Serre les dents, ferme ta gueule, bouffe le vent et avance ! Ordres intimes que me donnait le livre au cours de la lecture, je n’ai jamais lâché cette idée et une bourrasque a fait défiler les pages devant mes yeux à une vitesse ahurissante.
La Horde du Contrevent, 700 pages, quelques jours seulement, le livre n’aura pas survécu, ou plutôt si, il survivra quelque part en moi. Le voyage, les personnages de la horde, le vent, tous survivent, ils ne me quitteront pas, ils resteront fiers, droits et charismatiques. Je faisais parti de la horde, j’étais ce 24ème mec, le clampin en bout de file qui, tant bien que mal, tirait sur la corde pour suivre ceux qui me guidaient, ceux que je voulais pas lâcher, cette pléthore de personnages, tous attachants, trop attachants. La horde se fait, se défait et on le vit, on plonge tête dans la première dans cet univers poussiéreux, on crache, on tousse, on avance, putain quel voyage.
Le style de Damasio est proprement sensationnel, le lyrisme et la vulgarité font bon ménage, se serrent la main d’une poigne franche. Des styles viennent s’y greffer tous exquis, tous logiques, tous personnels. Du coup malgré un côté peut-être un poil trop m’as-tu-vu, à un moment, le livre emporte et fait virevolter à travers ses phrasés. On s’attache d’autant plus qu’on vit l’histoire avec chaque personnage, la Horde est à la fois composée de 23 personnes différentes et à la fois d’une seule et même personne. Un groupe, un ensemble qu’on ne peut séparer, qu’on n’oserait pas séparer. Du coup on s’attache, beaucoup… et on regrette à la fin, on se crispe, on crie intérieurement, on est là, derrière, à pousser, on veut réussir, bordel y’a quoi là-haut ?!
L’histoire est d’ailleurs très simple, mais grâce à cela elle envoute car ce n’est pas tant l’histoire qui est intéressante mais l’univers. On y croirait tant l’ensemble paraît, par moment, possible tant les descriptions sont précises, tant les explications apparaissent plausibles. Damasio crée, il s’amuse avec son univers, laisse son imaginaire inventer de toutes pièces des villes d’une beauté sans pareil dont il peint les contours devant nos yeux. Et on y croit, le vent lacère, ébouriffe et les rafales n’ont pour équivalent que les envolées lyriques exceptionnelles dont fait preuve l’auteur.
La Horde du Contrevent reste un livre un peu difficile d’accès et le début a de quoi rebuter, mais une fois le contrat signé, on s’embarque dans un voyage émotionnel et sensoriel ahurissant. Dès que je commençais à m’y replonger, c’était très difficile de m’arrêter tant je dévorais les pages, crevant d’envie, à la fin, d’en voir plus. Caracole, Sov, Oroshi, 9ème Golgoth, Larco, Aoi, Alme, Larco, Erg, Horst, Karst, Pietro, Talweg, Coriolis, Barbak, Callirhoé, Léarc, Darbon, Arval, Firost, Sveziest, Tourse et Steppe, les gars, j’oublierai sûrement vos noms, vos prénoms, vos rôles, mais je n’oublierai jamais ce que vous m’avez fait vivre au cours de cette lecture. Je vous tire mon chapeau.