Ingénieur méthode dans une grande entreprise de téléphonie, à quelques jours de la retraite, Vincent est soudainement appelé à s’interroger sur les stratégies de management de l’entreprise qui vient de connaître une vague de suicides.

Impossible évidemment de ne pas faire le lien avec le procès qui a secoué France Télécom dont l’auteur est d’ailleurs un ancien employé. Un premier roman « Retour aux mots sauvages » avait déjà été publié sur le sujet. Dans celui-ci l’auteur s’attache à démontrer la mécanique implacable de la brutalité managériale lorsqu’ elle a décidé de se séparer de plusieurs centaines de salariés. Elle utilisera pour ce faire la force de frappe des DHR qui envoyés en première ligne du carnage, avec leurs discours sibyllins tenteront d’édulcorer leurs propos par des aphorismes ayant plus des allures de sentences que de conseils : valoriser l’exécution des tâches – entrer dans un processus de changement – améliorer la satisfaction client – se montrer proactif etc.. Thierry Beinstingel ne les charge pas nécessairement mais ne les dédouane pas non plus tout à fait. Sans être coupables, ils n’en sont pas pour autant responsables des dégâts humains qu’ils ont provoqués, provoquent et provoqueront. On le voit pour l’auteur la frontière est d’une extrême porosité. Didier Bille dans « confession d’un DHR » pour l’émission Envoyé spécial disait ceci : « Certains ont parfaitement conscience de ce qu’ils font. D’autres, victimes de leur propre propagande, pensent sincèrement être au service des salariés et de l’entreprise. Enfin, les plus nombreux ne se posent aucune question. » On pourra d’ailleurs regretter cette absence de prise de position de la part de l’auteur mais là n’est pas son propos semble-t-il puisqu’il a choisi de nous décrire sans haine la mécanique qui régit l’humain dans le libéralisme économique. Au point d’en délaisser un peu ses personnages guère consistants et aux dialogues un peu plats. Mais l’écriture est plaisante, parfois poétique et pour ceux ignorants de la chose on y apprend quelques vérités.

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le 6 avr. 2023

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