La Forêt de flammes et d'ombres par Yves MONTMARTIN

En 1944, au Japon, les jeunes étudiants échappent encore à l’enrôlement systématique, mais ils doivent contribuer à l’effort de guerre en travaillant, notamment dans les services publics. Dans un centre de tri postal, Ren fait la rencontre de Yuki, une jeune femme également étudiante en peinture, et de Bin, un violoniste en formation dans l’une des écoles de musique de Tokyo. Une amitié sincère se noue entre les trois jeunes gens, jusqu’au jour où Ren reçoit un ordre d’incorporation dans l’armée : le statut protecteur d’étudiant s’efface devant le besoin croissant de soldats pour poursuivre le combat.

C’est un roman empreint de beauté et de poésie, sur les blessures du passé, le pouvoir de l’amour et celui de l’art dans la reconstruction. Face à la guerre et à la violence des hommes, demeurent la musique, la peinture et les liens indéfectibles. Ren, artiste inoubliable et hors du commun, a été propulsé dans l’enfer de la guerre par le fanatisme exacerbé et tyrannique du régime impérial. Il en est revenu tel un mort-vivant, privé de ses mains. Avec ses deux amis, il partage ce désir de migration, ce besoin d’un ailleurs, d’aller au-delà des limites préétablies de son monde, de s’élever au-dessus du formatage imposé par la langue et la culture qu’elle véhicule. S’ouvrir à de nouveaux horizons.

Mizubayashi écrit en français avec une maîtrise impressionnante. Son style est très singulier : à la fois japonais par sa délicatesse et français par sa construction et sa réflexion. Ses phrases sont faites de pauses, de retenues, de silences. Dans ce roman, la pudeur japonaise rencontre la sensibilité française : il ne dit pas tout, mais laisse deviner beaucoup.