"La maison près du marais" est un livre rare. Un livre dont l'intrigue marche sur un fil ténu entre le thriller psychologique et le récit fantastique, refusant de tomber franchement dans ce dernier domaine mais sans jamais s'en éloigner vraiment. Un couple de retraités, Alice et Albert recueille chez eux un jeune homme errant, Richard. Il est le fils qu'ils n'ont pas pu ou pas voulu avoir. Il va bouleverser leur vie comme ils vont bouleverser la sienne. Il va les sauver et les perdre comme eux vont le sauver et le perdre. Mais qui est-il vraiment ? Est-il ce garçon égaré et touchant qui exacerbe les instincts protecteurs les plus méritoires ou bien ce monstre d'indifférence et de violence qui provoque la répulsion et la haine ? Est-il cet être doué pour réparer, embellir, transformer ou bien ce rustre sans éducation qu'on regarde avec hostilité et dégoût ? C'est dans cette fracture constante entre des sentiments radicalement opposés, contradictoires et exacerbés que se situe la dimension fantastique du récit. Richard sera même décrit tour à tour comme un sorcier et un magicien. On ne peut pas mieux mettre en présence les forces du bien et les forces du mal. Et on ne peut pas leur donner un meilleur décor que cette maison isolée, que ces bois où l'on peut se perdre de toutes les façons possibles, que ces marais d'où s'élèvent les brumes qui brouillent tout ce que l'on voit ou tout ce qu'on ressent, que ces cavernes, trou démesuré ou simple réduit, où l'on peut s'enfouir ("s'enfuir"?), disparaître. On ne peut pas leur donner de meilleur décor que cette petite ville où vivent les vrais sauvages, ceux qui se croient civilisés parce qu'ils portent un uniforme ou pratiquent un métier.
Le récit est écrit à la première personne. Le narrateur, Albert, pris dans les filets de ses propres contradictions, nous fait un récit obsédant, hypnotisant des évènements qui avec une tranquillité implacable vont conduire les protagonistes à une issue digne d'un drame antique. Ce "je" du récit pourrait être le nôtre. Qu'aurais-je fait à leur place ? Qu'aurais-je fait pour pouvoir prétendre être quelqu'un de bon ? Et quelle issue aurais-je donner à cette histoire ? Aurais-je accepter de libérer le sauvage en moi ou bien l'aurais-je fait taire d'un coup de fusil ? Je n'ai toujours pas trouvé les réponses.

Marie-Laure29
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le 4 août 2017

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