Un turbulent silence...

Ressentir ce qu'ont vécus les esclaves sud africains avant l'abolition, voilà l'exploit qu'un blanc a réussi à réaliser. André Brink est un afrikaners et pourtant, il doit y avoir du sang noir qui coule dans ses veines, le sang de la révolte, le bouillonnement de l'incompréhension face à l'inacceptable, car plus personne aujourd'hui ne peut comprendre les agissements d'une poignée d'explorateurs qui ont détruit la vie de centaines, de milliers d'êtres humains, au nom de Dieu bien souvent, au nom de leur soi-disant supériorité, à cause de leur lâcheté… Rarement un écrivain aura atteint l'âme d'un homme au plus profond de ce qu'il est réellement, un être vivant, né pour être libre et non enchainé par ses semblables. Ce livre nous raconte la tentative d'une poignée d'esclave, au début du 19e siècle, près du Cap, de retrouver leur dignité d'homme, après avoir souffert ce que peu de blancs auraient supportés de souffrir sans en mourir, après avoir espéré pendant des décennies que leurs maitres les libèrent enfin de ce joug qui les faisait souffrir de la naissance à la mort. On ne peut rester insensible face à cette escalade de la maitrise des uns sur les autres, au point que les animaux sont mieux traités que les hommes de couleur. Peu se révolteront, et ceux qui le feront devront bien souvent le payer de leur vie, mais comme le dit le personnage principal du livre, Galant l'esclave, pourtant frère de lait de son maitre : "voilà ce que je suis vraiment". La vie est rude au 19e siècle, partout dans le monde, il y a des guerres, des famines, des maladies, mais le paradis existait pourtant, il était là, au soleil de l'Afrique, il aurait suffit que l'homme partage à la place d'imposer, qu'il apprenne à la place de voler, qu'il comprenne et qu'il vive en paix, mais comme dans bien d'autres contrées à l'époque, le blanc s'est toujours positionné comme le maitre du monde, l'envoyé de Dieu, et Galant, et ses frères, ses sœurs, tous ses semblables en seront meurtris dans leur chair et dans leur âme. Les femmes, comme bien souvent, seront soumise à encore pire si cela est possible, puisqu'elles ne seront que des jouets qu'on prend, qu'on déchire et puis qu'on jette dès que l'envie est passée, et pourtant, elles auraient pu massacrer leur maitre pendant leur sommeil, tuer leurs enfants, se venger de toutes ces infamies, mais au contraire, leur dignité nous illumine, nous paraissons tellement lâche par rapport à ces mères formidables…
J'ai lu ce livre avec une sorte de dégout permanent pour ma race et pour l'être humain en général, mais j'ai également accompagné la naissance de l'homme nouveau, j'ai suivi la construction de la force nécessaire et du courage qu'il a fallu à chaque esclave qui s'est révolté, et j'en ressors exalté par cette démonstration de courage et de liberté. Heureusement, je sais qu'à la fin de cette période, l'esclavagisme a fini par (presque) disparaitre, mais que de souffrance pour y parvenir…
Un livre à lire, absolument !
DanyPirard
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le 6 déc. 2012

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Dany Pirard

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