Petit oiseau si tu n'as pas d'ailes, bah tu peux pas voler (no spoil)

Depuis le tome 1, certaines facettes du livre me laissent perplexe et je me pose toujours les mêmes questions techniques, de tome à tome.
Pourquoi centrer son récit sur le journal de Tom (et donc l'idée qu'il écrit à posteriori) mais centrer l'intrigue sur sa survie solitaire ? On sait qu'il va sortir vivant de ses situations périlleuses alors, si je ne crains pour la vie d'aucun personnage, je tombe vite dans une attention léthargique en me posant vaguement le question du comment.


Pour en revenir à notre épouvanteur, j'étais ravie de voir que nous allions changer de décors pour quelque chose de plus … sombre. Une vieille maison peu accueillante dans une région froide. L'hiver, période où la nuit prend le pouvoir sur le jour, saison préférée des histoires d'horreur par ce qu'elle a de naturellement détestable. Car si on aime la nuit au chaud dans notre canapé, à regarder la neige tomber, il en est autre chose de devoir combattre l'obscur, tapis dans son domaine.


Ma première déception a été de me retrouver avec le même Tom que dans le tome précédent. Si je trouvais son âge (13) intéressant au début, je commence à trouver que ça va trop vite pour le récit. Il lui faut 5 ans d'apprentissage pour devenir épouvanteur, je ne m'attends pas à le voir grandir d'un an par livre mais, tout de même, enchaîner la plus puissante sorcière du comté, le Fléau et le Seigneur de l'Hiver en 6 mois, ça me paraît beaucoup pour quelqu'un qui passe son temps à apprendre le Latin.
Qui plus est, le lecteur premier a grandi, nous sommes en 2007, le premier livre date de 2004, il n'a plus forcément envie de retrouver un Tom figé par le temps alors que lui a beaucoup changé.
Bien sûr, ce n'est pas le même garçon, il est plus courageux, plus fort, plus tout. Peut être un peu trop d'ailleurs, c'est souvent difficile de ne pas s'imaginer un garçon de 15-16 ans, autant dans son attitude que dans sa force physique, mise à part dans les moments où la narration a besoin de retrouver un gamin qui n'arrive qu'à l'épaule de son maître.


Soit, il a toujours 13 ans, on s'y accommode. Reste que Delaney gâche complètement le potentiel de son récit.
Premièrement parce que, encore et toujours, l'épouvanteur n'est pas là 80% du récit, toujours pour des raisons de m**de et que ça aurait plus d'intérêt dans une phase d'émancipation (vers le dernier tiers de l'apprentissage) que dans une phase d'apprentissage.
Deuxièmement parce que l'intrigue tourne encore sur Tom qui règle les histoires de son maître alors que celui-ci aurait du le faire 40 ans plus tôt.
Troisièmement parce que son « super méchant de la mort trop badass » finit toujours par faire un pétard mouillé. Non seulement les moyens pour le vaincre ne sont jamais aussi impressionnant que la menace qu'il représente mais, en plus, l'histoire pourrait être réglé en 2 pages si les deux zouaves arrêtaient de se comporter en menteur solitaire. Si ce n'était pas un reboot du tome 2 j'aurais accepté.
Quatrièmement, l'ambiance. On ne sent pas le froid à la lecture.


Le début partait bien, on nous prépare à cette maison coincée au bord d'une falaise, qui accueille l'obscure dans sa cave (et donc le froid qui va avec), dans cette région où le blizzard empêche de sortir pendant une partie de l'hiver, où il faut faire des provisions.
Pourtant, le reste du livre ne fait que nous bassiner avec du vocabulaire bien scolaire. De la neige, du blizzard, et vas-y que quand je marche ça fait un sillon, et vas-y que mon haleine fait de la vapeur, et vas-y qu'on est coincé une semaine dans la maison sans pouvoir sortir. Mais aucune conséquence réelle.
Je dois m'enfuir en milieu de la nuit dans le blizzard pour sauver ma peau ? 4 lignes suffisent.
Je dois me dépêcher de rentrer voir mon père, à 2 jours de marche de là ? On évoque pas la nuit passée dehors (ou dans une auberge, aucune idée)
Et ça se balade toute la journée sans se perdre, ça fait 3000 aller-retours dans tous les sens, ça se permet de prendre tranquillement son petit-déj alors qu'on doit aller sauver quelqu'un d'urgence, ça fait le ménage après avoir passé 2-3 jours sans boire ni manger avant de se reposer. La douleur, la fatigue et le froid ne sont pas intrusifs, ils sont simplement signalés comme des états random dans un jeu vidéo.


Bref, on ne ressent presque aucune angoisse, même dans les moments les plus importants, car il y a toujours une pause dans le récit pour nous rendormir. Qu'on comprenne bien ma nuance : que le personnage se repose c'est normal mais ça n'oblige pas à le décrire. Au niveau du rythme, passer directement à la suite avec un simple « J'étais épuisé de ma fuite et bidule avait besoin de temps pour rassembler son courage. Nous attendîmes le lendemain pour avoir la force nécessaire à l'application du plan » au lieu de passer 20 lignes à bouffer des œufs ça laisse le lecteur dans l'ambiance.


La fin, toujours trop joyeuse puisque c'est un livre pour enfant, ne donne pas particulièrement envie de connaître la suite, puisqu'il n'y a aucune continuité dans les ennemis et que « l'Obscur grandissant » n'est pas de ceux qu'on peut détruire pour de bon, particulièrement dans un univers où on ne tue pas ses ennemis mais qu'on les enferme.
Le tome 4 prévoit de s'attaquer à un village de sorcière que (encore) l'épouvanteur avait laissé agir sans s'en préoccuper. Pourquoi maintenant ? En quoi cette année est plus importante que les 10-20-30 années précédentes ? En quoi leur échec pourrait impacter sur le monde environnant ? Pffft.


Je vais terminer sur un petit spoil pour ceux qui ont lu le livre.


C'est pas le plus gros pétard mouillé du monde d'avoir piégé le livre dès le début ? Il n'y avait aucun putain de risque que le démon soit libéré, à aucun moment. Limite il suffisait de le laisser voler le livre volontairement et la question aurait été réglée tout de suite.
Alors oui, il voulait respecter la mémoire d'Emily, blabla. Mais depuis le tome 1, on dirait que tous les problèmes graves du Comté sont la cause de la faiblesse de l'épouvanteur.

EliseMarty
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le 11 févr. 2016

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