Au départ de l'œuvre de Boualem Sansal, il y a une guerre, la guerre civile des années 90 en Algérie. C'est au plus fort des années noires qu'il écrit ce premier roman paru en 1999, Le Serment des barbares.
Dans celui-ci, son ton est rude. On le sent en colère, sincèrement en colère contre tous, en Algérie. Le pouvoir est naïf, les islamistes sont monstrueux, et la population, par sa culture, crée un terreau favorable à la guerre qui la frappe. Tout le monde est coupable de ces 300 000 morts, de ces exactions abominables dont la simple évocation suffit à vous révolter contre tout ce qui les rend possibles, et en ça la colère de Boualem Sansal est parfaitement compréhensible et communicative.
Le style est musical, d'une musique moderne torturée, à mon goût inégale, fugues presque baroques et allitérations forgées dans le courroux.
Ce livre est considéré, apparemment, par la critique algérienne, comme fondateur d'un courant chargé de secouer les consciences arabes à propos du péril islamiste, et de questionner la culture du monde musulman. Et je suis un peu gêné de dire qu'il ne m'a pas vraiment plu. Gêné de "critiquer" un livre réalisé dans l'urgence avec une sincérité confondante. Mais ce roman, à mon avis, manque de recul dans ses mots, manque alors de distinction, de nuance, de fulgurance, contrairement aux autres livres que j'ai pu lire de lui. C'est une attaque "en gros". Et l'intrigue policière qui vient chaîner toute cette brutalité n'a pas du tout fonctionné sur le lecteur que je suis.
Néanmoins, il reste un auteur à découvrir, un rare téméraire contre ceux qui acculent "Dieu à ce qui ne peut être qu'un terrible recul pour lui : faire cesser la vie !
Ceux qui tiennent à elle et à ses bontés en sont avertis ; Dieu n'est pas si résistant que ça, pas plus que l'homme devant la folie des cafards ; prions pour lui."