Nous rencontrons des problèmes techniques sur la partie musique du site. Nous faisons de notre possible pour corriger le souci au plus vite.

On sentirait presque l'odeur de la poussière

Dans la recette de tout bon roman d'aventures, il faut des personnages accrocheurs, si possible de caractères fort dissemblables afin de mettre du piment à leur association. Ici ce sera Zelikman, guérisseur né en Allemagne, blond, filiforme, madré, et Amram, colosse africain dont les problèmes se résolvent en général par l'intermédiaire d'une hache viking surnommée "Profanateur-de-ta-Mère". Au cours de leurs pérégrinations ils font la connaissance d'un prince Khazar, c'est-à-dire issu de l'empire juif qui, peu avant l'an mil, domina la région comprise entre la Mer Noire et la Mer Caspienne — à ce sujet, voir "La treizième tribu" d'Arthur Koestler. Bien sûr, nos deux héros aideront ce jeune prince dans sa reconquête du trône... et comme souvent avec ce genre de personnage rencontré au détour d'une route, celui-ci se révélera ne pas être tout à fait ce que l'on croyait...


"Les princes vagabonds" n'est pas un livre à prendre au premier degré, comme l'on peut lire les dernières sorties de la rentrée littéraire. Ce roman n'est rien de moins qu'un pastiche (attention, pas une parodie : on est ici dans l'hommage et non dans la raillerie) des romans d'aventures de la fin du 19ème et du début du 20ème siècle. La couverture donne le ton, de même que les illustrations intérieures, d'un charme désuet comparable à celui des gravures ornant les romans lus par nos aïeux. Ce n'est qu'un livre de poche de la collection 10/18, et pourtant, avec un peu d'imagination, on sentirait presque l'odeur de la poussière ! L'intrigue, une suite de péripéties destinées à mener un prince sur le trône dont sa famille à été chassée, est évidemment un grand classique, pour ne pas dire un poncif, du roman de cape et d'épée "à l'ancienne". Enfin, le style est un autre élément allant en ce sens ; ainsi ces phrases interminables, qui semblent avoir rebuté tant de lecteurs : nous ne sommes plus habitués à ce genre d'écriture, et c'est évidemment volontaire de la part de l'auteur, afin de parachever l'illusion. Inutile donc d'attendre de ce roman qu'il innove, ou qu'il révolutionne quoi que ce soit : tel n'est pas le propos... sauf à considérer que la véritable originalité, la véritable audace littéraire, consiste justement à proposer aux lecteurs d'aujourd'hui un roman qui aurait pu être écrit il y a cent ou cent cinquante ans.


Michael Chabon est un écrivain "sérieux", connu des médias et du public pour ses romans réalistes mettant en scène des personnages et des problématiques actuels. Néanmoins, dans la postface, il revendique le droit non seulement d'aimer, mais également d'écrire, des romans d'aventures. Voilà un discours très rafraîchissant, qu'on ne peut qu'applaudir et qui conclut sur une bonne note ces plaisantes aventures des "Princes Vagabonds".

Oliboile
7
Écrit par

Créée

le 3 mai 2018

Critique lue 113 fois

Oliboile

Écrit par

Critique lue 113 fois

D'autres avis sur Les Princes vagabonds

Les Princes vagabonds
Oliboile
7

On sentirait presque l'odeur de la poussière

Dans la recette de tout bon roman d'aventures, il faut des personnages accrocheurs, si possible de caractères fort dissemblables afin de mettre du piment à leur association. Ici ce sera Zelikman,...

le 3 mai 2018

Du même critique

Le Silence des vaincues
Oliboile
6

Honorable réécriture de l'Iliade, une parmi des dizaines d'autres

Il y a encore une semaine, je ne connaissais ni le nom de Pat Barker, ni le titre de son dernier roman paru en 2020, ni les éditions Charleston qui ont publié celui-ci en France. Après vérification,...

le 25 mai 2022

6 j'aime

1

L'Ours et le Rossignol
Oliboile
7

Contes et folklore russes, version fantasy

Avant de lire "L'Ours et le Rossignol", j'étais partagé entre des sentiments contradictoires. D'une part, une certaine impatience à l'idée de découvrir un roman se déroulant dans un contexte russe...

le 6 mars 2019

5 j'aime

3