La Route
7.5
La Route

livre de Cormac McCarthy (2006)

J'ai toujours pensé que ça allait mal finir. Depuis petit, en fait. Qu'il fallait que ça crame. 
Rien à voir avec un feu divin ou un nuage dense de sauterelles sodomites.
Non non, point de courroux céleste.
Fallait que ça crame, c'est tout. 
Une certitude qui flottait dans l'air avant les volutes de ce bûcher-monde de merde.

J'ai vu des films, j'ai lu des livres. Mes choix se portant par goût vers des œuvres qui mettaient en scène la fin de l'espèce humaine, ces hommes qui m'ont toujours donné envie de gerber. Depuis cette première goulée d'air chaud qui déchira mes poumons m'annonçant sans détours que ça n'allait pas être une partie de plaisir, comme pour me dire « bienvenue ducon, tu vas en chier » .De la vie et de tout le reste.

Quand tout ne tient plus qu'à un fil.

Ce livre est un manifeste, une sorte de bible apocalyptique qui parle tellement bien, avec une infinie justesse et une économie de mots, de l'Homme.
De la vie en territoire hostile, celle à laquelle on s'accroche, même si l'horizon ne voit plus la moindre fleur.
De la quête absurde inscrite dans nos gènes depuis que la lumière est, depuis que l'eau mouille : l'immortalité. Vivre encore quand il n'y a plus rien, une poussière dans un monde en cendres, un enfant qui fait avancer .
Et la chair de ta chair c'est quoi sinon des bouts de toi ?
Porter son enfant, l'élever, lui faire la courte échelle et le protéger, c'est couver nos gènes, les sauvegarder et ainsi effleurer la vie éternelle.
On n'est pas dans le Sauveur, pas dans l'Enfant-lumière sur lequel repose les espoirs d'un futur. Le futur, c'est tout de suite. 
On est dans le souffle qui fait avancer, grandir.
Réussir à trouver un trou pour s'y cacher et ne pas penser à demain.
Juste parvenir à finir cette journée sans croiser la Faucheuse.

C'est ciselé comme une pierre lugubre qui pourtant brillerait d'une lumière noire. 
Une écriture à la syntaxe minimaliste. Sèche mais profondément humaine, délestée d'un romantisme superflu, comme un cadeau empoisonné qui s'imprime en toi et te leste pour toujours.


C'est profond comme les tréfonds de ton âme et ça glace le sang de lire tellement d'amour avec si peu de mots.

C'est tangible et terriblement éprouvant.

Lire « La Route » c'est entamer un chemin qui reste gravé en toi longtemps, serpentant dans ton âme.

Lire « La Route » ce n'est pas lire, c'est vivre l'espoir fou de continuer.
DjeeVanCleef
10
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Les meilleurs livres américains

Créée

le 29 mars 2014

Critique lue 5.7K fois

110 j'aime

37 commentaires

DjeeVanCleef

Écrit par

Critique lue 5.7K fois

110
37

D'autres avis sur La Route

La Route
DjeeVanCleef
10

Apocalypse ? No !

J'ai toujours pensé que ça allait mal finir. Depuis petit, en fait. Qu'il fallait que ça crame.  Rien à voir avec un feu divin ou un nuage dense de sauterelles sodomites. Non non, point de courroux...

le 29 mars 2014

110 j'aime

37

La Route
Spoof
9

Roadbook post-apo introspectif et é

Quand Cormac McCarthy, l'auteur de "No Country for Old Men", s'attaque au récit post-apocalyptique, il fait fi des clichés du genre et des conventions d'écriture. J'avoue ne pas être un amateur...

le 4 mars 2010

54 j'aime

4

La Route
Vincent-Ruozzi
8

Terre brûlée, c’est pour les vivants

La Route est une histoire qui repousse les frontières du genre post-apocalyptique. La puissance descriptive de Cormac McCarthy, l’auteur du livre, emporte le lecteur dans les tréfonds les plus...

le 30 juin 2017

36 j'aime

6

Du même critique

Retour vers le futur
DjeeVanCleef
10

Là où on va, on n'a pas besoin de route !

J'adore "Retour vers le futur" et j'adore le couscous. C'est pas faute d'en avoir mangé, mais j'adore, ça me ramène à une autre époque, une époque où j'avais empruntée la VHS à Stéphane Renouf -...

le 22 mai 2013

204 j'aime

32

Les Fils de l'homme
DjeeVanCleef
10

L'évangile selon Thélonius.

2027, un monde où les enfants ne naissent plus, comme une malédiction du Tout-Puissant, un courroux divin. Un monde qui s'écroule sous les coups des intégrismes de tous poils, où seule, la Grande...

le 26 juil. 2013

194 j'aime

36

Rambo
DjeeVanCleef
9

La chasse.

Welcome to Hope. Ses lacs, ses montagnes et Will Teasle son Shérif. Plutôt facile de faire régner l'ordre par ici, serrer des pognes et éviter les embrouilles. Par exemple, escorter cet intrus, ce...

le 13 mai 2013

181 j'aime

46