Du malheur à l'attente du Messie.
Face aux nombreuses tribulations du peuple hébreu face à ses ennemis (guerres), mais aussi face à lui-même (divisions, rivalités, désobéissances à la Loi), Isaïe rappelle la Parole de Iahvé. Cette littérature est donc d'origine avant tout orale, et la beauté des images, la force des expressions font du Livre d'Isaïe l'un des sommets de toute la littérature biblique.
Hésitant entre présent éternel ("il fait lever de leur trône les rois de toutes les nations") et futur prophétique ("Oui, Iahvé aura pitié de Jacob"), le Prophète transcende le Temps, et contemple le devenir d'un point de vue supérieur, où tout est déjà écrit et lisible simultanément.
La beauté grandiose du Livre d'Isaïe ne doit pas faire oublier que son contenu n'existe qu'en raison de l'échec séculaire des Hébreux à respecter la Loi de Iahvé: entre menaces de sanctions et promesses de rédemption, se profile nettement un espoir relégué dans un futur fort imprécis: un Messie (un "Oint") qui rétablira définitivement la paix et la justice dans un peuple bien incapable d'y parvenir par lui-même. Les espérances chrétiennes vont se greffer sur le Livre d'Isaïe, juqu'à tracer de Jésus-Christ un portrait conforme à ce qui est dit du Messie dans ce Livre: pour être crédible, la Parole de Dieu doit, au minimum, être cohérente avec elle-même.
De même, la vision de la Jérusalem céleste, cité idéale des élus et de la fin des temps, prend nettement corps dans l'ouvrage.
Signalons que le Livre d'Isaïe contient la seule allusion biblique acceptable (quoique diversement traduite) au démon femelle sumérien, Lilith (Lilitû), qui n'a pas fini de faire rêver les ésotéristes et les poètes.
La "fureur" poétique et prophétique reconnue aux livres bibliques, et imitée par une abondante littérature , de l'Antiquité au XIXe siècle, parvient ici à l'un de ses sommets.