Charles le michto

Partir d'un fait aussi random qu'un crash d'avion en Afrique pour ensuite développer insidieusement une critique de l'occident, quoi qu'on en pense, c'est original. Choisir de parler d'un point de vue partiellement extérieur (le type a grandi en Afrique mais est quand même originaire d'Occident) offre cette dualité qui permet la critique sans qu'on soit totalement dépourvu d'empathie pour le protagoniste (ce qui permet d'ingérer plus facilement la critique acerbe qu'il fait de notre mode de vie). On retrouve de beaux portraits de clichés occidentaux : la tante dépensière, le cousin mal dans sa peau, l'oncle politicien de village, la psychologue ratée. Tous ces personnages ont en commun un cruel manque d'amour, ils se sont perdus dans leur solitude ultramoderne. Leur existence morne et faite d'apparences s'oppose à la relation passionnée qu'a Charles avec Septembre. Charles se fout pas mal des conventions qui régissent notre société, il vit dans une forme d'honnêteté qui force le respect de ses camarades, des gens qui gravitent autour de lui mais aussi du lecteur. Dans ce tableau où les faux-semblants priment sur le réel, Charles finit par être encore plus perdu que dans la jungle où il a grandi. A la froideur de l'occident est opposé la beauté des mots, avec une pléthore d'extraits de recueils de poésie disséminés à travers les pages. L'écriture de Gunzig est mordante et c'est pour cela qu'on l'aime, ce bouquin se dévore littéralement et s'apprécie plus pour son écriture que pour le petit mystère qui tourne autour des actions de Charles.