Ma première lecture de l'année aura donc été le nouveau roman de Sally Rooney : cette première confrontation avec sa plume a été motivée par mon affection pour la série adaptée de Normal People, un autre de ses bouquins qui se trouve actuellement tout en haut de ma pile à lire.
Ça été une lecture facile, rapide, agréable : il me semble, et cette impression se confirmera ou non après la lecture de Normal People, j'imagine, que Sally Rooney nous propose une littérature à l'image des problématique de ma génération, les "jeunes adultes" non pas au sens de la littérature dite "young adult" mais plutôt dans le sens de cette tranche d'âge vaporeuse qu'est celle des 18-25 ans. Je connais honnêtement mal la littérature anglosaxonne, et ma connaissance de la littérature irlandaise se limite sans doute à James Joyce, mais il m'a semblé que l'actrice avait une plume érudite, riche, abondamment citationnelle et tournée vers des thématiques propre à la tradition littéraire qu'elle poursuit : je pense aux réflexions sur dieu, à la dichotomie nature/culture qui revient parfois, même au style qui travaille beaucoup le flux de pensée dans une narration qui use beaucoup aussi du discours indirect libre, du travail sur le rythme et de la souplesse dans le récit. Évidemment, tout n'est pas parfait. J'ai trouvé notamment certaines parties un peu répétitive, même si on peut sans doute en partie imputé ça au côté obsessionnel du personnage de Peter. Parfois, il m'a semblé aussi qu'il y avait quelque chose de forcé, de cliché, sans que je ne sache dire exactement quoi. De la même façon, une chose à laquelle je suis très sensible, à savoir le fait que ce soit un écrit qui traduit la sensibilité de gauche de l'actrice, trouve également ses limites dans la façon cela se traduit : à vouloir écrire (et ils sont très bien écrits, complexes, humains) des personnages qui pour certains incarnent une certaine "gauche dans l'intime", Sally Rooney nous présente parfois des personnages qui ne vont pas au bout des chose. De fait, même si la narration nous dit le contraire, tous les personnages apparaissent comme de "bons communiquants" et certes c'est une belle lecture des relations humaines, mais c'est un peu gnangnan. Si on salue l'absence de manichéisme, on regrette le fait que les personnages finissent toujours pas devenir trop doux, trop mievre et à certains égards sans relief. Et cela d'autant plus que Intermezzo tient réellement du roman psychologique, façon Princesse de Clèves, la narration elle cherche toujours à aller au bout des choses, à decrypter les sentiments, la plume suit aussi cette logique et on aurait aimé en raison de cela que les personnages s'inscrivent aussi plus foncièrement dans cette dynamique.