Vienne, début du XXe siècle, Fridolin, médecin, est l'époux heureux d'Albertine et le père comblé d'une fille unique. Après avoir participé à un bal masqué, l'excitation provoquée par celui-ci est un puissant aphrodisiaque, qui non seulement pousse notre couple à faire l'amour comme aux premiers jours mais aussi à se faire des confidences. Ainsi Madame avoue avoir éprouvé du désir pour un jeune officier danois, lors des dernières vacances en bord de mer, Monsieur reconnait qu'il en a lui-même éprouvé lors de sa rencontre, sur la plateforme d'une cabine de plage, avec une belle et jeune adolescente. Des confidences qui ne sont pas sans perturber Monsieur et qui le poussent, une nuit à la vadrouille au lieu de rentrer au foyer. Après avoir rejeté les avances de la fille d'un de ses patients, qui vient juste de rendre l'âme, ne pas avoir touché une jeune prostituée dans le logement de laquelle il était pourtant monté, il rencontre par hasard dans un bar un ancien camarade de faculté, devenu pianiste. Celui-ci lui révèle qu'il exerce, entre autres, son art les yeux bandés pendant de drôles d'orgies masquées, et que justement il ne va pas tarder à travailler dans l'une d'entre elles. Notre protagoniste, intrigué, décide de pénétrer dans cette réception pour le moins insolite...


Cela ne vous rappelle pas quelque chose ? Stanley Kubrick, Eyes Wide Shut, le testament d'un géant absolu...


J'avoue qu'à la lecture de cette oeuvre, je n'ai pas pu m'empêcher d'avoir soit ça dans la tête, soit ça... La puissance du Septième Art par l'oeil du Maître...


Mais comme oeuvre littéraire, c'est aussi d'une puissance incroyable. L'auteur autrichien, dont j'ai envie de dire qu'il est aussi un maître après avoir lu cette nouvelle (et que je compte creuser car je le connais beaucoup trop peu !), Arthur Schnitzler, sous forte influence freudienne et aussi autobiographique, a écrit une oeuvre aussi envoutante que perturbante, sur les choses qui "devraient" rester de l'ordre du refoulement, des tréfonds obscurs de notre cerveau, et qu'il fait pourtant remonter à la surface, le tout mâtiné d'un subtil érotisme parfois teinté de perversité. C'est aussi une vision émouvante du couple, oui émouvante, toutes les inévitables petites frustrations, regrets, qui ne peuvent que toucher même les unions les plus heureuses, et pourtant ça tient...


On lit l'ensemble comme si on était soi-même dans un rêve éveillé et quand on termine la toute dernière phrase, on sort de la lecture comme d'une espèce de torpeur, d'engourdissement, d'un sommeil conscient en quelque sorte... La puissance d'une littérature qui parvient aussi à pénétrer au plus profond de nous.

Plume231
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le 13 sept. 2017

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