Cela commence pourtant si bien. De l'intrigue. Un meurtre. Une brute assumée de policier qui doit se coltiner toute l'intelligentsia parisienne, verbeuse et délirante, pour mener son enquête. Des digressions intellectuelles amusantes et instructives.
Et puis on sombre dans le n'importe quoi. Ce n'est pas l'absurde, car l'absurde aurait au moins cette touche de fantaisie rafraîchissante.
Vous croyez que le langage est le fil directeur philosophique de ce bouquin, sous des couverts de polar subversif ? Bah non, raté. Pour Laurent Binet, le langage, ce sont les joutes oratoires sur des sujets bidons qu'on dispute à la façon des élèves avocats.
Imaginez vous sur scène, à la place de l'orateur. Une fois la joute gagnée sur un sujet pérave de première L tel "le baroque et le classique", vous pourrez vous fendre d'un 'j't'ai cassé" digne d'un personnage à t-shirt jaune tristement célèbre. Et bim, on coupe le doigt au vaincu.
Et Binet cumule les fautes de mauvais goût qui m'irritent. Les propos en langue étrangère non traduits pendant des pages et des pages. Vero, e, je comprends un peu l'italien, comme tout français, mais quand même... et dès que l'action se déroule à l'étranger, les clichés et poncifs abondent jusqu'à étouffer même l'humour qu'ils sont censés alimenter. Puis viennent les partouzes peu justifiées ça et là. Les métaphores sportives filées sur plusieurs pages (oui, je n'aime pas ça). Les scènes d'action un peu barbantes.
Et enfin, comble de mauvais goût, les références au "romancier" qui deviennent récurrentes à la fin du livre. C'est tout comme un acteur de cinéma qui, détournant son regard sombre du désert du Névada où volent les vautours, se tournerait soudain vers vous et vous dirait : "mais au fait : ce n'est qu'un film !"
Pouah.
Je dois reconnaître que pour quelqu'un qui n'a pas connu cette période de l'histoire de France pré-mittérandienne, ce livre n'est pas totalement dénué d'intérêt ; mais une fois la pelure intello des premiers chapitres râpée, on tombe dans le vaudeville partouzard et picaresque sans aucune prétention stylistique, sans poésie, et même, étrangement, sans aucune idée finale sur le langage. Sans argument philosophique. Nada.
Je n'aime pas perdre mon temps avec ce genre d'écrit.

AntonJørgen
3
Écrit par

Créée

le 7 nov. 2016

Critique lue 698 fois

8 j'aime

1 commentaire

Anton Jørgen

Écrit par

Critique lue 698 fois

8
1

D'autres avis sur La Septième Fonction du langage

La Septième Fonction du langage
Nadouch03
4

Plongée dans un fouillis politico-linguistique...

Ah qu'il est difficile de noter et critiquer ce roman ! Presque aussi difficile qu'il m'a été de le finir ! Car, si je me suis délectée du premier tiers, au bout d'un moment je me suis lassée des...

le 19 oct. 2015

9 j'aime

La Septième Fonction du langage
AntonJørgen
3

Brice de Nice au pays des sémiologues

Cela commence pourtant si bien. De l'intrigue. Un meurtre. Une brute assumée de policier qui doit se coltiner toute l'intelligentsia parisienne, verbeuse et délirante, pour mener son enquête. Des...

le 7 nov. 2016

8 j'aime

1

Du même critique

Dans les forêts de Sibérie
AntonJørgen
3

Tribulations d'un bobo égomane perdu en Sibérie

Récit biographique. Sylvain Tesson nous emmène dans sa piaule de location en Sibérie. Il part pour six mois avec beaucoup de bouquins et de la gnôle pour se bourrer la gueule. Certes. Intéressant...

le 30 avr. 2019

16 j'aime

1

La Septième Fonction du langage
AntonJørgen
3

Brice de Nice au pays des sémiologues

Cela commence pourtant si bien. De l'intrigue. Un meurtre. Une brute assumée de policier qui doit se coltiner toute l'intelligentsia parisienne, verbeuse et délirante, pour mener son enquête. Des...

le 7 nov. 2016

8 j'aime

1

Meursault, contre-enquête
AntonJørgen
3

Daoud s'est cassé la gueule

Se comparer à Camus, c'est casse-gueule. Eh bien Kamel Daoud s'est cassé la gueule. Ce n'est pas qu'il écrive mal, ni vraiment bien non plus. C'est passable. Mais Kamel Daoud est accro à l'une des...

le 14 juil. 2016

8 j'aime

1