Feu, de Maria Pourchet fonctionne comme une phénoménologie gustative. Il en était de même pour Tressaillir, paru il y a moins d’un mois.
L’écrivaine installe dans un décor moderne et citadin, deux personnages dont, si il fallait ne retenir qu’un mot pour les résumer brièvement, on garderait celui de « détresse ». Dans le cas de Feu, il y a Laure, mariée et mère de deux enfants, qui après d’heureux débuts, ne trouve plus dans son couple rien de ce qui mérite d’ordinaire qu’on s’y accroche. Elle ne ressent plus à l’égard d’Anton, son mari, ces choses-là qui lui sont indispensables pour vivre. Quant à Clément, dont l’enfant intérieur encore en lui, ne s’est jamais remis des brimades de sa mère, il vit avec son chien et travaille en finance. Préférant éviter de faire et d’entreprendre, les femmes, les amis, la famille, les choix, de peur de rater.
Mais de ces décors calamiteux où survivent des personnages dysfonctionnels, il se fait entendre une intrigue latente qui monte, monte au fil des pages pour ne vraiment se révéler qu’à la toute fin. C’est le cas dans Tressaillir, c’est le cas dans Feu. Il y a l’histoire bien installé, puis il y a cet autre récit qui se bâti en arrière plan, comme un nouveau goût qui s’érige vers le palais, sur les cendres encore ignées du premier.
Feu est un livre rempli largement par l’histoire d’amour délirante et passionnelle de Clément et Laure, livre auquel Maria Pourchet va pourtant donner une profondeur supplémentaire, une résonance nouvelle, en tissant en son creux, une puissante intrigue qui, au moment de se révéler, l’éclairera de tout son feu. C’est aussi cela les livres de Maria Pourchet, cette extraordinaire ingéniosité de composition scénaristique, en plus de sa virtuosité d’oiseau rare quand il s’agit de manier la langue.