Ici, il y a plus que des mots

Ludwig Wittgenstein offre avec le Tractatus Logico-Philosophicus un ouvrage rare, unique même. En opposition aux auteurs contemporains, Wittgenstein recherche à relier la philosophie au mystique. Il réalise donc un ouvrage qui demande moins une lecture qu'une participation. La philosophie pour Wittgenstein n'est pas une théorie, c'est une pratique. Et le philosophe veut nous le faire ressentir tant le tractatus ne se présente non comme un traité mais bien comme une sorte de manuel à vivre, à réfléchir à retravailler après.
Et c'est pour cela que pour Wittgenstein, les sources comptent bien peu. On retrouvera pourtant au détour d'une page Aristote ou Leibniz, mais sans jamais être pleinement cité.

Si l'histoire a retenu du Tractatus l'aspect logique, c'est à cause d'une méprise que Wittgenstein regrettera de son vivant. Le Tractatus est principalement métaphysique, moral même. La place de l'individu, la structure du monde, l'existence de Dieu sont tant de sujets de débats. Ou plutôt de réflexion et non de débat. Wittgenstein ne pose pas de question, il n'amène pas non plus de réflexion. Il cherche, grâce à ses phrases à faire voir.
Montrer, telle est la limite pour Wittgenstein. Au delà de l'explication, il y a le faire voir. Et c'est là où la compréhension existe réellement. Que moi j'existe, cela ne peut réellement se dire, le sens profond n'existe pas dans les mots, pas dans le langage, car le langage c'est le monde, or cela se trouve à la frontière du monde. Je suis un sujet métaphysique à la limite de mon monde, connecté en somme à celui-ci sans en faire parti, sans en être exclu, je suis à la frontière. Je ne peux donc l'expliquer, il faut le voir.
Pour Wittgenstein, c'est là le but ultime. Et pourtant, comme cherchant, tant bien que mal à aller à contre-courant, Wittgenstein va essayer de pousser l'esprit du lecteur au-delà de la simple explication, au-delà du langage. Principalement en montrant les limites de celui-ci. Certes, Wittgenstein réfléchit grandement sur le langage, la logique et les mathématiques, mais le but est bien moins de faire de la philosophie des sciences que de prouvés les limites ici.
Même si la science peut expliquer tous les faits du monde, elle ne répondra pas à la grande question de la vie. Pour cela, il faut dépasser ce stade, aller au niveau mystique. Wittgenstein va tenter, via le Tractatus Logico-Philosophicus a nous montrer les limites de la recherche philosophique antérieure à la sienne, et proposer de ce fait, une nouvelle approche.

Essayer d'écrire une critique sur le Tractatus me semble difficile dans le sens où ce livre offre beaucoup plus qu'il ne dit. Il est une clef de voute d'une vision de la philosophie, quand bien même Wittgenstein reviendra dessus plus tard dans sa carrière d'intellectuel.
Le Tractatus Logico-Philosophicus est un retour à une forme différente de la philosophie, une forme souvent oubliée, une puissance trop souvent mis de côté. Le Tractatus Logico-Philosophicus, en quelque page, offre beaucoup plus à la pensée humaine que des milliers de pages d'autres auteurs. Un livre un lire, mais surtout à vivre.