L'envers du décor de la fantasy traditionnelle

"Wastburg", c'est l'envers du décor de la fantasy traditionnelle : pas de grandes actions héroïques, ici on s'intéresse au populo, dans tout ce qu'il a de petit, de mesquin, mais aussi de vrai. À Wastburg, au lieu de perdre son temps à vouloir sauver le monde, on songe avant tout à s'en mettre plein la panse et à gruger la municipalité sur les taxes. Dans ce moyen-âge à l'agonie, la magie jusque-là bien commode s'est soudain fait la malle, laissant les hommes livrés à eux-mêmes.


C'est donc dans une société en pleine déliquescence que nous entraîne le roman... Mais s'agit-il réellement d'un roman? On peut presque parler d'un recueil de textes courts, chaque chapitre donnant un coup de projecteur sur de nouveaux habitants et de nouveaux quartiers de la cité franche, bien souvent sans lien direct avec ce qui précède. Il y a certes un fil rouge, mais ce n'est pas dans cette "grande" histoire que réside l'attrait de "Wastburg". Celle-ci n'est qu'un prétexte, dont l'auteur aurait certainement pu se passer sans que son œuvre en pâtisse.


En réalité, c'est la cité elle-même qui nous fait tourner les pages jusqu'à la dernière, cette multitude de "petites" histoires se déroulant en son sein, comme celles du jeune Sandec, propulsé à la tête d'une bande de gamins des rues, des jumeaux Berken et Fortig, contraints de devenir gardiens de cimetière pour ne pas avoir à traire les chèvres dans leur patelin natal, ou encore de Kleen, ancien ramoneur payé par la Garde pour veiller sur les toits. Autant de tranches de vies qui font que, une fois le livre refermé, on peut sentir tous ces personnages poursuivre leur existence dans les ruelles de Wastburg, à l'inverse d'autres romans où l'on imagine aisément le décor être démonté sitôt la scène finie.


Au bout du compte, la comparaison avec Jean-Philippe Jaworski est inévitable, la parenté est même revendiquée. Et si Cédric Ferrand n'atteint pas encore l'excellence de son aîné (un œil exercé repérera dans "Wastburg" quelques petites maladresses) nul doute que nous tenons-là un jeune auteur à suivre de près.

Oliboile
7
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le 23 févr. 2020

Critique lue 105 fois

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