Un roman de cape et d'épée où complots, jeux de pouvoirs et chasse à l'homme ( enfin, à la femme plutôt) à travers une nature sauvage et villages du 19e siècle, qui tente de revoir le rôle de la protagoniste de ce genre de roman, sans réellement y parvenir.


Héritière d'un famille noble et éduquée comme un garçon, Olympe, marquise de Roquedor, fait route vers le domaine de la famille Saint-Mesme. Olympe apprend qu'elle va devoir épouser le fils d'Enguerrand, Foulques. Un mariage qu'elle ne peut guère contester du fait d'être la pupille du chef de cette famille depuis le décès de son père, le marquis de Roquedor. C,est pourquoi, alors que leur berline la menant du couvent où elle a vécue reclus jusqu'à la demeure de son antipathique fiancé est prise en embuscade, elle n'hésite pas à s'enfuir. Agile, déterminée et opportuniste, la jeune femme se montre débrouillarde quand à son périple en forêt, mais elle ignore qu'on a mit sur ses traces un vieux soldat borgne intuitif. Mais au hasard des rencontres et des évènements, la jeune noble et le vieux soldat amnésique en viennent à se nouer d'amitié et bientôt, en compagnie d'un étrange jeune homme au passé mouvementé, Oost, ils se mettent en tête de déjouer les plans du comte Saint-Mesme, qui a beaucoup à gagner du mariage de son fils avec l'héritière de Roquedor.


Bon, je sais que cela va sembler pointilleux de ma part, mais quand un roman porte le nom d'un héro, je m'attends à ce que ce dernier ait une bonne tribune. Or, dans ce roman, Olympe partage la vedette avec le capitaine Décembre et Oost.
Même si le récit s'articule autours d'Olympe, il y a peu de personnages féminins dans ce roman, toute proportions gardées. Mais contrairement aux anciens romans du genre, Olympe sort des conventions, enfin, un peu. Opiniâtre, dégourdie, audacieuse et réfléchie, elle est capable de prendre les devants, mais se heurte toujours à des problèmes trop gros pour elle. Elle ne craint pas de se salir, de porter des vêtements d'hommes ou de répliquer ouvertement, mais ça ne lui sert pas souvent. Mais, honnêtement, on reste dans quelque chose de très convenu sur un point: Olympe dépend tout de même des hommes autours d'elle. Elle aura besoin d'être sauvée, elle ne se sert guère de sa "fine lame", comme on nous le précise. Contrairement à ce que peut laisser croire la couverture, elle ne se sert de son épée qu'une fois. Mais, je lui donne bien ça, elle demeure célibataire et ne fait pas la gaffe de tomber amoureuse au premier regard avec quelque mâle que ce soit, ça c'est différent.


J'ajoute que le "féminisme" ( égalité des sexes) passe trop souvent par une très désagréable inversion vers les attributs d'homme: Être féministe ce n'est pas de gueuler plus fort, porter les vêtements des hommes et porter une épée. Bon nombre de romans jeunesse se basent sur cette prémisse. On catégorise volontiers ces grandes gueules garçonnes et armées comme des "badass" et des "féministe", mais quand on observe leur entourage, que leur reste-t-il? Leur dépendance aux hommes ( affective ou circonstancielle) , leur manque d'indépendance et même souvent de jugeote ( comme les femmes soumises d'autrefois, finalement) et comme Olympe, le fait qu'elle sont incapable de faire cavalier seule: soit elle trimbale leur amoureux, soit elles trimballent leurs aidants. Peut-on donc réellement qualifié ce genre de roman de "féministe"? Je trouve le terme bien surtaxé. J'ai plutôt tendance à y voir un "tag" populaire que les lecteurs veulent voir qu'un réel changement de mœurs dans la littérature, du moins comme ce roman-ci. Je me sens dure envers ce roman, mais il est décevant, convenu et a jouit de tout un battage médiatique et promotionnel. Pour quoi, finalement? Pour que cette demoiselle qui ne sait pas manier un fleuret correctement retrouve les clichés d'époque: un mariage arrangé non-désiré, une escapade qui dégénère en chasse à la sorcière et au quasi-viol, un sauvetage par deux hommes et en bout de ligne, elle gagne sa propre mains...mais pas par elle-même, hélas. On reste dans les clichés, même si Olympe fait quelques trucs "non-conventionnel".


C'est donc en terrain connu que nous retrouvons cette histoire, avec ses villageois aussi stupides que superstitieux, ses nobliaux sans états d'âmes, la sorcellerie, la condition des femmes guère reluisante et ce monde régit par quelques privilégiés. Il y a plusieurs éléments d'intrigue,qui vont converger vers la fin, pour faire gagner la justice et punir les méchants, capes et épée oblige, on dirait.


Je ne peux pas dire que j'ai été immergé dans ce roman, qui gardait un certain confort de surface, sans faire dans la psychologie ou les états d'âmes. C'est donc davantage porté sur l'action et les manigances, mais j'aurais peut-être aimé un peu plus de relief chez les personnages. Ou peut-être d'un léger brin d'humour à la Cyrano? Juste un élément pour mieux adhérer aux personnages.


Mais sinon, je demeure d'avis que c'est un bon roman dans le genre "Cape et épée"...ah voilà! Les épées: il manquait de combats, de lames ou de querelles verbales bien acerbes ou spirituelles comme la plupart des romans du genre. Et certains passages pouvaient être survolés sans que cela affecte la compréhension du récit, ce qui me fait penser que certains éléments étaient superflus ou juste trop descriptifs.


Tout-de-même, on sent la tentative de mettre de l'avant une héroïne plus capable et affirmée, mais je pense qu'on aura pu faire plus en ce sens et ne pas tomber dans l’inversion masculine. Bien sur, mon avis est influencé par le fait de connaitre beaucoup d’héroïne encore plus audacieuses, fine lames et indépendantes qu'Olympe, telle que Lila, dans la trilogie de "Shades of Magic", les héroines de la BD historique "le scorpion", Scarlet, de la série éponyme ou l'agile Widdershin. À côté d'elles, Olympe semble avoir 12 ans et des débuts prometteurs, alors qu'elles ont toutes 16 ans.


Vous trouverez également une très jolie carte de la région au début du roman, ainsi que des illustrations un peu "sketchy" au cours du roman, qui occupent de pleines pages. Ça lui donne un petit air vintage.


Donc, si je devais conclure, je dirais que c'est un bon début pour rééquilibrer le genre et tant qu'à choisir un roman de ce style autant en prendre un de cet acabit, mais je pense qu'on pourrait donner encore plus d'indépendance au personnage féminin et éviter de tomber dans "la fille qui se la joue "garçon". Parce que des personnages de ce genre, il en pleut.


Pour un lectorat du premier cycle secondaire, 13 ans et +.


P.S J'aime bien la couverture sobre.

Shaynning

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