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Bien que Donald Westlake nous ait quittés fin 2008, ses œuvres n'ont jamais cessé d'affluer chez nous. Véritable coup de cœur pour François Guérif, directeur de la collection Rivages/noir, l'écrivain américain a pu voir nombre de ses romans bénéficier de nouvelles traductions non-caviardées, plus fidèles à sa plume exceptionnelle. Évidemment la série Dortmunder, qui a porté la comédie policière à son apothéose. Puis le deuxième cycle consacré à Parker, dans la plus pure tradition hard-boiled, sans détour, sans pitié et 100% efficace. Ça ne s'arrête pas là. Guérif n'a jamais sacrifié la curiosité au profit des tendances littéraires, la collection accueillit donc les histoires isolées de Westlake. Une catégorie aussi garnie que diversifiée. De la chronique sociale à la satire journalistique en passant par le drame, l'exercice méta, la comédie noire, il y a largement de quoi susciter l'intérêt de lecteurs quels que soient les genres de prédilection. Tout ça pour dire que la mort n'a pas empêché ses écrits de lui survivre (presque vingt ouvrages édités depuis son décès). Qui gagne perd est le dernier en date.
Écrit en 1969, ce nouveau livre n'avait encore jamais été traduit dans nos contrées. Un oubli étonnant, puisqu'il est très proche de l'esprit qui a fait les bons jours ou plutôt les mauvais jours du braqueur maudit John Dortmunder. Un précurseur, à vrai dire, tout comme Le Pigeon d'argile ou La mouche du coche. D'accord, Chet Conway n'est pas du genre à déprimer. En même temps il n'en a pas le temps puisque les crasses s'enchainent à vitesse grand V. Chauffeur de taxi, parieur régulier, le statut du larron va rapidement passer à suspect n°1 auprès de la police et cible rêvée pour la mafia. Problème n°1 : il n'a pas tué son bookmaker. Problème n°2 : il est le seul à le savoir. Accrochez-vous, Chet va vous narrer l'invraisemblable imbroglio dans lequel il s'est malencontreusement fourré.
Au niveau de la structure, Qui gagne perd est l'un des Westlake les plus déchaînés. Le fait d'avoir opté pour un narrateur interne ne l'oblige pas à s'appesantir sur les descriptions ou les états d'âme. Les trois quarts du livre se concentrent sur les dialogues. Oui, c'est loquace et surtout très drôle. Assumant une dimension ouvertement absurde, l'intrigue déborde de couacs, d'imprévus ou de rencontres difficiles. La suspension d'incrédulité pourrait être mise à l'épreuve, mais dans un cadre aussi débridé, on accepte facilement de suivre le rythme. Dieu sait que la lecture est un plaisir, sans cesse renouvelé grâce à l'imagination du maitre d'œuvre. J'ai parfois pensé au Burn After Reading des frères Coen en version frénétique, avec tous ses personnages qui se croisent, se percutent, s'emmêlent les pieds et ne comprennent rien à ce qui se passe. Sans compter que la plupart d'entre-eux ne sont pas des lumières, alors imaginez un peu le boxon. Se faire mener par un tel magicien des mots, c'est un piège trop beau pour être évité. On passera peut-être sur le fin mot de l'histoire, peut-être un chouïa trop chaotique - le jeu de pistes aurait pu occuper une place un peu plus importante - mais il faudrait être d'une grande mauvaise foi pour dénier à ce périple sa grande générosité. Une belle réussite qui annonce plusieurs des romans les plus incroyables de Westlake (Aztèques Dansants, Pourquoi moi ?)

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le 19 sept. 2021

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