La Religion
7.6
La Religion

livre de Tim Willocks (2006)

"Porté par une langue aussi intense que réaliste, La Religion évoque autant Alexandre Dumas qu'Umberto Eco. Un classique immédiat", peut-on lire sur le 4ème de couverture. De quoi s'attendre à un bijou d'aventure et de sapience. Les nombreuses critiques élogieuses trouvables sur internet, senscritique y compris, m'en mettaient l'eau à la bouche.


Difficile pour ma part de ne pas tomber de haut en découvrant au fil des pages une histoire bateau tirée tout droit des poncifs de fantasy. Ici, l'on découvre Mattias Tannhauser : un adolescent orphelin, seul survivant du massacre de son village, élevé dans une culture étrangère en un tueur sanguinaire au bon fond. C'est d'une facilité ahurissante, au point où je m'attendais à ce que l'auteur torde le cliché d'une façon ou d'une autre, mais non, on reste sur des sentiers tellement battus que s'y promener est sans intérêt.


Ce Conan du XVIème siècle se voit embarqué à la recherche du fils disparu d'une noble française, avec le siège de Malte en toile de fond. Et l'intrigue s'embourbe, n'avance pas, se perd en amourettes particulièrement peu crédibles, mal écrites, faciles elles aussi. Un triangle amoureux se met (très) rapidement en place entre notre tueur sympathique et deux filles sorties droit d'un fantasme malsain. L'une est une célibataire endurcie d'une grande beauté, ayant passé des années à repousser ses prétendants, et qui va tomber folle amoureuse de Tannhauser le temps d'un battement de cil. L'autre est une jeune folle de 19 ans, mentalement endommagée par de nombreux viols et sévices, persuadée de lire l'avenir dans un kaléidoscope, avide de sexe et de Tannhauser. Ces personnages, et les relations qui les lient, sont à mes yeux à côté de la plaque, du niveau d'une fan fic douteuse.


Je me suis arrêté vers la moitié du roman. Si je n'avais rien eu d'autre sous la main, peut-être serais-je allé jusqu'au bout, mais dans la douleur, en me forçant. J'ai trouvé le style plat et blindé d'effets modernes grossiers, comme par exemple des retours à la ligne pour augmenter l'effet dramatique d'une phrase. C'est superficiel, de la poudre aux yeux cachant un manque de verve. Willocks réussit malgré tout à dépeindre efficacement les scènes de violences, avec des mots crus et sans peur d'aller dans l'horreur. Je n'ai pu m'empêcher, tout de même, d'y lire l'orgueil de l'auteur, se complaisant à décrire le gore, la merde, la pisse, de manière frontale. Un comportement adolescent d'irrévérence, de provocation, avec la volonté de choquer facilement. Ces scènes se répétant régulièrement, et ces artifices étant toujours les mêmes, j'ai fini par en être gêné pour Willocks. J'avais envie de lui dire d'y aller piano-piano. Faire constamment dans le coup de poing fatigue.


Au final j'arrête ce pavé sur une impression très moyenne. Je vois le divertissement que l'on peut y trouver, mais soyons sérieux : Dumas ? Eco ? Dans vos rêves oui.

Pirlouit
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le 28 févr. 2021

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