« Soyez au monde comme n'y étant pas », disait saint Paul, plusieurs fois cité... Nulle crainte : si mystique et théologie il y a dans cette délirante saga initiatique, les plus romanesques orgies s'y conjuguent aussi aux plus folles intrigues et ambitions artistico-politiques. Croix, sexe, littérature, pouvoir et oeuvres d'art y communient dans une sarabande à faire se damner Balzac, Nietzsche, Claudel, Gide et Teilhard de Chardin réunis. L'auteur et patron du Festival d'Avignon est baroque et excessif ; il aime à s'afficher chrétien, homosexuel et affamé de toutes les ­reconnaissances. Il raconte ici le parcours d'Aurélien, jeune metteur en scène, poète transgressif et ambitieux, beau comme un faune de Debussy. Et qui pourrait lui ressembler comme un frère... Le roman est en effet une oeuvre à clés où les plus « arty » d'entre nous s'amuseront à reconnaître telle comédienne, tels ministre, chef d'orchestre, mécène ou grand commis de l'Etat... Raide amoureux d'un poète beau comme un ange mais torturé par la haine de soi et l'obsession de la sainteté, Aurélien se perd et se retrouve de bras en bras. Sans dédaigner la prostitution qu'il pratique comme un des beaux-arts, inventant le concept de « putitude » ou... « droit au théâtre » : « un jour, je suis ça, un autre je suis ci, avec toi je suis celle-ci et avec toi, celle-là, et la richesse de l'existence, pour ne pas dire le sens même de l'existence, c'est une sorte de carnaval dans lequel j'ai le droit d'avoir tous les masques... » Une énergie hystérique baigne ce polar métaphysique où artistes et grands patrons d'institutions culturelles se réinventent dans des backrooms ­sordides mais rédemptrices. Un désordre traversé de désirs, de révolutions, de morts et de passion irraison­née pour un Dieu proclamé absent noue une écriture comme en transe, sculptée en courts chapitres incendiaires. Le petit monde parisien qu'Olivier Py prétend — naïvement ? — observer avec ses compromissions, ses lâchetés, ses vanités, n'y est pas le plus fascinant. Le sont davantage la rage vitale et la tragique lucidité d'Aurélien-Olivier. Sa contagieuse et brûlante volonté d'être au monde, malgré la désespérance noire et la mélancolie profonde. Quand même et malgré tout. Comme en n'y étant pas... (telerama)

HenriMesquidaJr
8
Écrit par

Créée

le 15 févr. 2018

Critique lue 261 fois

HenriMesquidaJr

Écrit par

Critique lue 261 fois

D'autres avis sur Les Parisiens

Les Parisiens
HenriMesquidaJr
8

Critique de Les Parisiens par HenriMesquidaJr

« Soyez au monde comme n'y étant pas », disait saint Paul, plusieurs fois cité... Nulle crainte : si mystique et théologie il y a dans cette délirante saga initiatique, les plus romanesques orgies...

le 15 févr. 2018

Du même critique

Jonas
HenriMesquidaJr
8

Critique de Jonas par HenriMesquidaJr

Magnifique premier film d'un jeune réalisateur ultra talentueux et plein d'avenir. Je l'ai vu en avant première, les acteurs sont tous formidables et bien dirigés, le scénario est malin et tient en...

le 16 sept. 2018

10 j'aime

L'Œuvre au noir
HenriMesquidaJr
9

Critique de L'Œuvre au noir par HenriMesquidaJr

Pour commencer, si vous avez l'intention de lire ce roman et que vos connaissances historiques sont faibles, il va vous falloir réviser. Je pense très sincèrement qu'il est indispensable de bien...

le 12 mars 2017

9 j'aime

2

Werewolf
HenriMesquidaJr
8

Critique de Werewolf par HenriMesquidaJr

Attention pas de loup garou dans ce film qui n'est pas non plus un film d'horeur mais un drame psychologique. Nous sommes en 1945. La guerre vient de se terminer mais les premières semaines de paix...

le 2 oct. 2019

8 j'aime