La maison et le monde, c'est l'histoire des contradictions et contrastes de l'Inde du début du siècle, tiraillée entre modernisme et tradition. On y retrouve l'homme traditionnel et le moderniste cynique, la femme amoureuse et la femme aimée, l'indépendance et la sécurité, la sagesse et la fougue, la philosophie et l'action... tant de dichotomies habilement tissées par un Tagore toujours aussi limpide et élégant dans son écriture.
A travers une période sombre de l'histoire de l'Inde (l'élan patriotique de préférence nationale qui verse ensuite dans la xénophobie et le fanatisme), il exalte l'Inde éternelle face aux velléités d'occidentalisation du colon britannique... tout en illustrant certaines ambiguïté.
Bimala, mariée à un maharaja libéral, est poussée par celui-ci à sortir du purdah, qui désigne dans la tradition indoue, la réclusion des femmes dans des appartements dédiées. C'est en sortant de cette maison, pour se frotter au monde (et au militantisme politique), que l'harmonie du couple s'étiole. Comment comprendre les conséquences de l'émancipation des femmes ?
Exaltation des vertus féminines, lyrisme sur la grande Patrie indienne, vénération protocolaire liée au système de castes, évocation philosophique de l'amour et du devoir... on retrouve le romanesque parfois grandiloquent de Tagore. J'ai beaucoup aimé la première partie, où Bimala sort de son cocon ouatée pour prendre son ampleur, mais lorsque son agentivité est à son zénith, on tombe dans le vaudeville qui ne m'a pas beaucoup intéressé. Dommage aussi (même si c'est l'époque, et la religion hindoue qui veulent ça) que l'on tombe dans un essentialisme forcenée avec beaucoup de déclarations définitives sur ce qu'est un homme et ce qu'est une femme.
Néanmoins, c'est toujours un plaisir de plonger dans l'Inde du début du XXème siècle, même si les développements de l'intrigue m'ont laissé plutôt indifférente.