Lemashtu
7.7
Lemashtu

livre de Li-Cam ()

J'ai rencontré Li-Cam très récemment, au salon "Les Oniriques" dans la périphérie lyonnaise. Salon superbe à bien des égards, le partage avec les auteurs restant rare et exquis en temps normal. C'était l'occasion d'acheter son très beau bouquin "Lemashtu, Chronique des Stryges Tome 1". On peut donc saluer avant toutes choses le super boulot éditorial, puisque ce volume est en apparence très beau. Etant un être superficiel, vain et aimant les noms mélodieux (Lemashtu, c'est quand même pas mal, on se croirait au Hellfest!), j'ai acheté le bouquin après avoir conversé quelques minutes avec l'auteure. Si cette dame fut très sympathique et semble extrêmement cultivé (son blog, bien que souvent abrupt, en est un bel exemple), son livre n'en est pas moins une jolie déception pour bibi.
J'en avais pourtant lu du bien sur internet, même si j'avoue ne pas avoir lu de critiques de mes "références habituelles", et on peut me fouetter avec des orties pour avoir cru sur parole des sites internet contenant le mot "vampire" danns l'adresse. Mais on me jurait encore et encore que "Lemashtu", c'était pas de la bit-litt, que c'était vachement mieux, que c'était un univers audacieux, original, et j'en passe. Bon, c'est peut-être pas la bit-litt la plus infâme mais on ne peut pas vraiment dire qu'on tient là une révolution du genre, ni même une lecture très enthousiasmante.
Les premières pages de "Lemashtu" sont jouissives à souhait. On prend part à une évasion périlleuse, mystérieuse et intriguante, qui nous familiarise dès les premières pages avec le pouvoir du jeune Lem, évitant par là le travers de la surenchère. On sait ce que peut faire le jeune prince des strigoïs dès le début, et ce n'en est que meilleure. Le gros souci, à mon sens, est à peu de choses près le reste du bouquin. L'univers de Li-Cam est certes bien en-dehors de la mythologie bit-litt (les vampires sont un mythe, les buveurs de sang sont en fait des stryges, ou strigoïs, peuple opprimé depuis des siècles, complètement ancré dans l'histoire et la science, en voie d'extinction), mais est d'une dissonance remarquable. Je ne saurais trop me justifier, et je ne veux absolument pas tomber dans la critique gratuite, mais j'ai eu cette impression de non-adhérence, de non cohésion dans ce bordel mêlant Vatican, Vlad Dracul, des castes, de la génétique et des histoires d'amourettes adolescentes à deux balles. Non pas que Lemashtu se révèle "complexe" à appréhender (il n'en est rien), mais ça n'a pas marché pour moi. Je ne trouvais pas ça cohérent. Je passerai l'Eglise et le Vatican qui sont un échec cuisant du roman (j'emploierais presque le terme de "ridicule", mais j'ai apprécié Li-Cam et son bouquin a quand même certaines qualités), chaque parole du cardinal Brault ou du bras de l'Expiation tendant à un humour décapant et le tout tombant à plat de la plus misérable façon. Des personnages tels que Aratar et Féhik intriguent au départ, ne serait-ce que de part leurs capacités, mais eux aussi échouent à capter l'attention. Les statégies qu'ils mettent au point pour "protéger" Lem sont à mourir de rire, les ficelles tendant tout le récit étant grosses comme des poutres. Ouais Lem doit forcément tomber amoureux, c'est là un point essentiel du roman, alors quelle superbe idée que de le laisser se balader pépouze dans Londres alors qu'il est menacé plus que jamais! Quelle superbe idée de lui faire posséder un pouvoir transformant la vierge pure comme du cristal en nymphomane pompeuse de joncs! Franchement, Li-Cam?
L'intrigue est par ailleurs gratuite et facile, empruntant des raccourcis qui frisent l'indécence (je n'en dirait pas plus, pour ne pas trop spoiler tout de même). Et même si ce système de castes est alléchant, cette catégorisation scolaire, apparaissant telle qu'elle, fait soupirer assez vite. Encore une fois, les ficelles sont énormes: Lemashtu est un débile, il a des cours depuis des années sur le monde qui l'entoure et son peuple, mais ne bite rien à ce qui se passe autour de lui. Il se réveille ainsi au moment de la narration et en profite pour poser des questions absurdes à ses maîtres pour faire profiter au lecteur ignorant de toute la culture strigoï. Tout est un prétexte pour étayer cette mythologie qui, au lieu de s'insérer de manière fluide dans la narration, fait apparaitre des descriptions presque jeu-de-roliste dans le roman. Pas cool.
On se demandera aussi comment des stryges aussi malins qu'Aratar et Féhik se font avoir comme des bleus. C'est impressionant et pas vraiment fin, puisqu'on présente par exemple Aratar comme un être doué d'une intelligence hors du commun et de sens accrus... Pourquoi ne voit-il pas plus loin que le bout de son nez, dans ce cas? Et comment un jeune pubère aussi hormonal que Lem parvient-il à le berner à sa guise? Mhm.
Le livre n'est pourtant pas dénué de qualités. Le système de caste est assez intéressant, malgré son aspect documentaire-à-trois-sous, et aguichera l'intérêt du lecteur un peu curieux. Lem est de plus attachant, tout comme Arthur ou encore Merlin (seul personnage réussi?). Et il faut tout de même le dire, ce bouquin est facile à lire, la plume de Li-Cam étant légère la plupart du temps (les archives du Vatican sont l'exception, arrivant à être pénible et inintéressante) et plutôt entraînante.
Tristement, peu de qualités ressortent de ce bouquin tant vanté. Certaines personnes ont du y trouver leur compte, et je respecte totalement ça. Du reste, je n'ai pas passé un moment agréable, ni vraiment désagréable. "Lemashtu" est pour ainsi dire une lecture peu enthousiasmante, qui ne m'a pas vraiment fait ressentir d'épiphanies. Juste un bouquin qui m'a soulagé de la lourde lecture qu'est "L'Echiquier du Mal". Je lirai cependant le deuxième tome, puisque Li-Cam est sympa, et qu'au fond, son histoire n'était pas un raté complet. Je ne le conseille cependant pas, sauf aux petits curieux, aux fanatiques de vampires, ou encore aux êtres superficiels et vains aimant les jolies couvertures.

NB: si le bouquin ne possède pas vraiment de romance paranormale, il appartient directement à un genre que j'ai des difficultés à caractériser. Ce n'est certes pas de la bit-lit, mais c'est ce type d'écrits à la Sire Cedric où le goth est plutôt bien présent et le propos pas vraiment fulgurant. Il n'empêchera que Lemashtu à ce petit côté niais assez agaçant des fictions amoureuses complètement bêta.
Wazlib
5
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le 19 mars 2015

Critique lue 266 fois

Wazlib

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