Ahlala, j'ai mis une bonne centaine de pages pour appréhender la trame et le ton du bouquin, ces personnages qui s'entrecroisent et la chronologie qui fait des noeuds, mais ensuite, quel pied. Qu'est ce que j'aimerai savoir écrire comme Virginie Despentes, avec cette facilité, cette illusion de simplicité, où chaque phrase est resserrée et va droit au but, sans circonvolutions. Et dans le même temps, chaque portrait est juste et subtil, peint en 3-4 coups de pinceaux affirmés. Chaque phrase est essentielle. Elle construit son roman en points arrières, alternant les chapitres du présent et les flash back qui éclairent une dizaine de pages plus tôt.
Les personnages s'entremêlent autour de l'odyssée de Vernon, et j'ai fini par dresser un tableau synthétique pour m'y retrouver (34 prénoms). C'est un livre où l'auteure n'a pas le temps, où tous les maux de notre société sont égrainés un à un en autant de portraits, de tranches de vie qui vous scotchent. Et tu te retrouves envahie par le spleen à chaque paragraphe : un cadre facho et une SDF communiste qui pleurent la perte de leurs chiens, une mère en deuil de son fils toxicomane qui recherche fébrilement le copain de son fils à travers Paris pour jouer à l'infirmière et exorciser sa tristesse... Il y a beaucoup de crasse dans ce roman, mais elle côtoie des paillettes d'or.