Un livre-monde fascinant, dépaysant, vertigineux
Par Pierre Jouan
Ce n'est pas parce que c'est la rentrée littéraire et que vous avez un planning de lecture qui excède cent fois le temps dont vous disposez réellement, qu'il faut bouder le gros pavé de SF difficile à lire de l'année, ce River of gods que les anglo-saxons considèrent comme l'un des romans d'anticipation les plus importants des dix dernières années, aux côtés de Spin, de R.C. Wilson, dont il partage l'ambition : écrire une science-fiction de notre temps, à la fois prospective et poétique, émouvante et contemplative au cœur même du thriller et de l'hypertechnologie. Alors hop, on dégage du temps, de l'argent, et on s'y met.
Le Fleuve des dieux, en v.f., sixième roman traduit du britannique Ian McDonald, est paru outre-manche en 2004 ; du même auteur, on a pu lire l'année dernière Roi du Matin, reine du jour (Denoël), un livre sur son pays d'adoption, l'Irlande, justement récompensé d'un GPI du roman étranger. Le nouveau poulain boxe toutefois dans une autre catégorie : futuriste, complexe, il se veut l'enregistrement du chaos à venir, un chaos politique (éclatement des états-nation), identitaire (crispations religieuses et régionalistes), et technoscientifique (développement sauvage aux marges de la législation). Son théâtre principal des opérations, le sous-continent indien des années 2040, avait été jusque-là relativement sous-exploité ; la séance de rattrapage sera conséquente, exigeant patience et concentration. Au crédit du lecteur découragé, on admettra que l'objet lui-même peut rebuter : il paraît que l'éditeur (Denoël / Lunes d'Encre) veut revoir son identité visuelle... pourquoi pas, mais il faudra penser à éviter la typo à la Christian Jacques (on a presque eu honte de sortir le livre sur la plage). (...)
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