Lire le Huitième Sortilège sans avoir lu la Huitième Couleur, c'est faire le choix périlleux d'être complétement largué avec Rincevent et Deuxfleurs par-dessus le Disque, dans les confins de l'espace. Du coup, si vous n'avez pas lu le second des livres susmentionnés, hop hop hop, pas la peine de continuer. Même si, y en a qui peuvent aimer. Enfin, faites comme vous voulez.


J'ai découvert le Huitième Sortilège directement après la Huitième Couleur, et comme je le dis dans ma critique précédente, j'étais déjà fortement entiché de l'univers fabuleux de ce curieux bonhomme barbu. Mordu même. Assez pour lui pardonner ses torts de jeunesse.


Si vous n'êtes pas comme moi (et j'aurais du mal à vous en blâmer, mais je vous en plains) et que vous avez voulu commencer par la Huitième Couleur - ou ce que les raseurs et les gens ordonnés appelleront "lire l’œuvre dans l'ordre" - vous avez peut-être eu un peu de mal.


Pas de panique, ça s'arrange un peu avec ce tome.


Le Huitième Sortilège, second volume du Disque-Monde, est la suite directe du premier tome : on y retrouve Rincevent et Deuxfleurs dans la fâcheuse posture où on les avait laissé. Ce second tome va suivre leurs aventures pour tenter d'achever vivants le premier voyage touristique du Disque et accessoirement, le sauver de la destruction totale.


Globalement, le Huitième Sortilège reprend beaucoup d'éléments de ce qui marchait chez son prédécesseur. Mais il s'améliore sur des points essentiels :



  • Il raconte une histoire cohérente. On a beaucoup moins l'impression de lire un patchwork de parodies d'heroic-fantasy, mais bien plus une aventure logique dans un univers qui assume toujours autant ses origines, mais s'en moque complétement.

  • Il est plus original en matière d'humour. Reprenant encore et toujours des clichés de la fantasy ou des contes pour s'en moquer (le barbare légendaire, le rite d'invocation de la Mort, le collège de magie, les trolls ou la maison en pain d'épice), il le fait avec beaucoup plus d'assurance, de malice et d'excentricité que dans son premier livre. Et toujours un certain pragmatisme, inhabituel pour un univers saturé par la magie. Cela va vous donner une bonne idée de ce que Pratchett sera capable de faire par la suite.

  • Il est globalement moins bordélique, tant au niveau du rythme que du style. Je pensais que dans son premier livre, Pratchett avait le tort de vouloir en faire trop : ici, tout est globalement mieux dosé. On a toujours droit à des digressions savoureuses, un ton malicieux et des petites phrases qui font très souvent mouches, mais on a moins l'impression que l'auteur essaye de nous noyer sous les concepts loufoques.


Le Huitième Sortilège recolle les morceaux de son aîné, réarrange le tout pour le prolonger de fort belle manière, offrant également au Disque quelques unes de ces plus belles trouvailles : le bibliothécaire de l'Université de l'Invisible et Cohen le Barbare n'étant pas des moindres.


Toutefois, le Huitième Sortilège est loin d'être parfait : si l'on prend l'histoire telle quelle, on a affaire quelque chose d'assez classique, très loin des ouvrages plus riches que Pratchett sera capable d'écrire plus tard.


L'intrigue, même si elle fonctionne en parfaite logique avec son univers loufoque, est en effet assez convenue, un peu trop grandiloquente, et se lit plus pour son potentiel comique que pour son réel intérêt.


On sent encore dans cette histoire que l'auteur se cherche un peu. Elle n'aborde que de loin les thèmes qui deviendront pratchétiens, même si Rincevent, le mage raté, en revêt par moment les quelques atours. Toutefois, elle préfigure déjà, au travers du personnage de Trymon, ce qui sera le mal absolu dans l'univers du Disque.


Pas la bêtise ou la méchanceté, car à défaut d'être des qualités, on peut toujours en rire. Tous les personnages du Disque se révèlent bêtes et méchants à un moment ou à un autre. Dans un univers pareil, c'est même une question de survie.


Non, le pire des travers qui puisse exister dans le Disque et sur notre bonne vieille terre, c'est l'absence d'imagination.

Hamsolovski
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le 23 juil. 2015

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