Un certain Paul Darrigrand / Philippe Bess


Comme je n’ai pas voulu manquer mon rendez-vous avec Philippe Besson , je n’ai pas attendu que son nouveau roman « Un certain Paul Darrigrand » fasse son entrée dans le fonds de la médiathèque dans laquelle je travaille. J’ai préféré courir me l’acheter dans une librairie, surtout, lorsque, j’ai découvert avec plaisir que c’était la suite de son roman autobiographique « Arrête avec tes mensonges » qui avait remporté un succès fulgurant en 2017 et qui a laissé une trace émouvante et indélébile dans mon parcours de lecteur.
Dans ce volume, l’auteur poursuit son dialogue avec les fantômes de son passé. Il nous entraîne sur les chemins de sa vie estudiantine. A Bordeaux, en premier lieu, pour préparer HEC. A Rouen ensuite, où il intègre une école, de commerce, (Ces trois années passées dans cette ville ne lui laissent pas un souvenir impérissable.), pour retourner à Bordeaux préparer un DESS.. Dès la première ligne, du livre, on rentre dans son intimité. On le retrouve en plein déménagement. Il est en train d’éliminer de multiples choses que l’on entasse sans jamais y revenir. Il est troublé par une photo datant de 1988 qu’il retrouve dans une boite à chaussures. Et c’est à travers cette photographie qu’il nous présente un certain Paul Darrigrand.
Paul Darrigrand est un étudiant marié, il a une belle allure, quelque chose d’élégant et de mélancolique. C’est un séducteur qui sait user de son charme. Il exerce un grand pouvoir de séduction sur Philippe Besson. On découvre que, en dépit des apparences et de l’assurance affichées, il devient un garçon fragile, indécis auprès de son épouse Isabelle, une femme puissante et résolue. Philippe Besson nous assure qu’il n’existe pas de lien entre la photographie découverte et l’idée d’écrire ce deuxième volume. Pourtant je prends plaisir à imaginer qu’il y a bien un lien puisque chaque photo évoque un souvenir qui ressurgit dans notre mémoire et que nous pouvons le retranscrire. C’est un peu mon coté fleur bleue qui s’exprime
En tous les cas, une fois encore, l’auteur nous offre une belle histoire d’amour authentique, une histoire de manque, une histoire tenue secrète. Philippe Besson se dévoile sans détours auprès de son amant, mais aussi auprès de ses lecteurs, en révélant qu'il a flirté dangereusement avec la mort à cause d'une maladie qui se traduisait par une baisse vertigineuse de ses plaquettes sanguines. Ce qui est une marque de confiance considérable. En retour, son lectorat lui manifeste un profond respect.
Par ailleurs, on prend conscience combien il doit être difficile d’être amoureux d’une personne mariée car la notion de partage entre en jeu. Une notion véritablement insupportable. L’attente de l’autre doit être terriblement cruelle, surtout quand des sentiments profonds s’en mèlent et se mélangent avec un sentiment de culpabilité. L'amour ne se répartit pas équitablement. La compagne a droit à la vie sociale et l'amant à la clandestinité. Cette histoire me touche, me trouble et résonne en moi, mais je ne dois pas être le seul dans ce cas précis.
On constate que c’est une histoire qui se répète. Thomas, son amant dans « Arrête avec tes mensonges » et Paul lui ont attribué le même rôle. Il devient pour chacun d’eux l’« objet » d’un désir qui conduira Thomas vers la mort. Paul au contraire lui avoue tenir à leur histoire, pour le plus grand bonheur de l'auteur.
J’ai suivi des études universitaires à Bordeaux, 4 ans après Philippe Besson .J’ai adoré battre le pavé avec lui. Les rues énumérées réveillent en moi de très beaux souvenirs. J’ai pris un immense plaisir à me balader à la fin des années 80 , celles d’un libéralisme qui puisait son esthétique et son idéologie dans « Dallas et « Dynastie » Des années, en revanche noircies par l’arrivée du sida la peur que cela a pu engendrer et que cela engendre encore aujourd’hui dans chacun de nous.

Thierry_Dupreui
8
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le 14 mars 2019

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