Il y a quand même de drôles de loulous dans la littérature américaine actuelle. Des gars sortis de nulle part qui ont été ouvriers, soldats, camionneurs, bûcherons ou que sais-je encore. Des autodidactes qui racontent leur Amérique cauchemardesque et c’est pas joli à voir. Je pense à Donald Ray Pollock, à l’indien emprisonné pour meurtre Joël Williams, à Benjamin Whitmer, à Eric Miles Williamson ou encore à Frank Bill (je vous en parle tout bientôt). Larry Fondation est de la même trempe. Médiateur de rue depuis plus de 20 ans, il connaît les pires endroits de Los Angeles comme sa poche. C’est à l’évidence dans son quotidien qu’il puise son inspiration.

Fondation, c’est un peu comme si Carver oubliait pour un temps les petites gens et allait traîner ses guêtres du coté des damnés de la terre. Dans son Los Angeles, on est loin d’Hollywood. On y trouve des crétins qui font boire de la vodka pure à un gamin de quatre ans hyperactif pour l’assommer un bon coup. Des gangs qui sortent les flingues à la moindre broutille. Dans les quartiers sinistrés, on s’occupe en tirant sur les rats au fond des caves désaffectées ou alors on se bourre la gueule en fumant du crack sur des parkings à l’abandon.

L’écriture est minuscule, fragmentaire. Certains textes font à peine quelques lignes. De la microfiction qui vous saute à la gorge. Une juxtaposition de petites séquences formant un tout désordonné ou la violence et le désenchantement prédominent. Une peinture froide, glaciale même de ces populations misérables qui ont perdu toute humanité. Pas de jugement, aucune empathie, juste un coup de projecteur furtif sur une forme de déchéance absolue.

A bien des égards, la construction de ce recueil m’a fait penser à la dernière partie du cultissime Last Exit to Brooklyn de Selby qui s’intitule Coda : on saute de personnage en personnage, de lieux en lieux dans un périmètre très restreint. C’est électrique, sans fioriture, nerveux à souhait. Tout ce que j’aime.

Est-ce que pour autant je vous conseillerais une telle lecture ? Surement pas. Trop peur de me faire enguirlander si au final vous en concluez que c'est trop barré ou sans queue ni tête. Moi en tout cas j’y ai trouvé mon compte.
jerome60
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le 28 févr. 2013

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