fin de vie est-elle simplement sa dégringolade ? Ce livre montre de façon brutale cette chute inexorable que les EHPAD essayent d'une certaine manière de rendre moins violente, conduisant au choix inéluctable : l'argent ou le confort de vie ; payer pour s'occuper des siens ou s'en occuper soi-même. A chacun de faire son choix mais surtout de le faire en fonction de ses moyens. Le coût est également abordé dans ce roman : cette industrie des vieux extrêmement lucrative qui a conduit à en faire un lobbying.


J'ai vécu ce livre comme une satire sociale dans un monde qui tourne trop vite autour de nous et où on ne prend pas le temps volontairement de réfléchir à la pression subie, à l'influence imposée qui nous entoure.


Mais voilà, alors que j'ai été séduite toute la première partie du livre, durant la seconde, la découverte et l'intérêt du début s'essouffle. L'auteure ne se réinvente pas, préférant continuer dans les judéo-clichés. Ce qui était cynique et drôle au début devient décevant et rébarbatif par la suite. Presque de l'acharnement sur cette famille que l'on ne choisit pas à en devenir méchante au lieu de s'en désintéresser.


Au final, un roman dont la fin ne m'a pas surprise et on s'y attache un peu nous aussi à Maurice et Gisèle et on leur souhaite de vivre bien, heureux, avec leur souvenirs instantanés mais surtout en paix.


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le 23 mars 2021

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